La Cour constitutionnelle guatémaltèque a invalidé lundi la condamnation pour génocide de l'ancien dictateur Efrain Rios Montt. Jugé responsable du massacre de populations mayas entre 1982 et 1983, il avait été condamné à 80 ans de prison.
C’était un verdict historique : 80 ans de prison, 50 pour génocide et 30 pour crimes de guerre. L’ancien dictateur guatémaltèque Efrain Rios Montt, âgé de 86 ans, avait été jugé responsable, le 10 mai dernier, du massacre d'au moins 1 771 Indiens mayas ixils lorsqu'il était au pouvoir en 1982 et 1983. Pour la première fois, un président sud-américain était condamné pour génocide.
Mais cette décision, accueillie alors par des cris de joie et les applaudissements des proches des victimes, vient d’être retoquée par la justice du Guatemala. Lundi 20 mai, lors d’une brève conférence de presse, la Cour constitutionnelle a annoncé l’annulation de cette condamnation pour génocide en raison d'un vice de forme et a exigé la reprise du procès au moment où il avait été interrompu pour des problèmes de compétence, le 19 avril dernier. Ce jour-là, un différend a éclaté entre deux juges au sujet de leur compétence sur ce dossier. Un certain nombre d'appels avaient alors été interjetés auprès de la Cour constitutionnelle pour des irrégularités.
L'un concernait Francisco Garcia, un des avocats de la défense de Rios Montt, qui avait été récusé, au début du procès, pour avoir tenté à plusieurs reprises de faire révoquer deux des trois magistrats présidents. Une fois autorisé à poursuivre la défense de son client, Francisco Garcia a à nouveau tenté de débouter les juges, mais ils ont simplement rejeté sa demande et ont poursuivi les audiences. Selon la Cour constitutionnelle, les juges auraient dû suspendre le procès jusqu'à ce que la tentative de récusation ait été officiellement résolue.
Les victimes devront de nouveau témoigner
Aucune date n'a été donnée pour le redémarrage du procès. Parmi les 130 personnes appelées à témoigner, toutes celles convoquées après le 19 mai seront donc de nouveau entendues. Des dizaines de survivants des massacres perpétrés par l'armée durant la guerre civile au Guatemala venus raconter les atrocités commises par les militaires devront recommencer. Les visages masqués par des tissus colorés, des femmes indigènes ont notamment rapporté des viols collectifs. Un autre témoin, Julio Velasco, enfant à l'époque, a assuré avoir vu des soldats "utiliser la tête d'une vieille femme comme ballon" dans un campement militaire où il avait été emmené de force. Un ex-membre de patrouilles paramilitaires, Herrera Bernal, avait expliqué comment il avait été enrôlé de force par l’armée durant toute la guerre civile comme auxiliaire pour la lutte contre-insurrectionnelle.
Arrivé au pouvoir par un coup d'État en 1982 et délogé de la même façon l'année suivante, l'ex-général Rios Montt a appliqué la politique de la terre brûlée à l'encontre de populations autochtones accusées de soutenir la guérilla de gauche, en pleine guerre froide. La guerre civile au Guatemala (1960-1996) a fait 200 000 morts et disparus, selon les Nations unies.
Après avoir passé deux nuits en prison, Efrain Rios Montt a été transporté à l'hôpital militaire la semaine dernière pour des problèmes respiratoires et un problème de prostate. Il devrait prochainement retrouver sa résidence surveillée dans laquelle il se trouvait avant la fin du procès. La Cour constitutionnelle a, quant à elle, donné 24 heures aux juges qui ont condamné l'ancien dictateur pour se mettre en conformité avec sa décision.
FRANCE 24 avec dépêches