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Natalie Nougayrède, première femme à la tête du Monde

Candidate surprise adoubée par le trio d’actionnaires du groupe, Natalie Nougayrède a été officiellement élue par la Société des rédacteurs du Monde à la tête du quotidien, vendredi. Elle devient la première femme à occuper ce poste.

"J'assume l'effet de surprise", avait déclaré Natalie Nougayrède, fin février, pour couper court aux interrogations, qui persistent à ce jour, suite à l’annonce de sa candidature à la tête des rédactions du "Monde" qui englobent le quotidien, le mensuel "M" et Internet. Celle qui a été élue le 1er mars à la succession d'Erik Izraelewicz, décédé brutalement le 27 novembre, assure avoir pris sa décision seule et tirer sa légitimité de son expérience de journaliste.

Ancienne correspondante du "Monde" à Moscou, lauréate du prestigieux Prix Albert Londres pour son travail sur le conflit tchétchène en 2005, la journaliste, âgée de 46 ans, a intégré le quotidien du soir en 1996. Parmi ses faits d’armes figure sa liberté de ton. En 2008, quand elle rédige un portrait sans concession de Bernard Kouchner, alors ministre des Affaires étrangères, ce dernier avait refusé, en représailles, de recevoir la journaliste diplomatique au Quai d’Orsay.

Désignée par le trio d’actionnaires - Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse - qui président aux destinées financières du groupe, Natalie Nougayrède a également dû être adoubée par la Société des rédacteurs du Monde (SRM), lors d’un vote qui s'est déroulé vendredi 1er mars en début de soirée.

Ni "naïve", ni "dans une méfiance contre-productive"

Son "grand oral" devant la SRM, fin février, n’avait pas été de tout repos. Les questions avaient fusé sur son manque d’expérience à un poste de direction ("Comment réalise-t-on tardivement qu’on peut diriger un paquebot, quand on n’a même jamais dirigé trois personnes ?"), sur sa vision du Web ("Tu n’as jamais collaboré au Web, tu faisais même partie des personnes réfractaires. Ta conversion numérique date du jour de ta candidature"), ou encore sur sa capacité à affronter un actionnariat jugé "violent".

Ce à quoi Natalie Nougayrède avait répondu : "Je ne suis pas naïve, mais pas non plus dans une méfiance contre-productive, je défendrai la ligne jaune quand il le faudra [vis-à-vis des actionnaires, NDLR]", ou encore : "Je serai avec toutes mes fibres de journaliste dans la défense de ce journal", des arguments destinés à convaincre la SRM.

Natalie Nougayrède fera équipe avec Vincent Giret, actuel directeur délégué de la rédaction de "Libération" et ancien directeur de la rédaction de FRANCE 24.

Vraisemblablement parachuté par le trio d’actionnaires BNP (Bergé, Niel et Pigasse), Vincent Giret avait d’ailleurs promis de devenir le collaborateur d’autres prétendants au poste de directeur du "Monde", depuis éconduits. "Il a accepté le 26 décembre de me seconder si j’étais choisi", a indiqué Alain Faujas, ex-candidat, à Natalie Nougayrède lors de l’audition par la SRM fin février, rapporte Télérama. "Il répondait oui aussi le 29 décembre à Franck Nouchi [autre candidat recalé]... Et il t’a dit oui ! Sans nous prévenir les uns les autres qu’il s’était engagé auprès d’un autre ! Comment lui faire confiance ?".

Natalie Nougayrède, première femme à occuper un tel poste à la tête du premier quotidien de France, devra cependant tordre le cou à certains clichés tenaces. Un ancien journaliste du "Monde", Luc Rosenzweig, l’a d’ores et déjà baptisée "ambassadrice de charme de la marque ‘Le Monde’". L’intéressée appréciera...