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À la veille d'une conférence sur l'Irak à Paris, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve annonce que 930 individus venant de France sont impliqués dans des filières jihadistes. Un plan de lutte sera présenté lundi à l'Assemblée nationale.

Neuf-cent-trente ressortissants français ou étrangers résidant habituellement en France sont aujourd'hui impliqués dans le jihad en Syrie et en Irak, a annoncé, dimanche 14 septembre, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, dans un entretien accordé au "Journal du dimanche".

Le ministre s’est exprimé sur le sujet à la veille d’une conférence sur la sécurité en Irak, qui doit se tenir lundi à Paris. Lors de cette réunion internationale, il sera également question de l’essor de la filière jihadiste en France et en Europe, qui sévit notamment sur le territoire irakien avec l’organisation de l’État islamique. Le nombre de Français impliqués dans les filières jihadistes, qu'ils soient sur place, en transit ou de retour, a bondi de 75% depuis le début de l'année, selon le ministère de l'Intérieur.

Selon les chiffres du ministre, "350 [ jihadistes français ou résidant en France ] sont sur place, dont 60 femmes. Environ 180 sont repartis de Syrie et 170 sont en transit vers la zone. De plus, 230 ont exprimé des velléités de départ. "À ce total de 930 s'ajoutent 36 personnes décédées là-bas", précise le ministre.

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Dans son entretien, Bernard Cazeneuve se félicite tout de même des résultats de la mise en place d’une plate-forme de signalement depuis le mois d’avril par les autorités françaises. Celle-ci a permis d’éviter au moins 70 départs vers le jihad. "Nous avons été destinataires, depuis le printemps, de 350 signalements, dont 80 mineurs et 150 femmes", a indiqué le ministre de l’Intérieur.

Un plan de lutte contre les filières jihadistes

Autre rendez-vous clé cette semaine, Bernard Cazeneuve doit présenter lundi à l'Assemblée nationale un plan de lutte contre ces filières. "Face au terrorisme, il faut l'unité nationale", a déclaré le ministre de l'Intérieur qui souhaiterait former un "véritable consensus" des élus autour de son texte.

L'article premier du projet prévoit une interdiction administrative de sortie du territoire, avec retrait du passeport et de la carte d'identité quand il existe des "raisons sérieuses" de penser qu'une personne projette de rejoindre des zones de jihad. Une mesure qui pourrait concerner les quelque 230 personnes ayant des velléités de départ.

Cet outil pourrait aussi faciliter la surveillance de certains jihadistes de retour de Syrie, sachant que les Français constituent le premier contingent occidental en Syrie et en Irak avec 354 individus dont 60 femmes et six mineurs. "Une personne qui enfreint l'interdiction de sortie de territoire, si elle décide de revenir, elle est cueillie par les services et tout de suite judiciarisée", explique Sébastien Pietrasanta, le rapporteur socialiste du projet de loi à l'Assemblée.

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Pour faire face au risque de passage à l'acte, le texte prévoit également la création d'une nouvelle incrimination "d'entreprise terroriste individuelle", censée répondre à l'évolution des parcours. Pour éviter des dérives, ce nouveau chef d'inculpation requerra un élément intentionnel et au moins deux éléments matériels, dont la détention d'armes ou d'explosifs.

Des mesures sur internet

Le texte vise aussi à arrêter la diffusion de messages incitant au jihad et le recrutement de potentiels combattants via Internet, considérés comme des menaces immédiates. Il prévoit ainsi de renforcer la répression de l'apologie du terrorisme et de permettre le blocage administratif de certains sites.

Cette dernière mesure, visée par des amendements de suppression, est contestée par des députés de droite comme de gauche. "Nous sommes réalistes. Ce ne sera pas techniquement imparable, mais notre action permettra de perturber suffisamment, d'entraver à défaut d'empêcher", se défend Bernard Cazeneuve dans le "JDD".

Quelque 160 sites signalés en 2013 pourraient ainsi être bloqués, précise-t-on dans son entourage, rappelant que le texte prévoit d'offrir un délai de 24 heures à l'éditeur et à l'hébergeur afin de leur permettre de retirer le contenu d'eux-mêmes avant un éventuel blocage.

Avec Reuters et AFP