Le président iranien a soufflé le chaud et le froid, jeudi, à la tribune de l'ONU, critiquant "la stratégie erronée" de l'Occident au Moyen-Orient, tout en condamnant fermement les violences commises par les jihadistes de l'organisation de l'EI.
S’exprimant jeudi 25 septembre à la tribune de l’ONU, le président iranien Hassan Rohani a eu des mots très durs contre les violences commises par l’organisation de l’État islamique (EI). Mais il n’a pas été tendre non plus avec la stratégie occidentale au Moyen-Orient.
"Ces extrémistes parlent une seule et même langue. Ils n’ont pas la même couleur de peau et ne détiennent pas la même nationalité. Ces extrémistes sont venus au Moyen-Orient du monde entier. […] Ils ont un objectif commun : la destruction de la civilisation et l’émergence de l’islamophobie", a-t-il affirmé devant les chefs d’État présents à l'ONU.
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Adoptant une position très nette dans la bataille contre le terrorisme, le président iranien a déclaré qu’il fallait d’abord intensifier la coopération des pays de la région au niveau "social et politique", ainsi que "dans les domaines de la sécurité et de la défense".
"Ils doivent garder à l’esprit que nous sommes tous dans le même bateau", a-t-il rappelé sans nommer précisément de pays, mais ciblant sans aucun doute l’Arabie saoudite. Les deux pays, qui se disputent l’hégémonie de la région, ont récemment opéré un net rapprochement dans la lutte contre les jihadistes de l’EI, qui menacent leurs frontières mutuelles.
La coalition anti-EI reléguée au second plan
Reléguant le rôle des États-Unis, de la France et des pays occidentaux - qui ont pris la tête de la coalition anti-EI - au second plan, Hassan Rohani a affirmé que les pays du Moyen-Orient étaient "les mieux placés" pour former une coalition. "C’est à eux d’assumer la responsabilité de combattre la violence et le terrorisme" a-t-il déclaré. "Si d’autres pays souhaitent agir contre le terrorisme, ils doivent bien entendu leur prêter main forte" a souligné le président iranien. Hassan Rohani ne s’est pas gardé de blâmer l’Occident, dénonçant sa "stratégie erronée" au Moyen-Orient et ses erreurs passées.
"Si les pays qui se disent aujourd’hui de la coalition continuent à se disputer l’hégémonie dans la région, cela constituerait une erreur stratégique", a prévenu Hassan Rohani, en référence aux opérations militaires occidentales en Afghanistan et en Irak. Il a d'ailleurs employé les termes d’"agression militaire". Remontant le temps, le président iranien a également dénoncé la présence très ancienne des pays occidentaux dans la région, les accusant d’une partie des troubles récents. " Le sentiment anti-occidental d’aujourd’hui est la conséquence du colonialisme d’hier" a accusé le chef d’État.
Enfin, il a condamné "les ingérences inappropriées en Syrie", qui auraient encouragé le développement du terrorisme dans cette zone. Mercredi déjà s’exprimant dans une interview donnée à la chaîne de télévision américaine PBS à New York, Hassan Rohani avait demandé quels étaient les véritables objectifs de ces frappes contre la Syrie. L’Iran est le premier allié du dirigeant syrien Bachar al-Assad, ce qui reste le principal motif de division avec la coalition anti-EI.
Une "coopération dans l’avenir" dépendra de la levée des sanctions
Si le président iranien est resté flou sur une coopération durable avec les Occidentaux, c’est aussi parce qu’il lie un tel geste à une levée des sanctions internationales contre son pays. Mais cela ne se fera pas sans un accord est trouvé sur le programme nucléaire iranien.
Sans surprise, dans son discours, Hassan Rohani a fustigé les sanctions "oppressantes", qui pèsent sur son pays. Elles seraient le résultat d'une "erreur stratégique" de la part des Occidentaux et leur maintien "créerait des obstacles supplémentaires à une coopération à long terme dans l'avenir", a-t-il averti.
Des tractations sont en cours à New York entre l'Iran et la groupe dit 5+1 (États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine et Allemagne). Les négociateurs se sont donnés jusqu'au 24 novembre pour conclure un accord définitif, qui garantirait le caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire de Téhéran, en échange d'une levée des sanctions. Pour le moment d'après des sources diplomatiques on reste très loin d'un compromis.
Tout au long de son discours à l’ONU, le président iranien a répété à plusieurs reprises que l’Iran continuerait de poursuivre le développement de ce qu’il appelle le "nucléaire pacifique". Et ce "dans le cadre des lois internationales". Un discours officiel iranien déjà maintes fois entendue.
Avec AFP