
Le maréchal égyptien al-Sissi, dont le nom est entaché par la sanglante répression menée contre les Frères musulmans dans son pays, a fait savoir qu'il "suivait de près" les violentes émeutes raciales qui secouent Ferguson, aux États-Unis.
Le maréchal égyptien al-Sissi qui sermonne Barack Obama sur la montée des violences à Ferguson et la répression policière qui y sévit. Non, ce n’est pas une plaisanterie de mauvais goût. L’Égypte a assuré, mardi 19 août, "suivre de près" les violentes émeutes qui secouent la petite ville du Missouri, après la mort d’un Noir américain abattu le 9 août par un policier blanc. "Nous suivons de près l’escalade des manifestations de Ferguson et les réactions qu’elles suscitent", a indiqué le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Badr Abdelatti.
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Le message égyptien - loin d'être un rappel à l’ordre "droit-de-l’hommiste" - ressemble fort à un pied de nez ironique à la Maison Blanche, qui avait utilisé le même langage diplomatique quand le Caire réprimait dans le sang les manifestations islamistes.
La gouvernance d'Abdel Fatah al-Sissi s'était fait remarquer à l'été 2013 par la sanglante répression menée contre les Frères musulmans : plus de 1 400 manifestants pro-Morsi avaient été tués en quelques mois, dont la moitié dans la seule journée du 14 août 2013 au Caire. Un massacre que l'association Human Rights Watch a récemment qualifié de "crimes contre l'humanité".
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Plus de 15 000 Frères musulmans et sympathisants ont également été emprisonnés en Égypte tandis que des centaines d’autres ont été condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs. La pique lancée à Washington est d’autant plus indécente qu’aucun protestataire de Ferguson n’a perdu la vie dans les manifestations directement liées à l'affaire.
"C'est la beauté de la liberté d'expression que nous chérissons tant"
La Maison Blanche a, sans surprise, assez mal reçu la leçon de morale égyptienne. "Quand nous avons des problèmes et des questions dans ce pays, nous nous y attelons avec honnêteté et franchise", a déclaré la porte-parole du département d'État Marie Harf. "Ici aux Etats-Unis […] nous faisons face à nos problèmes avec transparence, honnêteté et franchise, [comparé] à ce qui se fait dans n'importe quel autre pays du monde", s'est défendue la porte-parole américaine.
"Les gens sont libres de dire ce qu'ils veulent, c'est la liberté d'expression […] C'est la beauté de la liberté d'expression que nous chérissons tant aux États-Unis", a taclé Marie Harf. Et de conclure, caustique : "Cette même liberté d'expression, dont on ne peut pas dire qu'elle bénéficie du même type de respect en Égypte".
Depuis la répression en août 2013, les émissaires américains se succèdent dans le pays pour demander aux autorités égyptiennes de relâcher les dirigeants des Frères musulmans et l’ancien président islamiste Mohammed Morsi, toujours détenu dans un endroit tenu secret.