Alexei Navalny, principal opposant du président russe Vladimir Poutine, a été condamné à 5 ans de prison pour détournement de fonds. L'homme, chantre de la lutte anti-corruption, se dit victime d'une "vengeance du Kremlin".
Le verdict est tombé jeudi 18 juillet au matin : le principal opposant du président russe Vladimir Poutine, Alexei Navalny, a été reconnu coupable de détournement de fonds dans une affaire qu’il affirme fabriquée de toute pièce. Il est condamné à 5 ans de prison, compte tenu de la "gravité du crime" et du "danger qu’il représente pour la société", a affirmé le juge Sergueï Blinov. L'opposant, menotté et arrêté dans la salle du tribunal, a 10 jours pour faire appel.
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"On ne s'attendait pas à une condamnation aussi lourde"
"Ne vous laissez pas aller, ne restez pas inactifs", a réagi l'opposant dans un dernier message sur son compte Twitter.
L'ancien président soviétique Mikhaïl Gorbatchev a, pour sa part, dénoncé dans un communiqué une utilisation "inacceptable" de la justice contre un adversaire politique. L'affaire "confirme malheureusement que nous n'avons pas une justice indépendante", a-t-il enfin ajouté.
L’homme de 37 ans, blogueur célèbre en Russie et farouche critique du chef du Kremlin, était accusé d’avoir organisé en 2009 le détournement de 16 millions de roubles (soit environ 400 000 euros) au détriment d’une exploitation forestière, alors qu’il officiait dans le cabinet du gouverneur de la région.
Tout au long de son procès, qui a commencé le 17 avril, Alexei Navalny n’a eu de cesse de récuser les accusations "absurdes" dont il est l’objet. Il assure que la quasi-totalité de la somme en cause a été versée à la société et que le reste constituait la marge de la société ayant effectué la transaction – société dont il n’est pas bénéficiaire.
"Trente-cinq témoins de l’accusation ont témoigné en ma faveur. Le juge a refusé d’entendre les témoins de la défense, d’ordonner une expertise indépendante", a dénoncé l’accusé dans un entretien accordé mercredi au quotidien Moskovski Komsomolets (MK). "Mais même les expertises qui figurent dans l’affaire contredisent l’acte d’accusation", a-t-il ajouté.
"Vengeance du Kremlin"
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Les explications de notre correspondante
Pour Alexei Navalny, il ne fait aucun doute que Vladimir Poutine "donnait personnellement des instructions aux enquêteurs", et l’a fait savoir au cours de son procès. "L'accusé dénonce un procès politique piloté par le Kremlin et qui n'avait qu'un seul but : l'écarter de la vie politique", précise Ksenia Bolchakova, la correspondante de FRANCE 24 à Moscou.
L’homme s’est en effet attiré les foudres du très autoritaire président russe. Chantre de la lutte anti-corruption, cet homme brillant et charismatique est l’un des leaders du mouvement de contestation né en mars 2011. Il n’a jamais caché son ambition de devenir maire de Moscou, mais sa candidature, qui a été approuvée la veille de sa condamnation, risque désormais d’être invalidée.
"Je suis victime d’une vengeance politique [de la part du Kremlin, NDLR]", assure Alexei Navalny. Outre cette affaire de détournement de fonds, l’homme est inquiété par la justice dans plusieurs autres dossiers où il est soupçonné d’escroquerie. "Les autorités qui m’appellent ‘voleur’ sont des escrocs qui ont peur de moi parce que je veux les balayer des postes où elles volent des milliards", avait assuré l’opposant dans son entretien à MK.
Plusieurs opposants se sont rendus à Kirov pour soutenir Navalny. Boris Nemtsov, ex-vice-Premier ministre de Boris Eltsine a dénoncé une affaire "fabriquée du début à la fin". L'ex-milliardaire et contradicteur du Kremlin emprisonné Mikhaïl Khodorkovski a appelé les Russes à résister à la "machine répressive", dans un message.
Avec dépêches