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Google admet avoir mis de l’argent de côté pour le fisc français

Le géant américain a reconnu, vendredi, avoir reçu une “notification” du fisc français et avoir mis de côté de l’argent pour régler une éventuelle ardoise fiscale. C’est la première fois que Google évoque aussi clairement un redressement en France.

Google a enfin reconnu être l’objet d’une procédure fiscale en France. “En mars 2014, nous avons reçu une notification des autorités fiscales françaises”, affirme le géant du Net dans son document sur les résultats trimestriels remis à la Sec, le gendarme américain de la Bourse, relayé par le quotidien britannique "Financial Times", vendredi 25 avril.

C’est la première fois que le célèbre moteur de recherche admet être dans le collimateur du fisc français. En février dernier, le site du quotidien français “Le Point” affirmait que Paris avait réclamé un milliard d’euros au géant américain. D’autres sources évoquaient, de leur côté, plutôt 500 millions d’euros. Mais ni Bercy, ni Google, n’avaient confirmé ces montants.

Dorénavant le groupe américain se préparerait donc à devoir solder son ardoise fiscale en France, même si le terme précis de redressement est absent du document transmis à la SEC. Google précise, en effet, avoir mis de côté “une provision adéquate”, afin de couvrir tout compromis éventuel avec l’administration française. Mais “le fait de provisionner un risque ne signifie pas pour autant que Google reconnaît devoir de l’argent”, précise à FRANCE 24 Frédéric Naim, avocat fiscaliste parisien.

Le géant américain ne précise, en outre, pas le montant exact de cette provision. Il affirme toutefois, dans le document, avoir mis de côté ce trimestre 822 millions de dollars. Une somme censée couvrir d’éventuels surprises avec l’IRS (l’inspection américaine des impôts) et d’”autres autorités fiscales”, sans préciser si ces dernières sont toutes américaines ou s’étendent aux administrations fiscales d’autres pays, dont la France. Rien n’indique que l’argent ainsi provisionné fin mars prend déjà en compte la “notification” française reçue le même mois. Contacté par FRANCE 24, Google n’a pas commenté ce point. Reste que la provision a augmenté de 500 millions de dollars en un an.

Critiqué de toute part

Un accord entre Google et le fisc français mettrait un terme à plus de trois ans de procédure. Les locaux parisiens du géant américain avaient, ainsi, été perquisitionnés en 2011 dans le cadre d’une enquête sur les “prix de transfert”. Cette technique permet à des multinationales de soustraire une partie de ses bénéfices d’un territoire pour le déclarer dans un autre pays fiscalement plus clément. Google “domicilie” ainsi la quasi-totalité de ses revenus en Irlande, après un passage par les Pays-Bas. Cerise sur le gâteau de cette optimisation fiscale, les fonds sont ensuite transférés dans le paradis fiscal des Bermudes, où est située la filiale Google Holding.

Ce montage financier a été critiqué par plusieurs pays. En Grande-Bretagne, le Parlement avait même publié, en juin 2013, un rapport sur les prouesses fiscales de Google. Le gouvernement français s’est montré, à plusieurs reprises, ouvertement très sévère à l’égard de Google. À tel point que la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, avait refusé d’assister à l’inauguration, en décembre 2013, de l’Institut Culturel de Google à Paris pour protester contre les pratiques fiscales du géant américain.

Il faut dire qu’en France, le groupe américain n’a déclaré, en 2012, que 192,9 millions d’euros de chiffre d’affaires et des profits de 8,3 millions d’euros, ce qui lui a permis de ne payer qu’un impôt sur les bénéfices de 6,5 millions d’euros. Pourtant, d’après les estimations de plusieurs spécialistes, le chiffre d’affaires réel du groupe sur le sol français se situait entre 1,25 et 1,4 milliard d'euros en 2011.

D’autres géants américains du Net verront probablement d’un mauvais œil que Google solde son ardoise fiscale française. Le groupe dirigé par Larry Page est loin d’être le seul à intéresser le fisc français. Amazon, Apple ou encore Facebook sont également friands d’optimisation fiscale, au grand dam du Trésor français. Pour l'administration française, un accord avec Google pourrait devenir un précieux précédent.