Le FMI et l'Union européenne ont trouvé dans la nuit de lundi à mardi un accord visant à alléger le poids de la dette grecque. Un compromis que Céline Antonin, spécialiste de la Grèce à l'OFCE, estime insatisfaisant.
Ils ont été unanimes, mardi 26 novembre, à “saluer” l’accord sur la Grèce censé aider Athènes à sortir de sa crise de la dette. Le Premier ministre grec Antonis Samaras, le ministre français de l’Économie Pierre Moscovici, et la patronne du Fond monétaire international (FMI) Christine Lagarde se sont tous dit soulagés. Même les bourses européennes pointaient à la hausse mardi.
Après un marathon de négociations qui a duré plus de dix heures, dans la nuit de lundi à mardi, les créanciers publics de la Grèce (la Banque centrale européenne, le FMI et l’Union européenne) ont réussi à trouver un terrain d’entente.
Pour Athènes cet accord signifie avant tout l’assurance de ne pas faire faillite à court terme. Le pays va, en effet, recevoir une nouvelle tranche d’aide financière internationale de 43 milliards d’euros qui devrait lui permettre de rembourser les dettes qui arrivent à échéance dans les prochains mois.
Mais le nouveau coup de pouce de la troïka va bien au delà d’un simple chèque. Les créanciers publics ont accepté de baisser les intérêts qu’Athènes doit payer, d’allonger les délais de remboursement et permettent dorénavant à la Grèce de racheter à la BCE ou l’Union européenne une partie de sa dette à prix cassé.
Une sorte de package globale qui ressemble à un cadeau de noël avant l’heure. Il doit permettre à ce pays en pleine récession d’atteindre un niveau d’endettement public de 124 % du PIB au lieu de 144 % s’il n’y avait pas eu ces nouvelles aides. Pourtant, aux yeux de Céline Antonin, spécialiste de l’économie grecque à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), cet accord ne règle pas les problèmes à long terme de la Grèce. Elle en explique les raisons à FRANCE 24.
FRANCE 24 : Christine Lagarde, patronne du FMI, a estimé qu'après cet accord, la Grèce est "sur la voie d’une dette viable", êtes-vous d’accord ?
Céline Antonin : C’est un progrès, dans le ce sens où il permet à la Grèce de ne pas faire faillite à court terme. L’autre bonne nouvelle c’est que le FMI s’est rangé aux arguments des autres pays européens alors que l’institution avait laissé entendre qu’il ne fallait peut-être plus continuer à soutenir la Grèce.
Mais l’accord ne rend pas la dette grecque viable pour autant. Il ne résout pas le problème central du pays : comment sortir de la récession ? Sans s’y attaquer, les rentrées fiscales du pays vont continuer à être faibles et les ressources propres manqueront à Athènes pour se financer sans aide extérieure.
FRANCE 24 : Pourtant l’accord allège fortement le poids de la dette grecque...
C.A. : La Grèce a un problème de soutenabilité de sa dette. C’est-à-dire que le pays n’a pas les fonds pour rembourser l'argent qu'il a emprunté. L’accord ne joue que sur une variable de ce problème : les modalités de remboursement. Il abaisse les intérêts et rallonge les délais de paiement. Cela donne juste à Athènes un peu d’air financier.
Pour parvenir à une solution globale, il faut aussi agir sur la réduction des déficits. C’est en cours à travers des mesures actuellement mises en œuvre comme la lutte contre la fraude fiscale. Mais il faut encore attendre pour voir si elles auront l’effet escompté.
Enfin, la Grèce doit absolument retrouver le chemin de la croissance. Et c’est un point que les créanciers publics n’ont absolument pas abordé dans leur accord.
FRANCE 24 : À votre avis quels auraient été les termes d'un accord efficace ?
C.A. : Il aurait déjà dû poser la question de la croissance. Ce qui aurait impliqué de mener une reflexion sur les mesures d’austérité qui plombent l’économie grecque actuellement. La rigueur est telle en Grèce que le pays n’a aucune marge de manœuvre budgétaire pour relancer l’économie. Mais remettre en cause cette austérité imposée par les créanciers publics reviendrait, pour la troika, à reconnaître qu’elle fait fausse route depuis le début de la crise grecque.