Les dirigeants européens sont réunis à Paris pour la seconde conférence contre le chômage des jeunes. Six milliards d’euros doivent être répartis pour aider les pays les plus en difficultés, mais sur le terrain, les doutes persistent.
Pas de nouvelle réforme en vue. Six mois après un premier rendez-vous à Berlin, les dirigeants européens se sont à nouveau retrouvés mardi 12 novembre, cette fois-ci à Paris, pour la seconde édition de la conférence contre le chômage des jeunes. Le but affiché : "s'assurer que tous les moyens sont mis en œuvre [...] pour obtenir des résultats concrets dans les deux ans qui viennent", a indiqué l'Élysée. En d’autres termes, il s’agit de faire en sorte que les régions du Vieux Continent les plus frappées par le chômage des jeunes fassent bon usage des fonds soulevés par Bruxelles.
Au total, quelque 6 milliards d’euros leur sont destinés. En tête des bénéficiaires : la Grèce qui compte 57,3% de chômeurs chez les jeunes de moins de 25 ans, suivie par l’Espagne (56,5%) et la Croatie (52,8%). La France n’est pas non plus en reste avec 26,1% alors que la moyenne européenne est de 23,5%, soit 5,6 millions de personnes. Les bons élèves sont l’Autriche avec 8,7% et bien sûr l’Allemagne, dont le taux de chômage des jeunes a été divisé par deux depuis 2005, tombant à 7,7 % selon les chiffres de septembre 2013 (chiffres Eurostat).
“On n’attend rien de ce genre de réunion à Bruxelles”
La France espère toucher 10% de l’enveloppe débloquée par Bruxelles, soit 600 millions d’euros auxquels s’ajoutent 100 millions déjà attribués lors du dernier Conseil européen. De quoi poursuivre les actions entamées par le gouvernement comme les contrats d’avenir ou plus récemment "la garantie jeunes", fraîchement mise en place dans dix départements pilotes.
Mais sur le terrain justement, cette grand'messe des dirigeants européens suscite peu d’entrain. “Cette réunion, on n’en attend rien”, confie à FRANCE 24 Véronique Ramirez, directrice générale de la mission locale des Pyrénées-Orientales. “Malgré tout, grâce aux chiffres allemands ou autrichiens, on garde espoir et on continue de motiver nos jeunes, mais la plupart n’ont pas d’ambition car ils ne croient plus en l’avenir…”, déplore-t-elle.
Si les milliards promis par Bruxelles ne la font pas rêver, Véronique Ramirez espère simplement que les 28 se mettront d’accord sur une politique et des méthodes communes pour tous les jeunes européens. Selon elle, les mesures plus ou moins attractives prises d’un pays à l’autre provoquent souvent un afflux de jeunes à la recherche d’un eldorado qu’ils ne trouvent pas. “Il ne faut pas déplacer le problème mais le traiter de façon égalitaire à travers toute l’Europe”, ajoute-t-elle. À Perpignan, où se situe le siège social du réseau de missions locales des Pyrénées-Orientales, Véronique Ramirez gère déjà un afflux croissant de jeunes espagnols et portugais ayant choisi de traverser la frontière. “Mais depuis environ trois ans, explique la directrice, on voit également de plus en plus de jeunes en situation précaire, arriver depuis les pays de l’Est.”
L’urgence ne porte pas sur “la prochaine génération”
Reste que les 6 milliards censés débloquer la situation ne sont toujours pas disponibles car les lignes budgétaires n'ont pas encore été adoptées. Les États doivent également fournir un état des lieux précis de leur situation mais, selon Bruxelles, peu sont ceux qui jouent le jeu et les coordinateurs nommés dans chaque pays n’ont pas, pour l’heure, obtenu assez d’informations.
Pour certains, donc, les grandes instances bruxelloises, de par leur lourdeur, ne seront pas assez promptes à répondre au fléau. Ancien collaborateur de Dominique De Villepin et fondateur du club “5 ans pour des idées”, Julien Miro, qui ne veut pas attendre après les 28, milite pour des mesures immédiates, et une en particulier : le smic jeune destiné aux 18-25 ans. Le concept ? Accepter une rémunération amputée (80 % du smic) contre un contrat de deux ans dans une entreprise. “C’est bien de travailler à l’échelle européenne pour préserver la prochaine génération, leur créer de l’emploi et améliorer l’éducation, mais l’urgence est de s’occuper de ceux qui, actuellement, à 18 ou 20 ans n’ont aucune qualification, pas de travail et aucun projet d’avenir”, explique-t-il à FRANCE 24. Et de poursuivre : “les temps changent. Si en 2006, par exemple, les jeunes ont rejeté en masse le contrat première embauche, depuis, leur tolérance a évolué en fonction de la conjoncture, aujourd’hui ils sont prêts à des sacrifices pour travailler”, assure-t-il, craignant de voir cette fameuse génération Y devenir celle des sacrifiés.
Un troisième sommet européen contre le chômage des moins de 25 ans doit être organisé prochainement en Grèce ou en Italie. Reste à savoir si une fois l’échéance des élections européennes de 2014 passée, l’attrait pour la cause des jeunes demeurera aussi vif.