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"Quand la famille se défait, elle s’expose davantage au mal-logement"

Dans son rapport annuel, la Fondation Abbé-Pierre démontre la corrélation entre situation familiale et difficultés de logement. La France compte 3,6 millions de mal-logés et plus de 5 millions de personnes "en situation de réelle fragilité".

Dans son 18e rapport annuel, la Fondation Abbé-Pierre - qui s'est longuement penchée sur les liens entre les situations familiales fragiles et la crise du logement - a noté, fait nouveau, que la part des familles faisant face à la difficulté de se trouver un toit décent a considérablement augmenté. "À Paris, elles [ces familles] représentent désormais 49 % des personnes hébergées via le 115 [soit une augmentation de 400 % en 10 ans, NDLR]", s'alarme l'association.

Aujourd’hui, en effet, de plus en plus de pères ou mères célibataires avec enfants se retrouvent dans des hébergements d’urgence après avoir été "logés" quelque temps chez un ami ou à l’hôtel…. "Quand la famille se défait, elle s’expose davantage au mal-logement", peut-on lire dans le rapport.

Cohabitation forcée

La cohabitation "forcée" a aussi fait son apparition : désormais, certains divorcés sont forcés de cohabiter avec leur ex-conjoint. "Les conséquences économiques d’une séparation, la perte du niveau de vie qui en résulte, la difficulté à trouver un logement conduisent dans certains cas à des cohabitations forcées et insupportables", souligne ainsi le rapport.

Autre exemple : des jeunes adultes en voie d’autonomisation et d’indépendance, partis de la maison familiale, sont obligés de retourner habiter avec leurs parents, souvent à la suite de la perte d’un emploi, ou d’un "accident" de la vie.

"L'urgence sociale a explosé"

Reste que, même sans difficultés économiques particulières, certaines familles recomposées peuvent également être fragilisées. Ces dernières doivent souvent "retrouver un logement de taille suffisante pour accueillir les enfants des deux lignées, à proximité du domicile de l’ex-conjoint". Une véritable gageure dans les grandes agglomérations.

Toutes ces nouvelles données familiales, ces "mutations structurelles", viennent s’additionner aux personnes précaires déjà confrontés au mal-logement : les chômeurs, les personnes âgés à petite retraite, les sans-domicile fixe… "La part des familles parmi les usagers de l’urgence sociale a explosé au cours des 10 dernières années", note la fondation.

Plus de 8 millions de mal logés

Au total, la Fondation Abbé-Pierre a recensé 3,6 millions de mal-logés et plus de 5,1 millions de personnes "en situation de réelle fragilité". Elle évalue ainsi à plus de 8 millions les personnes concernées par des difficultés de logement.

Elle estime également que plus d'1,1 million de ménages sont en attente d'un logement social, que 3,8 millions sont en situation de précarité énergétique (chiffres 2006), que 1,3 million de locataires sont en difficulté de paiement tout comme 565 000 propriétaires (2006), et que plus de 91 000 ménages sont menacés d'expulsion (chiffres 2009-2011). Autant de chiffres qui lui permettent d'évoquer au final 10 millions de personnes touchées, de près ou de loin, par la crise du logement.