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"Autour de Damas, c'est la désolation et la destruction qui règnent"

De retour de Syrie, après une série de reportages, le grand reporter à FRANCE 24 Noreddine Bezziou revient sur la situation qui règne à Damas et la vie quotidienne de sa population.

De retour de Damas, après une série de reportages, Noreddine Bezziou, grand reporter à FRANCE 24, revient sur la situation dans la capitale d’un pays déchiré par une crise politique et une guerre sanglante depuis mars 2011.

F24 : Comment s’est déroulé votre trajet depuis la frontière libanaise jusqu’à la capitale syrienne ?
Noreddine Bezziou : Après 12 jours d’attente à Beyrouth, nous sommes parvenus à obtenir l’autorisation de pénétrer sur le territoire syrien. Le régime était en train de s’ouvrir aux médias, dans le cadre d’une stratégique de communication, une dizaine de jours après que la menace de frappes occidentales se soit éloignée. Une fois en Syrie, la route jusqu’à Damas est vide, quasiment personne ne circule. Six ou sept barrages de l’armée séparent la frontière de la capitale syrienne située à un peu moins d’une heure de voiture. Dès que vous pénétrez dans Damas, les tirs ou les explosions d’obus entendus, notamment une fois la nuit tombée, viennent vous rappeler que le pays est en guerre. À la périphérie de la ville, par contre, il y a des combats entre les forces du régime et les rebelles. Dès que vous sortez, ne serait-ce qu’à deux kilomètres autour de la capitale, c’est la désolation et la destruction qui règnent. Damas est entourée de villes fantômes, qui portent les stigmates impressionnantes de la guerre. Certaines d’entre elles, totalement désertées par les civils, sont contrôlées par la rébellion.
F24 : Quelle est la situation sécuritaire à Damas ?
N. B. : Le centre de la capitale est extrêmement sécurisé, il est quadrillé par un important dispositif de sécurité composé d’une multitude de barrages, tenus soit par l’armée, comme la 4e division blindée commandée par Maher al-Assad, le frère du président syrien, soit par des milices pro-régime habillés en civil ou encore des agents du service de renseignement. Chaque véhicule est minutieusement contrôlé. Par ailleurs, les rues qui mènent vers les ministères régaliens, comme celui de la Défense, sont bouclées par crainte d’attentats à la voiture piégée. Tout est organisé de façon à ce qu’aucune voiture ne puisse y accéder sans être dûment contrôlée à un barrage. C’est littéralement impossible. Ce qui est frappant, c’est le calme qui règne dans le cœur de la ville, qui tranche avec le reste du pays, où tout est en ruines.
F24 : Quelle est l’ambiance générale et comment la population vit-elle l’état de guerre ?
N. B. : Après 22 heures, les rues sont vides, à quelques rares exceptions près. Un comble pour une ville qui était réputée pour vivre 24 heures sur 24. La journée, tout paraît normal, les gens vaquent à leurs occupations quotidiennes. Le cœur de Damas est bien ravitaillé, dans le sens où les supermarchés ne manquent de rien, et qu’il n’y pas de pénurie d’essence. Toutefois, on ressent une forte tension malgré les apparences de normalité, notamment lorsque des tirs ou des explosions retentissent. Les Damascènes ne semblent pas s’être habitués à la guerre. Quand vous discutez avec les gens dans la rue, ils vous disent que tout va bien, plus par méfiance que par conviction. En insistant un peu, ils acceptent de se confier un peu plus, et vous dévoilent leur inquiétude quant à l’avenir du pays, et leur crainte de voir le conflit s’éterniser pendant de longues années.