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La ministre de l’Économie numérique Fleur Pellerin a déploré qu’un secteur aussi moderne que le Web puisse être en proie à un "sexisme insidieux". Pour Mounia Rkha, co-fondatrice de "Girls in Tech", le sexisme est un faux débat.
Le sexisme dans le numérique ? Une réalité d’après Fleur Pellerin. Ni plus ni moins qu’ailleurs, certes, mais la ministre de l’Économie numérique déplore, dans une interview accordée au “Journal du Dimanche”, un “sexisme insidieux” dans un secteur pourtant “associé à une forme de modernité dans sa façon de penser la société”.
En accord avec la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem, elle a d’ailleurs décidé de saisir le Conseil national du numérique afin de mener une mission pour travailler sur l’image des femmes dans le Web. L’organisme aura à explorer, d’ici mars 2014, les pistes possibles pour corriger le tir. Fleur Pellerin espère ainsi apporter sa contribution à un monde, où elle n’aurait plus à prendre la parole lors de colloques devant un public “quasi-exclusivement masculin”. “Cela devient un gag”, s’emporte-t-elle.
Mais tous les acteurs du Web ne sont pas sur la même longueur d’onde que la ministre. C’est le cas, par exemple, de Mounia Rkha, co-fondatrice de l’association “Girl in Tech” qui compte 15 000 membres dans le monde et environ 5 000 en France, responsable d'investissements chez Shibsted et co-créatrice de MyDeal.ma, premier site d’achat groupé au Maroc.
FRANCE 24 : Partagez-vous le constat de Fleur Pellerin sur le numérique où sévirait un “sexisme insidieux” ?
Mounia Rkha : Pas du tout. Je n’ai jamais eu à affronter de sexisme durant ma carrière dans cet univers, et les échos que j’ai par d’autres femmes dans le Web n’en font pas état. Le numérique est, à mon sens, comme n’importe quel autre secteur de l’économie à cet égard.
Je pense que le débat sur le sexisme dans les nouvelles technologies, qui était d’actualité il y a une vingtaine d’années, est aujourd’hui dépassé.
F 24 : Quand vous estimez qu’il n’y a pas plus de sexisme qu’ailleurs, Fleur Pellerin juge que le numérique devrait justement donner l’exemple…
M.R. : Sur ce point, en revanche, je rejoins totalement la ministre. Je pense aussi que c’est un secteur porteur de valeurs de modernité, qui devrait montrer l’exemple en terme de présence féminine à tous les niveaux.
Mais je ne crois pas qu’il s’agisse d’un problème de sexisme. C’est plutôt une question d’attractivité du secteur. Lorsque je faisais mes études de maths sup, maths spé et que je discutais avec des amies qui avaient fait d’autres choix, elles me disaient toutes que ce que je faisais n’était pas “sexy”.
F 24 : Vous voulez dire qu’aujourd’hui, le numérique est devenu “sexy” pour les femmes ?
M.R. : Certains clichés, comme celui de métiers techniques plus intéressants pour les hommes, ont la vie dure. Et il faut plutôt s’attaquer à démonter ces idées reçues plutôt que de parler de sexisme. Aujourd’hui, les métiers de l’Internet peuvent plaire à n’importe qui, quel que soit son sexe. Il faut montrer des exemples positifs de femmes qui réussissent dans ce secteur afin d’en attirer d’autres. C’est ce qu’on essaie de faire avec l’association "Girls in Tech".
Il faut également, comme le souligne Fleur Pellerin, agir au niveau de la formation. Je me souviens encore que je cherchais en vain ou presque du regard d’autres filles lorsque je faisais mes études d’ingénieur. Je ne sais pas si ça doit passer par de la discrimination positive ou autre chose, mais tout se joue au niveau de la formation.
F 24 : Vous qui financez et accompagnez des projets de start-up au sein de Schibsted, voyez-vous de plus en plus de femmes créatrices d’entreprise dans le numérique ?
M.R. : Sans conteste. Mais il ne faut pas non plus se leurrer, elles restent très minoritaires. Cela étant, comme elles sont encore très peu à se lancer dans l’aventure, les femmes qui montent leur entreprise sont souvent très brillantes et se battent beaucoup plus pour y arriver. Du coup, j’ai constaté que le fait d’être une femme est plutôt un atout dans ce secteur.