Après avoir opté pour un report des négociations sur l'accord de libre échange entre l'UE et les États-Unis, la France a finalement accepté un compromis mercredi. Les pourparlers devraient débuter la semaine prochaine.
La France, qui voulait retarder l'ouverture des négociations sur un accord de libre
échange entre l'Union européenne et les États-Unis en raison des accusations d'espionnage formulées contre Washington, s'est ralliée mercredi à un compromis qui permettra aux pourparlers de débuter la semaine prochaine.
Devant le refus de l'Allemagne et de l'immense majorité des partenaires européens de Paris d'envoyer ce signal négatif aux États-Unis, un groupe de travail euro-américain sur les activités des services de renseignement sera créé simultanément.
"Il ne peut pas y avoir d'ouverture de négociations commerciales sans qu'il y ait dans le même temps, à la même date, l'ouverture de discussions et de vérifications avec les
États-Unis sur l'activité des services de renseignement américains dans nos pays et la protection des données privées", a déclaré le président français à Berlin à l'issue d'une réunion européenne consacrée à l'emploi des jeunes.
La France avait pourtant toute la journée de mercredi défendu une position ferme à la suite d'articles du Guardian et du Spiegel qui ont fait état d'un programme d'espionnage mené par l'Agence nationale de sécurité (NSA), notamment sur des pays
européens.
La porte-parole du gouvernement français, Najat Vallaud-Belkacem, avait déclaré lors de son compte rendu du conseil des ministres présidé par François Hollande qu'il serait "sage" de reporter de 15 jours l'ouverture des discussions commerciales.
"Il ne s'agit pas d'arrêter les négociations sur l'accord de libre échange avec les Etats-Unis", avait-elle dit.
"En revanche, il nous paraît sage de les suspendre temporairement, de les suspendre pour une durée de 15 jours sans doute, pour éviter toute polémique et le temps d'obtenir les informations que nous avons demandées."
"Pas opportun" selon Fabius
Le ministre français des Affaires étrangères avait ensuite abondé dans le même sens lors des questions au gouvernement à l'Assemblée, même si la France ne pouvait pas s'opposer à l'ouverture des négociations lundi prochain, la Commission négociant sur ce dossier au nom des Vingt-Huit.
"C'est un accord très important et c'est vrai que commencer à en discuter dans un climat de méfiance ne serait évidemment pas opportun", avait estimé Laurent Fabius.
Mais l'Allemagne lui a opposé une fin de non recevoir.
"Les discussions sont entre les mains de la Commission européenne, qui souhaite qu'elles débutent le 8 juillet. L'Allemagne la soutient sur ce point", a déclaré Steffen
Seibert, porte-parole du gouvernement allemand.
Les Européens peuvent se consulter pour apporter une réponse commune sur le dossier de l'espionnage, ce qui devrait être chose faite jeudi à Bruxelles, où doivent se réunir les représentants permanents des Vingt-Huit, mais cela ne doit pas retarder les négociations commerciales, a estimé Berlin.
"Nous sommes très préoccupés par certaines activités qui se sont déroulées. Il faut vérifier si ces activités ont eu lieu", a déclaré Angela Merkel.
Initiative américaine
Pour le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, les enjeux sont trop élevés pour prendre le risque de torpiller l'ouverture des négociations commerciales.
"Cet accord nous ouvre un très grand potentiel commercial. Les négociations continueront à revêtir une grande importance", a-t-il déclaré à Berlin.
L'idée de constituer un groupe de travail qui débattra des questions d'espionnage émane d'ailleurs des Etats-Unis, a dit à Strasbourg le ministre lituanien des Affaires européennes, Vytautas Leskevicius, dont le pays préside pour l'instant l'UE.
"Il s'agit d'un groupe d'étude, il ne s'agit pas d'une instance politique, ce n'est pas une instance de négociation avec les États-Unis", a expliqué la commissaire européenne
responsable du dossier, Viviane Reding.
"C'est un groupe qui permettra de savoir comment ça fonctionne, quelle est l'importance de ce programme, quelles sont les possibilités de recours pour les citoyens et est-ce que les informations ainsi rassemblées ont été utiles à des fins de
sécurité nationale", a-t-elle ajouté.
Le Parlement européen ne désarme cependant pas.
Il devrait adopter vendredi une résolution qui demandera le gel des négociations sur l'accord de libre échange tant que la question de l'espionnage ne sera pas purgée. Les
socialistes-démocrates et les Verts sont pour mais les libéraux et la majorité du groupe conservateur sont contre.
Reuters