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Premier smartphone de conception russe, le YotaPhone offre un design unique au monde avec son double écran tactile au recto et sa liseuse au verso, lisible même lorsque l'appareil est en veille, tout en préservant la batterie.

Il ambitionne de révolutionner le marché du smartphone. L’entrepreneur russe Vlad Martynov a présenté, mercredi 4 décembre à Moscou, le YotaPhone, tout premier smartphone réversible, doté d’un double écran. Le but affiché : "repenser notre relation au smartphone", clame, depuis la scène d'un centre d'art contemporain moscovite, Vlad Martynov, simplement affublé d'un Jeans à la manière décontractée d'un certain Steve Jobs.
 

Vidéo : présentation du YotaPhone (en anglais)

D’un côté, une surface tactile classique. De l’autre, une liseuse à l’encre électronique. Tout l’intérêt de ce second écran non lumineux qui ne fatigue pas les yeux est qu’il reste allumé, même lorsque le téléphone est en veille, tout en consommant très peu de batterie.

Que ce soit pour consulter ses emails, son agenda, la météo ou pour écouter de la musique, les utilisateurs de smartphone réactivent leur appareil plus de 150 fois par jour en moyenne, selon les estimations des équipes de Vlad Martynov. Un geste particulièrement gourmand en énergie mais aussi en attention. Avec le YotaPhone, l’utilisateur peut désormais choisir de placer ce qu’il souhaite sur la face arrière de son téléphone : l’heure, un plan de quartier, les rendez-vous du jour ou même les flux d’information en provenance de Facebook et Twitter.

COMMENT LE YOTAPHONE A-T-IL ÉTÉ FINANCÉ ?

Peu de détails ont filtré sur le financement du YotaPhone. Société privée de télécommunications russe, Yota Devices, créatrice du smartphone éponyme, a vendu, entre 2009 et 2012, trois millions d’exemplaires de ses routeurs et modem 4G, soit 6 % de parts de marché à l’échelle mondiale. Autant de bénéfices auxquels s’ajoute la vente de son réseau 4G, il y a peu, au grand opérateur russe MegaFon.

En outre, Woodenfish, un fonds d’investissement russe qui détient la quasi totalité du capital, a également investi une somme probablement importante dans le projet YotaPhone mais le montant n’a pas été révélé. “C’est beaucoup moins que les grands du smartphone”, s’est contenté de commenter Vlad Martynov.

Pour le reste, le YotaPhone, qui tourne sous Android, rentre un peu plus dans la norme du marché en proposant un design soigné, un bon processeur, un appareil photo de 13 mégapixels et la 4G pour 499 euros. Pour l’instant, le produit semble plutôt bien accueilli par la poignée de spécialistes qui ont pu le tester, à l’instar de Sophie Curtis, journaliste high tech pour le quotidien britannique "The Telegraph". “Il va sûrement falloir du temps avant qu’un vaste choix d’applications spécialement conçues pour profiter du double écran soient développées”, explique-t-elle, ajoutant qu’un partenariat avec le Kindle d’Amazon serait, par exemple, le bienvenu. “Les concepteurs vont également devoir améliorer le contrôle de l’écran tactile mais en terme d’innovation, ce nouvel appareil récolte tous les suffrages”, estime la journaliste.

Pas de lancement en Asie, ni aux États-Unis

Après deux ans et demi de développement, le YotaPhone, conçu en Russie mais assemblé essentiellement en Chine, est d’ores et déjà disponible en boutique en Russie et en Allemagne, et en ligne dans trois autres pays européens, la France, l’Espagne et l’Autriche.

Dès le mois de janvier, cinq autres pays d'Europe (dont le Royaume-Uni) et du Proche-Orient l’auront à disposition. Puis au cours du premier trimestre, ce sera au tour de neuf autres pays, parmi lesquels la Suisse ou encore l'Égypte. En revanche, aucun lancement n’est, pour le moment, envisagé sur les marchés cruciaux que représentent l’Asie ou les États-Unis.

Malgré un important vivier d'ingénieurs et d'informaticiens très qualifiés, la Russie peine à percer en dehors des frontières de l’ex-URSS dans le domaine du Web. Le défi est donc de taille pour Yota, à l’heure où le dernier vétéran européen, Nokia, a été cédé, il y a à peine deux mois, à l’Américain Microsoft. Avec son smartphone au design unique (une trentaine de brevets ont été déposés), Vlad Martynov semble croire que l’originalité fera la différence.

Un argument un peu léger pour certains, qui jugent que les investissements trop flous et le faible arsenal publicitaire mis en œuvre en l’état par les créateurs du YotaPhone risquent peu ou prou de faire trembler les leaders du marché. “La capacité de Yota à percer parmi les mastodontes Apple, Samsung, LG, etc, reste à prouver. Nokia s’est vendu aux Américains précisément car il n’avait plus les moyens de rester dans la course au marketing à l’échelle globale”, écrit notamment le journal “Les Échos”. En somme, vouloir jouer dans la cour des grands a un prix que Yota n’est peut-être pas tout à fait en mesure de payer aujourd’hui.