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Espagne : trois Femen s'invitent à l'Assemblée pour défendre le droit à l'IVG

Trois Femen espagnoles, dont Lara Alcazar, la leader du mouvement dans le pays, ont perturbé une séance parlementaire pour défendre le droit à l’avortement menacé par une nouvelle législation particulièrement restrictive.

Du haut du balcon de l’Assemblée nationale espagnole, elles ont hurlé leur opposition au projet de réforme de l’avortement discuté ce mercredi 9 octobre. Accrochées à la balustrade, trois Femen espagnoles ont perturbé pendant quelques minutes la séance parlementaire sous les regards mi-offusqués mi-interrogateurs des députés présents.

Seins nus et poing levé, les trois jeunes femmes ont coupé la parole au ministre conservateur de la Justice, Alberto Ruiz-Gallardon, fer de lance d’un projet de réforme de l’IVG. "L’avortement est sacré", ont-elles scandé pendant que le service d’ordre peinait à les atteindre pour les expulser. Parmi elles, se trouvait Lara Alcazar, l’actuelle leader des Femen espagnoles qui a revendiqué cette action sur le compte Twitter de l'organisation.

La raison de leur courroux : le projet du ministre de la Justice qui souhaite revenir sur l'actuelle loi sur l'avortement, entrée en vigueur en 2010 sous le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero – et qui permet d'avorter librement jusqu'à la quatorzième semaine de gestation.

Mais Gallardon ne souhaite pas s'arrêter là. Le ministre de la Justice défend en effet l’idée de criminaliser à nouveau l'avortement, même dans les cas les plus tragiques, comme la malformation fœtale. "Le handicap ne peut pas conduire à un traitement inégal et à une réduction des droits. Or cette non-discrimination doit s'appliquer aussi aux conçus et non-nés", avait-il déclaré dans la presse le 28 avril.

Retour à l’âge franquiste

Cette nouvelle loi serait même plus restrictive encore que celle de 1985 - qui dépénalisa l'avortement -  et qui autorisait les interruptions volontaires de grossesse en cas de malformations de fœtus ou de viol. C’est un retour à l’âge franquiste, "à l’époque où les femmes n’avaient aucun droit sur leur corps", s’est inquiétée la socialiste Carmen Martinez Ten.

Pour de nombreuses associations féministes, ce retour en arrière prôné par Gallardon est d’autant plus surprenant qu’il cible un débat qui semblait enterré. Même au sein du Parti populaire (droite), on s’inquiète de ce revirement réactionnaire.

Certes, Alberto Ruiz-Gallardon satisfait l’Église et la frange catholique la plus radicale, estimée à quelque 10 % de la population. Mais pas davantage. L’Espagne, au contraire, semble avoir accepté la loi de 2010. Selon un sondage publié en avril dans le quotidien El Pais, 75 % des Espagnols pensent que les femmes ont le droit de décider librement de poursuivre ou non leur grossesse.

Si une nouvelle législation devait voir le jour, l'Espagne monterait sur le podium des pays de l'Union européenne (UE) les plus restrictifs en matière d'avortement. Aujourd'hui, seules l'Irlande et Malte interdisent l'avortement pour malformation du fœtus.

Avec dépêches