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L'entrepreneur italien Giovanni Montresor n’a déclaré que 13 euros au fisc au cours des 17 dernières années. Après deux ans d’enquête, la police italienne a mis une partie des biens de ce multimillionnaire sous séquestre.

S’il n’est pas le champion toute catégorie de l’optimisation fiscale, il a fait en tout cas tous les efforts pour le devenir. La police financière italienne a annoncé, jeudi 7 novembre, avoir mis sous séquestre plus de 300 millions d’euros de biens de Giovanni Montresor. Les autorités se demandent comment, avec une telle fortune, cet habitant de la ville de Vérone a pu ne rien déclarer au fisc entre 1996 et 2008, et seulement 13 euros entre 2009 et 2011.

“Giovanni Montresor et sa femme avaient de toute évidence un niveau de vie très différent de ce qu'ils déclaraient comme revenus", s’est borné à constater Francesco De Giacomo, un officier de police chargé de l’affaire. Les biens saisis par la justice comprennent, entre autres, 9 entreprises, 235 hectares de terrains dans le nord de l’Italie, 18 immeubles et 7 véhicules. Le fisc attend de ce multimillionnaire non-imposable qu'il prouve la légalité de ce patrimoine, sous peine de le faire basculer dans les caisses de l’État.

Aucun des ces biens n’est, en effet, au nom de Giovanni Montresor. Certains sont inscrits à l’actif de sociétés off-shore ou en Italie et d’autres appartiennent légalement à des membres de sa famille. À Giovanni Montresor de prouver qu’il n’en est pas le réel propriétaire.

Les autorités italiennes, quant à elles, espèrent bien mettre enfin un terme à un jeu du chat et de la souris qui dure depuis des années avec ce roi supposé de la magouille fiscale. “À Venise, Vérone, Trévise ou en Europe de l’Est, il est connu comme l’un des plus riches propriétaires terriens, toujours prêt à payer ses affaires grâce à ses liasses de billets”, racontait déjà en 2011 le quotidien italien "Espresso".

Un gratte-ciel rose pour un petit village de campagne

C’est à cette époque que Rome a décidé de lancer une enquête pour y voir plus clair dans les pratiques fiscales de cet entrepreneur. Un intérêt du fisc d’autant plus justifié, qu’avant de déclarer des montants ridiculement bas aux impôts, Giovanni Montresor avait fait encore plus fort. Entre 1996 et 2008, il n’a rien déclaré du tout.

Interrogé par l’"Espresso", ce chef d'entreprise - qui aime à se dépeindre en autodidacte qui a modestement commencé par travailler dans l’abattoir de son père avant de se lancer dans l’immobilier - justifiait, en 2011, cette extrême frugalité fiscale par le fait qu’il s’agit “d’argent que je prête et qu’on me rembourse ou des mouvements de capitaux d’une de mes entreprises vers une autre, ce qui n’est pas un revenu”. Pour ces détracteurs, Giovanni Montresor a, surtout, mis en place un empire de sociétés écrans. “Il a commencé par créer des structures au Royaume-Uni, puis à Madère et enfin au Luxembourg”, rappelle l’"Espresso".

Avant d’attirer l’intérêt du fisc, Giovanni Montresor avait déjà eu maille à partir avec la justice italienne dans le cadre des grands procès pour corruption au début des années 90. Il avait alors été inculpé pour avoir détourné l’argent public prévu pour l’organisation de la Coupe du monde de football de 1990. Cet entrepreneur avait été accusé d’avoir obtenu, à coups de dessous de table, l'appui de politiciens locaux pour obtenir plusieurs milliards de lires italiennes pour construire un gigantesque gratte-ciel rose abritant un hôtel dominant la petite ville de Bussolengo, dans la région de Vérone.

Il avait finalement bénéficié d’une amnistie. Mais auparavant, Giovanni Montresor avait fourni aux enquêteurs des informations provoquant des aveux en cascade de politiciens locaux ayant bénéficié des largesses du multimillionnaire. Cette fois-ci, le riche italien risque de perdre bien plus qu'une simple tour rose.