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Témoignages d’Auschwitz : "Quand on voyait Mengele, on courait se cacher"

Marian Turski et Lidia Maksymowicz sont deux Polonais survivants d'Auschwitz. Lui avait 19 ans à son arrivée, Lidia, seulement 3 ans. Tous deux se souviennent et racontent à France 24 l’inénarrable enfer des camps.

"Il était 3 heures du matin, il faisait encore sombre... Et ces flammes… Ces flammes immenses qui s'échappent des cheminées… Quand je ferme les yeux, je revois cette scène..." Marian Turski a 19 ans en 1944, lorsqu’il pénètre à Auschwitz-Birkenau. Cette arrivée dans le camp d’extermination constitue l’un des rares souvenirs qu’il lui reste. Marian a été frappé d’amnésie après la guerre.

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La tête plongée dans ses mains, le vieil homme de 90 ans tente de rassembler quelques bribes de cet enfer. Il se rappelle de son entrée dans le camp et de sa sortie, plus précisément de ces "marches forcées", celles que les nazis ont entamées, pour fuir devant l’avancée des Alliés, avec des milliers de déportés, exténués, décharnés. Marian a fait partie de ceux-là. "J'étais si fatigué, que je dormais en marchant, mais je continuais à marcher. Ceux qui s'arrêtaient ne serait-ce qu'un instant, recevaient une balle dans la tête", raconte-t-il.

"Il nous mettait des gouttes dans les yeux pour rendre notre iris bleu"

Lidia, elle, a ce regard austère, pudique. Elle raconte froidement et sans larmes, son expérience concentrationnaire. Elle avait 3 ans quand elle a été déportée de Biélorussie à Auschwitz. Elle a vécu 15 mois dans le baraquement réservé aux enfants. Le docteur Mengele venait régulièrement y chercher des enfants pour en faire des cobayes humains.

"Quand on le voyait arriver, on courait se cacher... Là-bas, vous voyez, juste là-bas, on se pressait tous pour qu'on ne nous voit pas", se rappelle-t-elle. "Il nous mettait des gouttes dans les yeux. Je ne comprenais pas pourquoi au début. C'était pour rendre notre iris bleu. Mais, bien sûr, ça ne marchait pas. Ça me rendait aveugle durant plusieurs jours et j'avais très mal", raconte-t-elle.

Lidia ne s’en est jamais remise. Elle se dit "mutilée" à vie. Dans son corps et dans son âme. "Je n'ai jamais su montrer de l'amour et de la chaleur à mes proches", explique-t-elle, calmement. "Je n’ai jamais su montrer d’amour à mon fils. Je me sens comme handicapée. Je suis sortie mutilée de cet endroit", ajoute-t-elle. Près de 200 000 enfants ont été déportés à Auschwitz, 700 ont survécu.