
Malgré l'engagement d'Obama d'encadrer l'usage des drones au Yémen et au Pakistan, des ONG dénoncent régulièrement les "assassinats extra-juridiques" commis par ces engins. Revue des pertes humaines occasionnées depuis 2002 par cette guerre secrète.
Les frappes militaires que les États-Unis opèrent depuis plus d’une décennie en territoire yéménite et pakistanais dans le cadre de la lutte contre le terrorisme constituent l’un des aspects les plus opaques de la politique extérieure menée par l’administration Obama. Régulièrement épinglé par des groupes de défense des droits de l’Homme qui déplorent le manque de transparence et de cadre juridique de cette guerre secrète, Washington rechigne pourtant à délivrer des informations précises sur ces attaques perpétrées, dans la grande majorité des cas, par des aéronefs sans pilote, plus connus sous le nom de "drone".
En mai dernier, le président Barack Obama avait toutefois indiqué que l’usage de ces engins controversés était "sévèrement encadré". Selon le président américain, les attaques ne doivent intervenir qu’en cas de menace imminente et seulement si le suspect ne peut être capturé d’une autre manière. "Les États-Unis n'ont pas recours à des frappes lorsque nous avons la possibilité de capturer des terroristes. Notre préférence est toujours de les capturer, de les interroger et de les poursuivre en justice", avait précisé le chef de l’État.
"Un droit de tuer"
Des précautions qui, à en croire Human Rights Watch et Amnesty International, sont loin d’être respectées. Le 22 octobre, les organisations ont respectivement publié un rapport dans lequel elles dénoncent les violations aux droits humains commises par les drones au Yémen et au Nord-Waziristan, zone tribale du nord-ouest pakistanais où sévissent plusieurs groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda. "Le secret entourant le programme des drones donne au gouvernement américain un droit de tuer supérieur aux tribunaux et aux normes fondamentales du droit international", affirme Mustafa Qadri, analyste pour Amnesty International au Pakistan.
De fait, seuls des initiatives citoyennes ainsi que le travail d’ONG et de certains titres de la presse américaine permettent d’y voir un peu plus clair sur l’ampleur de cette guerre qui ne dit pas son nom (voir infographies ci-dessous).
Ainsi selon des données collectées par le think tank New America Foundation, basé à Washington, et le Bureau of Investigative Journalism, à Londres, les États-Unis ont mené, depuis 2002, 365 frappes aériennes au Pakistan, principalement dans le nord-ouest, et 92 au Yémen. Au Pakistan, les attaques de drones auraient fait entre 2 000 et 3 400 morts, dont près de 300 civils. Au Yémen, le nombre de tués se situe entre 680 et 880, dont une soixantaine de civils.
Si le nombre d’attaques de drones tend à diminuer depuis 2010 au Pakistan et 2012 au Yémen, le plus gros des frappes aériennes a été mené sous le mandat de Barack Obama. Depuis son arrivée à la Maison Blanche, les États-Unis ont effectué 407 raids aériens dans les deux pays, soit près de 90 % des interventions armées répertoriées par les ONG depuis 2002. La dernière frappe répertoriée au Yémen remonte au 30 août, et au 30 septembre au Pakistan.