
Le Tribunal suprême a jugé le report de la cérémonie d'investiture d'Hugo Chavez, hospitalisé depuis un mois à Cuba, conforme à la Constitution. La droite a pris acte de la décision tout en dénonçant une "paralysie" politique.
Le Tribunal suprême de justice (TSJ) a tranché. Dans le débat constitutionnel qui fait rage depuis plusieurs jours au Venezuela, la justice a donné raison au gouvernement en décrétant que la Constitution autorisait Hugo Chavez, toujours hospitalisé à La Havane, à prêter serment après la date du 10 janvier.
Les sept juges de la chambre constitutionnelle du TSJ ont décrété que l'investiture du chef de l'État, réélu en octobre, pourra intervenir à une date postérieure au 10 janvier. La présidente du TSJ, Luisa Estella Morales, a par ailleurs déclaré devant la presse qu'en vertu "du principe de la continuité administrative", le gouvernement et le vice-président Nicolas Maduro - désigné par Chavez lui-même comme son successeur - resteront en fonction jusqu'à ce que le chef de l'État soit en mesure d'être investi.
La juridiction a également indiqué que l'envoi d'une commission médicale à Cuba a été écarté. Cette proposition avait été demandée par l'opposition alors que le président demeure absent de la scène politique depuis le 11 décembre, date de sa quatrième opération d'un cancer.
État "stable"
Mardi soir, le président de l'Assemblée nationale, Diosdado Cabello, avait mis fin au suspens en confirmant qu'Hugo Chavez, réélu le 7 octobre, ne prêterait pas serment. Selon le dernier bilan de santé communiqué par le gouvernement le 7 janvier, son état est "stable" et il "assimile son traitement" après une grave infection pulmonaire, sans donner plus de précisions.
La Constitution prévoit que le chef de l'État élu prête serment le 10 janvier devant l'Assemblée nationale au cours d'une cérémonie qui doit se dérouler au Venezuela et ne peut être reportée. Mais la loi indique également que s'il ne peut prêter serment devant les députés, le président peut le faire devant le TSJ. Et, dans ce cas, aucune date n'est précisée.
"Il y a eu décision"
De son côté, l'opposition a pris acte de la décision du Tribunal suprême de justice. "Il y a eu une décision, il y a eu une interprétation du TSJ (...) maintenant c'est à vous M. Maduro que revient la responsabilité d'assumer votre charge et de gouverner", a déclaré l'opposant Henrique Capriles devant la presse en s'adressant au vice-président Nicolas Maduro, à qui Hugo Chavez a confié une partie de ses pouvoirs avant de quitter le pays le 10 décembre dernier. Capriles a rappelé qu'il n'avait pas demandé à ses partisans d'aller risquer une confrontation jeudi dans les rues de Caracas.
Jusqu'à présent, la droite avait réclamé que soit constaté un "défaut temporaire" du président considèrant qu'en restant en place le gouvernement s'engageait dans une forme de coup d'État institutionnel.
La droite affaiblie
S'il semble aujourd'hui jouer la carte de l'acceptation, Capriles ne baisse pas pour autant les armes. Il a maintenu ses accusations de "paralysie" du gouvernement et estimé que les "instances ne doivent pas répondre aux intérêts d'un parti", visant indirectement le TSJ, souvent décrié pour ses décisions favorables au gouvernement.
Mais dans ce bras de fer, l'opposition dispose d’une marge de manœuvre restreinte. "Elle est affaiblie par les deux lourdes défaites électorales qu’elle a subies", rappelle Jean-Baptiste Mouttet, journaliste spécialiste du Venezuela et co-auteur de "Grande revanche indienne". Défaites lors de la présidentielle en octobre, où Chavez a recueilli 55,25 % des suffrages, et lors des régionales de décembre, où 20 des 23 régions ont été remportées par le Parti socialiste unifié (PSUV) au pouvoir.
"À l'inverse, Hugo Chavez a gagné en popularité depuis l’annonce de sa maladie", poursuit Jean-Baptiste Mouttet. "Les socialistes le savent et les cadres, comme le vice-président Nicolas Maduro, font souvent référence au dirigeant convalescent", précise-t-il. L’opposition n’est donc pas en mesure de critiquer le leader charismatique au pouvoir depuis 1999. "Il serait périlleux d’attaquer trop frontalement Chavez, confirme Pierre-Philippe Berson. C’est un homme malade, sûrement mourant. L’opposition ne doit pas passer pour des charognards qui dansent autour d’un malade."