
Refus de nouvelles mosquées, annulation des commémorations pour l’abolition de l’esclavage, couvre-feu… Les onze maires frontistes élus lors des dernières municipales n’ont pas tardé à imprimer leur style dans les communes qu'ils dirigent.
Un mois après leur victoire aux élections municipales françaises, les 11 maires Front national (FN) ont pris leurs premières mesures et certaines ont déjà fait grand bruit.
À Béziers, dans l’Hérault, Robert Ménard avait promis des gestes forts. Ses électeurs ne seront pas déçus : un arrêté municipal publié lundi 28 avril impose désormais un couvre-feu pour les mineurs âgés de moins de 13 ans. Le texte précise que "tout mineur âgé de moins de 13 ans ne pourra, sans être accompagné d'une personne majeure, circuler de 23 heures à 6 heures", et ce du 15 juin au 15 septembre pour les vendredis, samedis et dimanches, ainsi qu’au cours des vacances scolaires.
Déculpabilisation
À Villers-Cotterêts, l’une des premières décisions de Franck Briffaut, finalement élu le 31 mai dernier après s’être présenté en vain à chaque élection depuis 1995, a été d’annuler les commémorations de l’abolition de l’esclavage, prévues le 10 mai. La ville, où mourut le général mulâtre Dumas (père d’Alexandre Dumas, auteur notamment de la "Reine Margot" et des "Trois Mousquetaires") né esclave à Saint-Domingue, organise cette cérémonie tous les ans depuis 2007.
Le nouveau maire de Villers-Cotterêts perçoit cette commémoration "comme étant un peu à la mode, dans le cadre d’une autoculpabilisation permanente, d’une culpabilisation systématique, alors que l’esclavage existe encore ailleurs dans le monde, malheureusement". Finie, donc, l’autoculpabilisation à Villers-Cotterêts. Sur ordre du maire, les hommages auront lieu ailleurs. À moins que le préfet du département n’entende l’appel des associations organisatrices et ne vienne contredire l’élu.
La LDH en ligne de mire
À Hénin-Beaumont, dans le Pas de Calais, le nouveau conseil municipal a aussi frappé fort quelques jours à peine après la victoire de Steeve Briois aux municipales. Parallèlement à sa décision de baisser de 10 % la taxe d’habitation, la mairie a mis un terme à la subvention de 300 euros annuels ainsi qu’à l’octroi gratuit d’un local pour la Ligue des droits de l’Homme (LDH) qui s’était clairement opposée au FN lors de la campagne. Selon le maire frontiste, il s’agissait d’avantages "illégaux" . " La Ligue des droits de l'Homme est une association politisée. Dès l'instant où elle s'immisce dans la vie municipale avec des a priori, on coupe les liens" , s’est justifié l’édile.
La LDH de Mantes-la-Ville, dans les Yvelines, pourrait également voir drastiquement baisser les subventions qui lui sont accordées par la mairie, au même titre que toutes les autres associations de la ville. Cyril Nauth, le maire de cette commune de la région parisienne, s’est également opposé à la construction d’une nouvelle salle de prière destinée aux musulmans, construction décidée en automne dernier par l’ancienne majorité socialiste de la ville. "Nous sommes hostiles à ce projet et nous dénonçons un coup politique de la part de l’ancienne mairie pour s’attirer le vote communautaire des musulmans", a-t-il expliqué.
Le drapeau européen disparait à Fréjus
Même chose à Fréjus, dans le Var, où lors de sa campagne, le maire David Rachline s’était fermement opposé à la construction d’une mosquée et avait un promis un référendum sur le sujet. Il se montre aujourd’hui plus mesuré en affirmant attendre la décision sur un recours en justice visant à annuler le permis de construire de celle-ci pour se prononcer sur cette salle de prière. Au-delà de la problématique religieuse, David Rachline a clairement placé la mairie sous son influence : il a fait ôter du fronton le drapeau européen qui côtoyait la bannière nationale depuis de nombreuses années.
Dans la plupart des 11 villes désormais gérées par le FN (à part à Beaucaire, dans le Gard), les maires ont décidé d’augmenter leurs indemnités de fonction, ainsi que celles de leurs adjoints. Une décision légale, mais fort controversée en période de difficultés budgétaires. Ces augmentations gardent le sens de la mesure, précise le maire de Luc, dans le Gard : "Les adjoints touchent quand même moins qu’un étranger venant prendre sa retraite en France, sans jamais y avoir travaillé".