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Présidentielle en Algérie : Yasmina Khadra se jette dans la "mare aux piranhas"

L'écrivain Yasmina Khadra a annoncé samedi 2 novembre qu'il était candidat à l'élection présidentielle algérienne de 2014. Aider le pays à "changer" et à "trouver un nouveau souffle" est, selon lui, une mission plus grande que la littérature.

L'activiste Rachid Nekkaz dans la course

Sept candidats se sont déjà déclarés pour la présidentielle algérienne de 2014, dont l’homme d’affaires et activiste Rachid Nekkaz.

Après avoir fait fortune dans la création de sites Internet, ce millionnaire a présenté sa candidature aux élections présidentielles françaises de 2007 et 2012.  

Condamné à une peine de prison pour corruption après l’achat de  parrainages pour la présidentielle de 2012 – il entendait, selon lui, prouver la fragilité du système électoral français – il a rendu sa nationalité française en octobre.
Pour la présidentielle algérienne, il s’est auto-proclamé "Candidat de la Jeunesse et du Changement".

"Avant d’être un homme de lettres, je suis un Algérien inquiet pour mon pays", confie Yasmina Khadra dans une interview à france24.com. Le romancier à succès a annoncé, le 2 novembre, qu’il était candidat à l’élection présidentielle algérienne de 2014, quitte à mettre entre parenthèse pour quelques années son activité littéraire.

"J’ai attendu avec beaucoup de patience qu’un Algérien honnête, crédible se présente. Mais ce n’est jamais arrivé, alors j’ai décidé d’y aller moi-même", poursuit le romancier qui dit avoir mûri ce projet depuis de nombreuses années.
Né dans le Sahara algérien en 1955, Yasmina Khadra, actuel directeur du centre culturel algérien à Paris (CCA), est le lauréat de plusieurs prix internationaux pour ses romans. Si on ne l’attendait pas dans l’arène politique, ce n’est pourtant pas la première fois qu’il change de voie : Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohammed Moulessehoul, est venu à la littérature après 36 ans dans l’armée algérienne. En 2001, il s’installe dans le sud de la France, avec sa femme et ses trois enfants, mais il dit ne s’être jamais éloigné de son pays.  "Je porte mon pays en bandoulière",assure-t-il.
L’Algérie doit réapprendre à rêver
Interrogé par france24.com sur son programme électoral, M. Khadra affirme qu’il "existe" bien mais qu’il préfère le "garder ficelé pour le moment". Sans entrer dans le détail, il déclare : "Je veux que les choses changent en Algérie. Ce pays a besoin d’un nouveau souffle. Il doit apprendre à rêver et avoir de l’ambition. J’ai décidé d’aller à sa rencontre pour l’aider à accéder à ses aspirations". Des ambitions que, selon l'auteur, le pays nourrissait au moment de l’indépendance de l’Algérie, en 1962.  
"Les Algériens aspirent à vivre dignement et librement dans leur pays, avec un projet de société enthousiasmant.  Je veux aider l’Algérie à se défaire de ses chaînes, c’est aussi simple que ça. Il faut bien que quelqu’un le fasse", résume-t-il avec l’assurance déconcertante de ceux qui se sentent investi d’une mission.
L'écrivain estime que l’Algérie a besoin de changement, à commencer par ses élites donc. L'actuel président algérien, Abdelaziz Bouteflika, achèvera en avril 2014 son troisième mandat. Le chef de l'État, 76 ans, 14 ans de pouvoir et plus de 50 ans dans ses coulisses – il a exercé son premier ministère en 1962, dans le premier gouvernement de Ahmed Ben Bella -  n'a pas encore révélé s'il envisageait un quatrième mandat.
"Il y a des choses plus importantes que la littérature"
Pour poursuivre son projet, Yasmina Khadra se dit prêt à mettre momentanément entre parenthèse sa carrière littéraire.  
"Il y a des choses plus importantes que la littérature. Des gens sont morts pour ce pays, le servir est primordial", martèle-t-il, en insistant avec véhémence sur le sérieux de sa motivation : "Vous croyez qu’on peut quitter un confort pour se jeter dans la mare aux piranhas sans réelle motivation !"
Yasmina Khadra, qui a exclu tout éventuel parrainage d'un parti politique, se dit confiant pour récolter les signatures."J’ai déjà 13 bureaux ouverts dans différentes wilayas (préfectures) depuis hier (dimanche)", explique-t-il. La loi électorale exige des candidats indépendants de récolter au moins 60 000 signatures d’électeurs qui doivent être recueillies dans au moins 25 wilayas disticntes. Mille cinq cent signatures sont exigées, au minimum, dans chacune des wilayas
Le potentiel candidat a également assuré avoir ouvert un bureau national dimanche 2 novembre et avoir déjà "des milliers" de partisans. "À chaque fois que je me produis en Algérie, les gens viennent en masse". Reste à savoir si les électeurs seront aussi nombreux que ses lecteurs.