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L'opposition et le gouvernement vénézuéliens tentent de trouver une issue pacifique aux violentes manifestations, qui ont fait 39 morts et plus de 600 blessés dans le pays.

C'est un dialogue inédit. Après plus de deux mois de protestations, le gouvernement du président Nicolas Maduro a entamé des pourparlers avec les principaux dirigeants de la coalition d'opposition de la Table de l'Unité démocratique (MUD), dont le candidat malheureux à la présidentielle, Henrique Capriles.

Arrachée par l'Union des nations sud-américaines (Unasur), cette démarche vise à mettre un terme à plus de deux mois de manifestations d'étudiants et d'opposants contre l'insécurité, la vie chère, l'inflation et la répression policière dans ce pays disposant des plus importantes réserves de pétrole au monde. 

Retransmis en direct sur toutes les télévisions et radios du pays, les échanges  se sont tenus en présence d'une délégation de trois ministres des Affaires étrangères de l'Unasur (Brésil, Colombie, Équateur) et du nonce apostolique au Venezuela.

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Pas un dialogue mais un "débat"

Comme de coutume dans ce pays extrêmement polarisé entre partisans et opposants au modèle "chaviste", les marques de défiance ont toutefois continué de fuser dans les deux camps tout au long de la journée.

"L'opposition ne voulait pas s'asseoir pour parler [...], il était important que l'opposition revienne sur le chemin démocratique et constitutionnel", a, par exemple, déclaré le président Maduro, qui n'a de cesse de fustiger les "fascistes" et les "putschistes".

Le député Julio Borges, du parti d'Henrique Capriles Primero Justicia, l'un des principaux de la MUD, a lui indiqué n'avoir "aucune confiance dans le gouvernement".

"Nous ne l'appelons pas dialogue, ce qui va se dérouler est un débat", a-t-il nuancé, estimant que "maintenant plus que jamais, les manifestations pacifiques et constitutionnelles sont nécessaires pour faire pression pour parvenir à un changement radical et démocratique".

"Un des facteurs qui a incité [le gouvernement] à entamer un dialogue à tout prix" est "probablement la pression internationale" due à "la mauvaise image croissante [des autorités] générée par la répression des manifestations", a estimé pour sa part à l'AFP le politologue John Magdaleno.

De nombreux opposants en prison

Promis depuis des semaines par les autorités, ce "dialogue" n'avait jamais pris forme, l'opposition refusant notamment de participer à "une farce" et "un monologue", tandis que Nicolas Maduro, faisant mine de tendre la main d'un côté, emprisonnait des opposants de l'autre.

Deux maires et le dirigeant du parti Voluntad Popular (droite), Leopoldo Lopez, accusés notamment d'attiser les violences, sont d'ailleurs détenus depuis plusieurs semaines. Le parti ne participe donc pas à cette rencontre.

"Nous ne croyons pas en un dialogue où le régime fait un show politique en se servant des ministres de l'Unasur comme interlocuteurs", avait prévenu, mardi 8 avril, Voluntad Popular.

Bien que la légitimité de l'Unasur a été remise en question par des membres de l'opposition radicale, qui lui reproche une trop grande proximité avec Caracas, le chef de la diplomatie chilienne Heraldo Muñoz a estimé au contraire ces derniers jours que "ce sont les amis extérieurs qui peuvent contribuer" à apaiser la situation dans "un pays frère".

39 morts et 600 blessés en deux mois de manifestations

L'issue de ce "dialogue" laisse toutefois "sceptique" l'analyste John Magdaleno, pour qui tout dépendra de l'agenda des discussions, sur lequel les parties peinent encore à s'accorder.

Caracas propose un plan de pacification et de développement économique du pays, l'opposition insiste, elle, sur une loi d'amnistie pour les manifestants poursuivis et le désarmement des "collectifs", des groupes de civils armés soupçonnés de proximité avec le "chavisme".

Les violences en marge des mobilisations ont fait officiellement 39 morts, la majorité par armes à feu, plus de 600 blessés et quasiment une centaine d'enquêtes ont été ouvertes contre des membres des forces de l'ordre soupçonnés d'atteintes au droit de l'Homme.

Avec AFP