Cinq jours après l'arrestation de deux figures de proue de la contestation en Égypte, accusés de s'être rassemblés "illégalement", la justice a ordonné la libération de l'un d'entre eux. Le second en revanche reste en détention.
Alors que manifester est devenu une activité à risque en Égypte, la justice a ordonné, dimanche 1er décembre, la libération d’un militant, Ahmed Maher, figure du mouvement laïc du 6-Avril, arrêté pour avoir manifesté "illégalement", c’est-à-dire sans autorisation, mardi 26 novembre.
En revanche, un autre militant, le blogueur Alaa Abdel Fattah, arrêté pour les mêmes raisons et accusé d’avoir "provoqué une émeute" et "frappé un officier" a vu sa détention prolongée de quinze jours. Ce militant, déjà inquiété sous l’ère Moubarak, restera en cellule "pour les besoin de l’enquête".
Ce jour-là, le 26 novembre, une soixantaine de manifestants avaient été arrêtés, dont une quinzaine de militantes parmi les plus connues du pays. Elles avaient ensuite été relâchées sur une route désertique hors du Caire au beau milieu de la nuit.
Les effets de la nouvelle loi interdisant les manifestations non-autorisées au préalable se sont donc fait sentir. Elle oblige désormais à informer les autorités trois jours avant la tenue d'un rassemblement. Celui-ci doit ensuite être autorisé par le ministère de l'Intérieur s'il ne représente pas de "menace pour la sécurité". En cas de violences, la police peut avoir recours à une "utilisation graduée de la force".
Recul du respect des libertés
Cette nouvelle loi est dénoncée par les organisations de défense des droits de l’Homme comme un recul en matière de respect des libertés publiques par rapport aux acquis de la "révolution du Nil" de 2011.
"Si les révolutionnaires ont fait confiance à l’armée, cette confiance est en train de se briser. Un certain nombre d’activistes estiment que les militaires sont en train de prendre le dessus sur le gouvernement et qu’ils ont d’autres visées que d’assurer la transition", rapporte Pierrick Leurent, correspondant de FRANCE 24 au Caire.
Ahmed Maher a déclaré mardi à l'AFP que "cette loi devait être abrogée". "Le ministère de l'Intérieur veut en finir avec les manifestations", a-t-il lancé, en rappelant que "même sous Moubarak, des manifestations avaient lieu".
Amnesty International a estimé que la loi était "un grave retour en arrière" qui "donne carte blanche aux forces de sécurité pour utiliser une force excessive, notamment létale, contre les manifestants". De son côté, le parti islamiste Liberté et Justice (PLJ) de Mohamed Morsi a condamné cette loi qui, "au lieu d'arrêter les pratiques répressives et meurtrières des forces de sécurité issues du coup d'État, encourage les abus".
Des militants ont appelé à de nouvelles manifestations mercredi en fin d'après-midi dans le centre du Caire. "Reste à savoir si les manifestants bénéficient du soutien populaire parce qu’au Caire, les gens souhaitent que le calme revienne", estime néanmoins Pierrick Leurent.
Avec dépêches (AFP et REUTERS)