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Ferguson : Ron Johnson, le policier afro-américain érigé en héros

En rejoignant les premiers rangs d'une manifestation pacifique jeudi soir, le capitaine afro-américain Ron Johnson a su ramener le calme à Ferguson. Cette ville du Missouri était en proie à des émeutes depuis quatre jours.

"À cette heure-ci, lundi soir, les habitants craignaient pour leur vie. Ce soir, ils prennent des selfies avec les flics." Ce tweet, publié jeudi 14 août au soir par le journaliste Wesley Lowery, témoigne d'un véritable retournement de situation à Ferguson. Depuis le 10 août, cette petite ville de la banlieue de St. Louis, dans le Missouri, était le théâtre de violentes émeutes après la mort d'un jeune Afro-américain abattu par la police.

Mais il a suffi qu'il serre la main des manifestants pour qu'un policier noir devienne le nouveau héros de l'Amérique, ramenant le calme dans cette fille à majorité noire mais où la plupart des policiers locaux sont blancs. Moustachu, chauve, son arme de service en bandoulière sur sa chemise bleue, le capitaine Ron Johnson, chargé de prendre la relève des patrouilles locales aux méthodes controversées, a symboliquement rejoint les premiers rangs d'une manifestation pacifique jeudi soir, provoquant un changement radical d'atmosphère.

St. Louis Police Chief Sam Dotson taking a selfie with a protestor. This is a CHANGED atmosphere. #Ferguson pic.twitter.com/Jm51iZXdvz

— Yamiche Alcindor (@Yamiche) 15 Août 2014

"Une approche différente"

"Nous sommes tous là, ensemble (...) nous ne sommes pas là pour avoir peur, pour intimider", a déclaré ce responsable de la police de la route en multipliant les accolades, lui-même habitant de Ferguson. Ses propos ont été ensuite relayés et salués notamment par le journaliste Wesley Lowery, qui avait été arrêté sans ménagement mercredi soir par la police du comté, attisant les critiques contre la brutalité policière.

"Quand je vois une jeune femme pleurer parce qu'elle a peur d'un uniforme, c'est qu'il y a un problème. Nous devons le résoudre", a déclaré le capitaine de police, dont plusieurs collègues se sont aussi mêlés au défilé. Alors que, la veille encore, le face-à-face entre des forces de l'ordre lourdement armées et les manifestants était particulièrement tendu, Ron Johnson a plaidé pour "une approche différente" selon laquelle "nous sommes là tous ensemble". Le capitaine a précisé que les policiers ne porteraient plus de masques à gaz, ne bloqueraient pas les rues d'une ville que certains, y compris le gouverneur du Missouri Jay Nixon, avaient comparée à une "zone de guerre".

Diversité au sein de la police

Promettant "respect et honnêteté", Ron Johson espère bien "préserver ce qui est [sa] communauté". "Je marche ici (...) avec des gens avec lesquels je suis allé à l'école. Et il y a de la frustration chez moi aussi. J'ai un garçon de 21 ans et une fille de 23 ans. Et je dois répondre aux mêmes questions que tous les parents se posent ici", a témoigné le policier, âgé d'une cinquantaine d'années. Le capitaine de police a aussi appelé à une "véritable diversité" au sein de la police aux États-Unis. "Un département de police devrait refléter la communauté qu'il sert", a-t-il déclaré sur CNN.

Ron Johnson a grandi près de St. Louis. Diplômé en droit pénal, il a rejoint la police de la route - qui dépend de chaque État fédéré - en 1987, nous apprend le "St. Louis Post-Dispatch". Son beau-père, Charles McCrary, était lui aussi un des responsables de la police de St. Louis, avant se prendre sa retraite, selon le journal.

"Rebâtir la confiance"

"Ça veut dire beaucoup de choses personnellement pour moi, que nous brisions le cycle de la violence, que nous rebâtissions la confiance et nous montrions notre plus grand respect", a déclaré Ron Johnson lors d'une conférence de presse, ajoutant qu'il comprenait "la colère et la peur ressenties par les habitants de Ferguson".

La mort du jeune afro-américain, Michael Brown, a ravivé le spectre du racisme en Amérique, comme après la mort de Trayvon Martin, un jeune Noir abattu en 2012 par un vigile de quartier en Floride. Le vigile avait été acquitté après avoir plaidé la légitime défense.

Avec AFP