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Plusieurs grands groupes internationaux produisaient des vêtements dans l'usine du Bangladesh, frappée fin novembre par un incendie meurtrier. Ils assurent ne pas avoir été au courant de leur collaboration avec cette unité de production.

Ils "ne savaient pas". Que ce soit l’Américain Wall-Mart ou le Français Teddy Smith, ils affirment n’avoir pas été au courant qu’une partie de leurs vêtements avait été confectionné dans l’usine de Dacca (Bangladesh), où 112 employées ont trouvé la mort lors d’un incendie dans la nuit du 24 au 25 novembre. C’est l’accident le plus meurtrier de l’histoire de l’industrie du textile au Bangladesh.

Un drame qui avait soulevé l’émoi dans tout le pays et pointé du doigt les conditions de travail et de sécurité souvent déplorables dans ce pays qui est aujourd’hui le deuxième exportateur de vêtements au monde derrière la Chine. Ainsi, les employés qui ont survécu à l’incendie ont affirmé que les portes de leur usine avaient été verrouillées et que les extincteurs ne fonctionnaient pas.

A l’époque, on savait seulement que ce site de la société bangladi de confection de vêtements Tazreen Fashion travaillait pour plusieurs marques internationales. Mais il a fallu attendre cinq jours et l’enquête d’un journaliste de l’agence de presse américaine Associated Press sur place pour pouvoir mettre des noms derrières ces habits associés à la mort de plus d’une centaine de personnes. Il a pu constater dans les décombres de l’usine des livres de comptes et des restes de vêtement qui relient cette usine au marques américaines Wal-Mart, Disney Pixar ou encore des shorts siglés du noms de la star du rap Puff Daddy.

Une partie de la production de la marque française "Teddy Smith"

Outre ces grands noms américains, les employés de l’usine de Tazreen travaillaient aussi pour le compte du groupe Français Teddy Smith. Contacté par FRANCE 24, ce fabricant de vêtements spécialiste du denim a affirmé avoir appris la semaine dernière par voie de presse qu’une partie de sa production avait été confiée à Tazreen Fashion à Dacca. “Nous n’étions pas au courant et lorsque nous avons contacté notre agent au Bangladesh après l’incendie, il a reconnu avoir dû déplacer précipitament la fabrication de 10 000 sweat-shirts dans cette usine sans nous tenir informé”, affirme Valerie Souffez, directrice des opérations pour Teddy Smith. Ce transfert a eu lieu avant l'été 2012.

Une ligne de défense du “on ne savait pas” qui met en lumière toute la complexité de la chaîne de production dans une économie mondialisée parfois à l’extrême. Pourtant, comme le reconnaît Valérie Souffez, la charte de Teddy Smith impose aux intermédiaires de les tenir informés des sous-traitants avec lesquels ils travaillent. “Notre agent ne l’a pas fait”, repète Valérie Souffez. Un argumentaire qui rappelle celui de Wall-Mart. Le géant américain de la distribution avait assuré à AP, le 28 novembre, qu'un intermédiaire avait sous-traité une partie de la production au site de Tazreen, sans en référer à Wall-Mart.

Du papier à la réalité

Chez Teddy Smith, Valérie Souffez assure, en outre, qu’au moment de l’incident, Teddy Smith n’avait plus aucune relation commerciale avec l’usine de Dacca. “Les vêtements trouvés sur place devaient être des restes ou des modèles présentant des défauts de fabrication”, suppose Valérie Souffez.

De plus, sur le papier, Tazreen - qui appartient au groupe Tuba - présente certaines garanties de sérieux en matière de conditions de travail. La maison mère a, en effet, adhéré à la charte de la Business Social Compliance Initiative (BSCI) qui oblige les signataires à instaurer certaines règles de sécurité dans les usines. Mais du papier à la réalité, il y a parfois un fossé comme l’ont démontré l’incendie de Dacca et ceux qui ont eu lieu dans d’autres usines de confection de vêtements au Bangladesh les 26 et 28 novembre. “Nous avons ainsi découvert en nous renseignant après l’incendie que l’usine de Dacca avait jusqu’à fin décembre 2012 pour se mettre en conformité avec les recommandations de la BSCI”, souligne Valérie Souffez. Une histoire de calendrier qui a coûté cher aux employés de l’usine détruite.