logo

Tempête à l’UMP après la révélation d’un prêt octroyé par son groupe parlementaire

Engluée depuis plusieurs semaines dans l'affaire Bygmalion, l'UMP fait face à de nouvelles révélations. En 2012, le groupe parlementaire du parti lui a accordé un prêt de 3 millions d’euros sans en référer à ses députés.

Les affaires qui secouent l'UMP atteignent maintenant son groupe à l'Assemblée nationale, et son président Christian Jacob, avec la révélation d'un prêt de 3 millions d’euros accordé au parti en 2012 sans que les députés ne soient au courant.

Ce prêt, révélé samedi 21 juin par Mediapart et confirmé par le chef de file des députés UMP, avait été décidé par ce dernier pour contribuer au sauvetage financier du parti, après la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012. Si, comme le souligne Christian Jacob, ce versement n'a, en soi, rien d'illégal, il suscite de vives réactions parmi les élus UMP en raison des difficultés financières que connaît le parti, de la confidentialité de l'opération et du fait que le groupe vit pour une large part de la dotation allouée par l'Assemblée, autrement dit de fonds publics.

L'Assemblée nationale verse près de 10 millions d'euros par an à l'ensemble des groupes, dont quelque 3 millions d’euros pour l'UMP.

Soucieux de calmer les troupes avant la réunion hebdomadaire du groupe, mardi 24 juin, qui s’annonce tendue, Christian Jacob s'est engagé à y présenter les comptes. "En tant que parlementaire UMP qui apporte sa cotisation à son groupe régulièrement [200 euros par mois, NDLR], qui permet à son groupe de toucher une dotation de l'État, chaque année, en signant mon accord pour que cela puisse être fait, j'ai le droit de savoir pourquoi et dans quelles conditions cela s'est passé. Nous n'avons jamais été informés de cela et cela me choque, très clairement", a ainsi déclaré sur la Radio de la communauté juive (RCJ) le député-maire de Nice, Christian Estrosi.

Le député de Lozère Pierre Morel-A-l'Huissier, qui a déposé plainte avec son collègue Yves Blanc "au nom des militants" dans l'affaire Bygmalion, a crié pour sa part sa "colère" et son "écœurement". Une dizaine de ses collègues se sont associés à sa plainte et se réuniront mardi matin, avant la réunion du groupe, a-t-il annoncé à l'AFP.

"Trouble"

Pierre Morel-A-l'Huissier a aussi contesté les contrats passés par le groupe avec Bygmalion, pour 5,5 millions d'euros entre 2008 et 2013, selon "Le Canard Enchaîné". Pour lui, "s'il est avéré que Christian Jacob a utilisé des fonds pour autre chose que ce à quoi ils sont destinés, le fonctionnement du groupe, s'il a fait des bêtises, il doit partir". Et d’ajouter sur Twitter : "Je demande a Christian Jacob de justifier de l'utilisation des fonds du groupe mais en aucun cas sa démission car il m'a promis toute transparence."

D'autres membres du groupe se montrent moins sévères, même si beaucoup, à l'instar de Philippe Gosselin, ont parlé d'un "trouble". "Nous pensions jusqu'ici, peut-être naïvement, que le groupe était préservé de ce qui se passait dans le parti", a soupiré cet élu de la Manche.

Contrairement à Jean-François Copé, fragilisé dès le départ par les conditions contestées de son élection à la tête du parti en novembre 2012 contre François Fillon, Christian Jacob est un chef de groupe respecté par ses troupes, a souligné le député de la Drôme Hervé Mariton.

Les députés lui reconnaissaient le mérite d'avoir tout fait pour surmonter la crise de l'automne 2012, et plus récemment, après la démission de Jean-François Copé, dont il est pourtant proche, d'avoir pesé en faveur du triumvirat composé d'Alain Juppé, François Fillon et Jean-Pierre Raffarin qui assure la présidence par intérim de l'UMP.

Le secrétaire général intérimaire de l'UMP et député, Luc Chatel, a d'ailleurs estimé au Grand Rendez-vous Europe 1-Le Monde-iTélé que Christian Jacob avait agi, en décidant du prêt, "en solidarité" avec le parti, et "dans le cadre de ses responsabilités de président de groupe".

"On ne peut reprocher à Christian Jacob de n'avoir pas appliqué des règles qui n'existent pas, mais maintenant il faut des règles", a résumé Hervé Mariton, député de la Drôme qui sera candidat à la présidence de l'UMP lors du congrès de novembre. Ce membre de la commission des Finances a contesté cependant que le budget d'un groupe parlementaire soit de "l'argent public" : "Une fois qu'il a été donné, c'est de l'argent privé".

À cet égard, la volonté affichée du socialiste Claude Bartolone, président de l'Assemblée, de mettre fin à l'absence de contrôle sur la façon dont les groupes parlementaires utilisent leur dotation annuelle, a été plutôt bien accueillie. "Je suis favorable à tout ce qui peut permettre plus de transparence", a affirmé Luc Chatel. Hervé Mariton juge pour sa part "recevables" les idées de Claude Bartolone, car "actuellement, il n'y a pas de définition juridique claire de ce qu'est un groupe parlementaire".

Avec AFP