Le secrétaire d'État américain John Kerry, qui veut sauver la "légitimité de l'élection" présidentielle afghane, est Kaboul pour tenter une médiation entre Abdullah Abdullah et Ashraf Ghani. Les deux candidats se disputent la victoire.
Rapprocher les deux candidats à la présidentielle, Abdullah Abdullah et Ashraf Ghani, qui se disputent la victoire depuis le deuxième tour du 14 juin dernier. Tel est l'objectif du secrétaire d'État américain John Kerry, arrivé vendredi 11 juillet à Kaboul, qui veut sauver la "légitimité de l'élection".
Pour l'heure, la médiation semble porter ses fruits. Après sa rencontre avec John Kerry, Ashraf Ghani a semblé faire un pas en direction de son rival en se disant favorable à un audit maximal de la fraude. "Nous voulons que le processus électoral apparaisse intègre et légitime aux yeux du peuple afghan et du reste du monde. Et nous croyons pour cela en un audit le plus large possible afin de rétablir la confiance", a-t-il déclaré.
Le secrétaire d'État américain doit rencontrer dans l'après-midi le candidat Abdullah Abdullah, qui était favori du second tour après être arrivé largement en tête du premier (45% des voix contre 31,6% à Ghani). Il estime s'être fait voler l'élection par des fraudes massives en faveur de son rival, et a fait monter la tension cette semaine en se proclamant vainqueur.
Abdullah est favorable à un examen des soupçons de fraudes pour "séparer les votes honnêtes des votes frauduleux" dans un nombre de bureaux de vote plus important que les 1 930 (sur un total de 23 000) audités jusqu'ici par l'IEC. Il a évoqué un audit allant jusqu'à 11 000 bureaux de vote et son adversaire a donné son accord pour 7 100. Selon l'IEC, 8,1 millions de voix ont été enregistrées au deuxième tour, un chiffre plus élevé qu'au premier tour.
"Boucler la transition politique"
Le secrétaire d'État américain s'est également entretenu dans la matinée avec Jan Kubis, le chef de la mission de l'ONU en Afghanistan (Unama), qui a de son côté réaffirmé que l'ONU ferait son possible pour "finaliser et boucler la transition politique... dans le sens d'un renforcement de la stabilité et de l'unité du pays".
Le haut fonctionnaire américain doit également voir le président sortant Hamid Karzaï, seul homme à avoir dirigé le pays depuis la chute des talibans en 2001. Ce dernier est accusé par le camp Abdullah, avec la commission électorale indépendante (IEC), d'avoir manipulé l'élection au profit de Ghani.
La visite de John Kerry trahit la forte inquiétude des États-Unis sur le sort d'un régime qu'ils ont porté à bout de bras, à coup de milliards de dollars d'aide depuis 2001, et dont ils redoutent l'implosion. Washington a dit attendre un examen sérieux des soupçons de fraude afin de crédibiliser la première transition démocratique de l'histoire du pays. Et prévenu qu'il n'accepterait pas de mesures anticonstitutionnelles comme la formation d'un "gouvernement parallèle" par le perdant.
Ce dernier scénario pourrait mettre le feu aux poudres en réveillant les tensions communautaires (Abdullah est originaire du nord et Ghani du sud) dans un pays encore fragile et toujours en proie à une insurrection active des Taliban, le tout à quelques mois du départ des troupes de l'Otan.
Dans le même temps, Washington veut voir Kaboul signer rapidement un traité bilatéral de sécurité (BSA) prévoyant le maintien en Afghanistan de 9 800 soldats américains, contre 32 000 actuellement. Sauf que Hamid Karzaï a refusé de le parapher alors que Abdullah et Ghani ont promis de le faire s'ils étaient élus. Un enlisement de la crise électorale risque donc de retarder cette signature.
Avec AFP