Constitués en collectif, 11 salariés de "Charlie Hebdo" réclament à la direction un statut d'"actionnaires salariés à parts égales". Le journal a recueilli près de 30 millions d'euros depuis l'attentat du 7 janvier.
Deux mois après l'attentat qui a décimé "Charlie Hebdo", les survivants se divisent au sein de la rédaction. Onze salariés demandent que tous les collaborateurs deviennent actionnaires à parts égales du journal, qui a recueilli près de 30 millions d'euros depuis la tuerie.
"Laurent Léger (journaliste de "Charlie Hebdo", NDLR) a annoncé mercredi en conférence de rédaction avoir créé un collectif pour ouvrir des négociations sur une répartition égalitaire du capital", a indiqué à l'AFP un des avocats du journal, représentant de la direction, qui n'a pas souhaité être nommé.
"Charlie Hebdo" est détenu actuellement à 40 % par les parents de Charb, ex-directeur de la publication tué dans l'attaque du 7 janvier, à 40 % par le dessinateur Riss, blessé à l'épaule, devenu le nouveau directeur du journal, et à 20 % par Éric Portheault, co-gérant.
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"Pour le moment, on n'est pas associés aux choix", a déclaré l’urgentiste Patrick Pelloux, membre du collectif, dont fait également partie le dessinateur Luz. "Il n'y a rien contre la direction actuelle, aucun conflit avec qui que ce soit, mais par rapport à ce qui s'est passé, les salariés veulent être davantage acteurs de l'entreprise […] À partir du moment où une entreprise est décimée, vous vous sentez complètement liés à elle. Il ne s'agit pas de se partager le gâteau. L'argent ne nous intéresse pas", assure-t-il.
Le collectif a engagé deux avocats, dont Antoine Comte, qui a notamment défendu Rue89, le Syndicat de la magistrature et Olivier Besancenot.
"Tout cet argent fait plus de mal que de bien"
"Nous prenons acte des souhaits des salariés d'être associés à la vie du journal. Mais nous sommes encore très loin de la réflexion sur l'actionnariat", a commenté l'avocat du journal, expliquant que les dirigeants étaient "navrés" de cette initiative.
"Riss est encore à l'hôpital, les parts de Charb sont gelées par (sa) succession. Tout cet argent fait plus de mal que de bien. Cela fait penser à ces enterrements où on se bat déjà en revenant du cimetière pour les bijoux de la grand-mère", a-t-il regretté.
"Nous devons d'abord penser à sortir un journal tous les mercredis. Il faut aussi régler des problèmes fiscaux, puisque par exemple les dons sont taxés à 60 %. Les dons iront aux familles des victimes. Le produit des ventes ira dans la caisse du journal. Il servira aussi à créer une fondation, notamment pour enseigner la liberté d'expression à l'école", a expliqué l'avocat.
Juste avant l'attentat jihadiste qui a tué 12 personnes de l'équipe, le journal, au bord de la faillite, ne se vendait qu'à 30 000 exemplaires. Il a depuis vu affluer les dons et les abonnements, et vendu à plus de sept millions d'exemplaires son "numéro des survivants" du 14 janvier. De nombreux collaborateurs vivent désormais sous protection policière.
Avec AFP