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Les soldats français ratissent la région de Gao, fief du Mujao

Depuis dimanche, un millier de soldats français, appuyés par de nombreux blindés et une importante couverture aérienne, ont investi la vallée voisine de Gao connue comme l'une des bases principales du groupe islamiste Mujao.

Sous les grands acacias, le campement jihadiste dans cet oued asséché au nord de Gao était invisible du ciel. Et ce n'est sans doute que quelques heures avant l'arrivée des soldats français qu'il a été déserté.

Progressant à pied, en formation de combat quelques mètres devant les blindés dans le fond de la vallée, les hommes du 92e régiment d'Infanterie ont, au deuxième jour de l'opération "Gustav", découvert des stocks de munitions, des restes de bivouacs, des équipements de camping et des fûts de carburant attestant d'une forte présence ennemie.

LA FRANCE A RETIRE SES PREMIERS SOLDATS DU MALI

Les premières unités de l'armée française, soit une centaine d'hommes, ont été retirées du Mali et sont arrivées lundi à Paphos, à Chypre, a annoncé, à l'AFP mardi à Paris, l'état-major des armés.

Les soldats désengagés doivent passer trois jours dans un hôtel de Paphos où séjournent habituellement les militaires français de retour d'opérations, avant de regagner la France. Les militaires français déployés au Mali étaient un peu plus de 4 000 avant ce premier retrait.

Un millier de soldats français appuyés par de nombreux blindés et protégés par une importante couverture aérienne ont dimanche à l'aube encerclé puis investi cette vallée, considérée par l'état-major de l'opération Serval comme l'une des bases principales du groupe islamiste Mujao (Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest).

Le capitaine Arnaud (il ne révèle que son prénom) note les points GPS de toutes les découvertes de ses hommes. Les instructions sont de ne rien toucher, au cas où ce serait piégé, et d'attendre les spécialistes du Génie.

"Ils ont quitté les lieux précipitamment, sans doute informés de nos mouvements dès que nous avons quitté Gao", dit-il. "Ils ont laissé derrière eux des tas de choses qu'ils emportent quand ils bougent de façon ordonnée. Ils étaient pressés".

Il montre, sous le couvert de branchages touffus, des lits pliants, des ustensiles de cuisine, des vêtements, des fûts de 500 litres de carburant, des morceaux d'armement. Une grande cantine contient le début de ce qu'il faut mélanger pour fabriquer de l'explosif artisanal: semoule, gasoil et engrais. Les sapeurs répandent la matière grumeleuse sur le sol, crèvent la cantine à grands coups de pioche. Ils brûlent le reste.

Deux hélicoptères d'attaque Tigre tournoient dans le ciel et surveillent le terrain à l'avant des fantassins. Des chars et des canons de gros calibre veillent sur les crêtes.

Plus loin, dans une caisse en bois portant des inscriptions en français, une radio HF d'un modèle ancien, sans doute volée à l'armée malienne.

"On sait qu'ils sont dans le coin"

"Ca c'est rare et c'est une aubaine", explique un autre capitaine, Jean-Baptiste, lui aussi du 92e régiment d'Infanterie. "Cela va permettre à nos spécialistes de voir quelles fréquences ils utilisent ou celles qu'ils écoutent. Nous, ils ne peuvent pas, c'est crypté".

"On sait qu'ils sont dans le coin. Dix pick-up blancs ont été repérés dans la vallée il y a moins de vingt heures", ajoute-t-il. "Ils nous observent peut-être. Ils s'adaptent. Ils nous évitent quand ils voient que nous sommes en force, qu'ils n'ont aucune chance, mais dès qu'ils repèrent une vulnérabilité, ils peuvent attaquer en nombre et se montrer redoutables. Il faut être super vigilant".

Sous la rotonde parfaite formée par les branches d'un acacia géant, non loin du campement, les soldats découvrent six roquettes de 122 mm, longues de quatre mètres, à côté d'une batterie de camion.

"Il suffit de brancher le cul de la roquette pour la faire partir", dit l'un des sapeurs, Eric. "Ils fabriquent des rampes de lancement improvisées avec des planches, des pierres. La précision est bien sûr approximative, mais on a vu en Afghanistan qu'avec un peu de pratique ils pouvaient s'améliorer".

Certains membres du 92e régiment d'Infanterie sont rentrés en novembre d'Afghanistan, pour repartir quelques mois plus tard au Mali.

Pour détruire les engins, ils les posent côte à côte dans une clairière, les relient entre eux par trois longs pains de plastic reliés à une mèche lente. L'explosion fait trembler l'air brûlant sur des centaines de mètres.

Au soir du deuxième jour de son offensive, l'une des plus importantes menées par l'armée française au Mali, le colonel Bruno Bert, qui commande les opérations sur le terrain, reconnaît qu'aucune cible humaine n'a été repérée mais s'assure satisfait.

"Nous donnons un grand coup dans la logistique du Mujao", dit-il à l'AFP. "Ils prennent un grand coup en terme de capacité de nuisance. L'opération va encore durer le temps nécessaire, nous allons fouiller toute cette vallée. Et s'ils reviennent après notre départ ils ne retrouveront plus rien".

AFP

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