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Le Sénat américain ouvre la voie à la régularisation de millions de clandestins

Le Sénat américain a voté, jeudi, une loi visant à régulariser de 11,5 millions de clandestins tout en renforçant la surveillance à la frontière mexicaine. Mais les républicains veulent modifier le texte avant le vote à la Chambre des représentants.

Bonne nouvelle pour les 11 millions d'immigrés clandestins aux États-Unis. Le Sénat américain a voté, jeudi 27 mai, par 68 voix contre 32, le projet de réforme de l'immigration. En cas d'adoption du texte sous la même forme par la Chambre des représentants, ce qui semble mal parti, des millions de régularisations seront accordées et la surveillance de la frontière mexicaine sera renforcée.

Le président Barack Obama, après un échec brutal sur les armes à feu en avril, espère ainsi redorer son bilan législatif et passer à la postérité comme le premier président depuis Ronald Reagan, en 1986, à réformer un système migratoire devenu obsolète.

"La loi votée aujourd'hui est un compromis. Par définition, personne n'a obtenu tout ce qu'il voulait, ni les démocrates, ni les républicains, ni moi, a-t-il réagi dans un communiqué. Mais la loi adoptée au Sénat est fidèle aux principes que j'ai souvent présentés en vue d'une réforme de bon sens."

Compromis

Le texte est le résultat d'un énorme compromis destiné à rassurer les républicains. En échange d'une période de 13 ans au terme de laquelle les personnes en situation irrégulière pourront demander la naturalisation américaine, le plan prévoit le déploiement sans précédent de 20 000 agents supplémentaires le long des 3 200 km de frontière avec le Mexique, en plus des 18 000 déjà en place.

La quasi-totalité de la frontière terrestre sera bordée de clôtures, et un arsenal paramilitaire de surveillance (caméras, détecteurs de mouvement, radars) aidera les policiers à détecter toute personne tentant de traverser la frontière. Des drones voleront jour et nuit.

À l'étranger, la réforme satisfera aussi les ingénieurs, programmeurs et autres travailleurs hautement qualifiés confrontés depuis des années à une pénurie de visas de travail, dont le nombre serait augmenté.

Les républicains hésitent

Une partie du groupe républicain (14 membres sur 46) au Sénat a voté avec le groupe démocrate, unanime. "Nous avons fait un pas de géant pour résoudre nos problèmes d'immigration", s'est félicité Charles Schumer, l'un des architectes de la loi, avec notamment le républicain John McCain.

Le président a toutefois mis en garde ses adversaires républicains, qui contrôlent la Chambre et ont averti qu'ils voteraient leur propre version du texte, plus axée sur les questions de sécurité. "Les opposants vont tout faire pour [...] empêcher une réforme de bon sens de devenir réalité. Nous ne pouvons pas les laisser faire", a prévenu Barack Obama.

La majorité des élus républicains restent en effet écartelés entre leur désir de reconquérir l'électorat hispanique et leur crainte de s'aliéner leur base conservatrice. "Les gens seront vraiment fâchés si, après avoir donné des papiers à tous ces travailleurs clandestins, 10 millions de sans-papiers arrivent à nouveau dans le pays", a expliqué dans un entretien à l'AFP le sénateur Rand Paul, possible prétendant à la Maison Blanche en 2016.

L'harmonisation des deux textes pourrait durer jusqu'à la fin de l'année, selon le président de la Chambre, John Boehner.

Grandes entreprises et syndicats applaudissent

Les grandes entreprises et syndicats, qui soutenaient une telle réforme, ont unanimement applaudi le vote du Sénat: "Le statu quo sur l'immigration qualifiée revient à un désarmement unilatéral dans le marché mondial pour les talents, a réagi Ed Black, président d'une fédération professionnelle du secteur informatique. Avec cette loi, nos entreprises seront libres de recruter qui elles veulent."

Mais la loterie attribuant chaque année des dizaines de milliers de ces sésames, dont profitent notamment en grand nombre les Africains, serait supprimée selon ce plan.

Avec dépêches