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"Ce que les Allemands veulent, c'est Angela à la tête d'une coalition CDU-SPD"

, envoyé spécial à Berlin – La chancelière allemande Angela Merkel devrait rester à la tête du gouvernement à l’issue des législatives de dimanche. Une victoire qui n'a pas vraiment surpris les Allemands. Reportage dans l’un des plus célèbres cafés politiques de Berlin.

Angela Merkel apparaît, vers 19 heures, dimanche 22 septembre, sur l’écran géant pour se féliciter du succès de son parti, les chrétiens démocrates de la CDU, aux législatives. “Il doit y avoir des gens en Espagne, en Grèce et dans d’autres pays qui font la tête”, commente Friedel Drautzburg, en référence aux critiques adressées par certains États européens contre la politique prônée par celle qui, selon toute vraisemblance, va rester chancelière de l’Allemagne. Friedel Drautzburg est bien connu du petit monde politique berlinois : il est l’un des deux patrons du “Die Ständige Vertretung” (comprendre "La représentation permanente"), l’un des plus célèbres cafés du quartier politique de la capitale allemande.

Ici, à 800 mètres du Bundestag, sur les bords de la Spree, il faut jouer des coudes pour se faire une place au comptoir. Les clients commentent les résultats électoraux comme d’autres un match de foot. L’annonce du score triomphale de la CDU (41,5 %) est accueilli par des hourras et quelques sifflets.

Vers 20 heures, soudain, la salle archicomble, retient son souffle : les estimations semblent alors indiquer que la CDU pourrait décrocher la majorité absolue au Bundestag. Ce serait une première depuis plus de 50 ans. “On aurait enfin une majorité clairement de droite sans avoir besoin de passer des compromis avec des alliés parfois encombrants”, se met à rêver Nelle, 22 ans, qui a voté pour la CDU.

"Risque de statu quo politique"

Finalement, plus la soirée avance plus la possibilité d’un tel scénario s'éloigne. Angela Merkel va probablement devoir se trouver un nouvel allié pour former le prochain gouvernement. Les socialistes de la SPD ? “Ce soir, les Allemands demandent clairement une nouvelle grande coalition d'union nationale [CDU-SPD, NDLR]”, remarque Matthias, un Berlinois de 60 ans qui a voté pour l’Alternative für Deutschland (AfD - Alternative pour l’Allemagne, le parti anti-européen).

Pour certains, le prix d’une grande coalition risque cependant d’être elevé. “Ces résultats me déçoivent beaucoup car non seulement un attelage CDU et SPD risque de mener à un statu quo politique, mais en plus, la SPD va être tiraillée entre ses obligations au gouvernement et la pression de l’opposition au Bundestag qui sera à 100 % constitué de partis de gauche”, regrette Eike, un jeune homme de 30 ans, électeur de la CDU, mais qui aurait préféré voir le FDP rester dans la course.

"Il est possible que le FDP disparaisse"

C’est l’autre enseignement des résultats de ces législatives : le FDP, qui a été pendant quatre ans l’allié de la CDU au gouvernement, n’a même pas obtenu les 5 % qui lui auraient permis de rester au Bundestag (4,8 %). La prise de parole, à la télévision, de Guido Westerwelle, le président de la formation libérale, est huée dans la salle du café. “Maintenant que le FDP va être inaudible pendant quatre ans [durée de la mandature au Bundestag, NDLR], il est possible que le parti disparaisse complètement du paysage politique”, pronostique Friedel Drautzburg.

La CDU se retrouve donc au Parlement avec la SPD, Die Linke (gauche radicale) et les Grüne (les Verts, traditionnels alliés du SPD). Une chambre basse à quatre voix auxquels a failli se joindre celle de l’”Alternative für Deutschland”. “C’est dommage, l’AfD était le seul parti à poser des bonnes questions concernant l’avenir de l’Europe”, regrette Matthias. Reste que cette formation, qui veut voir l’Allemagne sortir de la zone euro, peut s’estimer heureuse des 4,7 % qu'elle a obtenus : elle n’existe que depuis avril 2013.

En fait, comme le souligne Andrea, une jeune étudiante qui a voté Angela Merkel, “aucun parti n’a présenté de programme vraiment intéressant, alors les gens se sont tournés vers quelqu’un qu’au moins ils connaissent”.