Loi anti-gay, environnement, menace terroriste... Olympiades les plus chères de l’histoire, les Jeux d’hiver de Sotchi, qui débutent vendredi, font l’objet de nombreuses critiques. Mais le président Poutine entend bien en faire une vitrine politique.
À la veille de la cérémonie d’ouverture des Jeux d'hiver de Sotchi, les organisateurs mettent la dernière main aux préparatifs de ce rendez-vous sportif planétaire, qui réunira 18 jours durant plus de 2 500 athlètes issus d’une cinquantaine de nations. Pour faire pièce aux critiques concernant des retards accumulés dans la construction des infrastructures d’accueil, les autorités russes martèlent que le pays est fin "prêt" pour la compétition.
Le président Vladimir Poutine s’est rendu mercredi sur le site olympique afin de rappeler l’importance de l’événement. "La Russie a travaillé pendant sept ans jusqu'à maintenant, c'est un projet national", a-t-il déclaré lors d’une allocution publique. Grand amateur de sport, l’homme fort de Moscou a fait le tour des installations du pôle mer - l'un des trois villages olympiques, les deux autres étant dans le pôle montagne - guidé par la "tsarine" de la perche et ancienne championne olympique Elena Isinbayeva.
Vladimir Poutine "est très présent sur le terrain", rapporte Kesnia Bolchakova, envoyée spéciale de FRANCE 24 à Sotchi. "On l’a vu toutes ces dernières semaines sur les pistes de ski aux côtés d’athlètes russes. Hier, il est venu les encourager. ‘Nous comptons sur vous pour avoir de bons résultats’, leur a-t-il confié, paternaliste."
"Poutine est déterminé"
De fait, le président russe a conscience que les JO, l’un des événements sportifs les plus médiatisés, constitue une formidable vitrine politique. "Poutine est déterminé à prouver au monde entier que son pays est digne du Comité international olympique", affirme Kesnia Bolchakova.
Aussi ces Jeux de Sotchi sont-ils les plus chers de l'histoire olympique, avec des aménagements gigantesques s’élevant à 50 milliards de dollars (37 milliards d'euros). Mais ils restent aussi parmi les plus controversés. Mercredi, alors que la flamme olympique arrivait à Sotchi, l'ONG de défense LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels) All Out a organisé des manifestations dans 19 villes du monde (mais pas Sotchi), appelant les sponsors des JO à "sortir de leur silence sur les lois anti-gays russes".
Dans leur collimateur : une loi promulguée en juin par Vladimir Poutine qui punit d'amende et de prison la "propagande" de l'homosexualité devant les mineurs. De son côté, une ONG russe de défense de l'environnement a dénoncé les dégâts causés par les travaux à Sotchi ainsi que la nouvelle mise en détention d'un de ses militants écologistes.
Police et armée : "Ils sont partout"
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Mais la première "source d'inquiétude" pour le Kremlin demeure la menace terroriste. Située à quelques centaines de kilomètres des républiques instables du Caucase du Nord, où la Russie combat depuis des années une rébellion islamiste, la ville de Sotchi a été placée sous très haute surveillance. "Je n’ai jamais vu autant de policiers déployés dans une ville. Ils sont partout, constate Kesnia Bolchakova. Au total, il y a près de 100 000 hommes, police et armée confondues, à quoi il faut ajouter les membres du comité anti-terroriste russe. Les mesures de sécurité sont impressionnantes : système de radars anti-missiles, navires de guerre sur la mer Noire, sonars de détection sous-marine, et surveillance électronique totale. Tous les réseaux, téléphoniques et internet, sont sous contrôle et passés au crible par les services secrets. L’objectif est de rendre imperméable la cité olympique contre toute attaque terroriste."
De leurs côtés, les États-Unis ont mis en garde, mercredi, les compagnies aériennes affrétant des vols pour la Russie contre des individus susceptibles de cacher des explosifs à l'intérieur de tubes de dentifrice. Deux navires de guerre américains, une frégate et un navire de commandement, sont arrivés en mer Noire, a également annoncé la Marine américaine.
Autre signe que la menace terrorsite est prise au sérieux, les athlètes français sont quant à eux accompagnés des membres des forces spéciales de la gendarmerie et de la police françaises afin que leur sécurité soit assurée.
Début janvier, deux islamistes du Caucase russe ont menacé, dans une vidéo diffusée sur Internet, de commettre des attentats pendant les JO. "En ce qui concerne les Jeux olympiques, nous avons préparé un cadeau pour toi et pour les touristes, afin de venger le sang des musulmans répandu dans le monde entier", lançaient les deux hommes d'environ 25 ans à l’adresse de Vladimir Poutine. Apparaissant le visage découvert, le duo se présentait comme les auteurs des attentats-suicides de Volgograd, dans le sud de la Russie, qui avaient fait 34 morts fin décembre. Des menaces prises très au sérieux par le Kremlin.