
Deux jours après la répression des pro-Morsi qui a fait plus de 600 morts, les Frères musulmans appellent à un "vendredi de la colère". Le pouvoir égyptien a prévenu qu'il emploierait la force si nécessaire, alors que l'ONU appelle à la retenue.
L'Égypte se prépare à une nouvelle journée de violences. Les Frères musulmans ont appelé à un "vendredi de la colère", deux jours après un assaut sanglant des forces de l'ordre contre les rassemblements islamistes, qui a profondément divisé le pays. L’évacuation des manifestants a fait 638 morts et des milliers de blessés, d’après les deniers bilans officiels.
Même s'ils admettent avoir subi "des coups", les Frères musulmans veulent poursuivre leur confrontation avec le chef d'état-major de l'armée égyptienne, le général Abdel Fattah al-Sissi. Les islamistes entendent réunir vendredi en milieu de journée des millions de partisans à l'issue de la grande prière hebdomadaire. "Malgré la douleur et la peine suscitées par la perte de nos martyrs, le dernier crime commis par les putschistes a renforcé notre détermination à en finir avec eux", annonce la confrérie dans un communiqué.
De son coté, le pouvoir égyptien mis en place par l'armée a prévenu qu'il ouvrirait le feu sur quiconque prendrait pour cible la police ou les institutions publiques. Il avait déjà proclamé mercredi l'état d'urgence pour un mois et instauré un couvre-feu nocturne dans une partie du pays.
Face à cette initiative de la confrérie islamiste, le Front de salut national (FSN), coalition hétéroclite de gens de gauche et de libéraux, a lui aussi appelé les Égyptiens à manifester ce vendredi contre les "actes évidents de terrorisme" commis par les Frères.
Le nom "vendredi de la colère" avait été donné à la journée la plus violente du soulèvement de janvier-février 2011, ayant abouti à la chute d'Hosni Moubarak. Ce jour-là, le 28 janvier 2011, les manifestants avaient pris le dessus sur la police, forçant l'armée à intervenir et à mettre à l'écart le "raïs".
L’ONU appelle à la retenue
Cette aggravation de la situation et la polarisation croissante de la société égyptienne inquiètent la communauté internationale. Réuni d'urgence jeudi, le Conseil de sécurité des Nations unies a lancé un appel à la retenue.
Après le bain de sang de mercredi, Barack Obama a déclaré jeudi que les États-Unis ne pouvaient plus coopérer normalement avec l'Égypte. Il a annulé les manœuvres militaires conjointes prévues entre les deux pays en septembre.
"Les États-Unis condamnent avec fermeté les mesures qui ont été prises par le gouvernement intérimaire égyptien et les forces de l'ordre", a déclaré le président américain en interrompant brièvement ses vacances. "Nous déplorons les violences exercées contre les civils. Nous soutenons les droits universels essentiels à la dignité de l'homme, y compris le droit de manifester pacifiquement."
La présidence égyptienne a répliqué que les propos de Barack Obama ne se basaient pas sur des "faits" et l'a accusé d'encourager les groupes violents commettant des "actes terroristes".
Le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, dit avoir appelé le général Al-Sissi jeudi, pour le prévenir que les récents événements pouvaient remettre en cause la coopération militaire entre les deux pays.
Les États-Unis versent 1,3 milliard de dollars (un milliard d'euros) par an à l'armée égyptienne, mais leur influence sur le pays le plus peuplé du monde arabe est menacée depuis le début de la crise.
Immédiatement après le renversement de Mohamed Morsi, l'Arabie saoudite, le Koweït et les Émirats arabes unis (EAU), tous hostiles aux Frères musulmans, ont annoncé le déblocage de 12 milliards de dollars (neuf milliards d'euros) pour aider l'Égypte à surmonter ses difficultés économiques liées au chaos politique.
Contrastant avec la réaction indignée des pays occidentaux, les EAU ont jugé que les autorités égyptiennes avaient fait preuve d'une "maîtrise maximale" lors du démantèlement des rassemblements islamistes.
Avec dépêches