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Notre-Dame-des-Landes fait le plein d'opposants

La manifestation contre le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes a réuni samedi quelque 40 000 personnes. Malgré la forte mobilisation, les élus socialistes ne souhaitent pas abandonner le projet cher à Jean-Marc Ayrault.

De 13 000 à 40 000 personnes selon les estimations, de tous âges, de toute la France, handicapés ou valides, en groupe ou en famille et d'obédiences très diverses, ont envahi samedi le bocage au nord de Nantes pour s'opposer au projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

"Non à l'Ayraultport", Docteur Folayrault", "Ayrault démission" : le Premier ministre et ancien maire de Nantes, qui s'est beaucoup engagé pour ce projet, est la première cible des manifestants.

Parmi eux, Madeleine, 88 ans, partie depuis jeudi du sud de Carcassonne (Aude) où elle habite, est venue avec son fauteuil roulant et ses "pousseurs". "Je suis citoyenne du monde et je me bats pour le vivant", confie à l'AFP l'octogénaire aux cheveux blancs.

Autour d'elle, de nombreux jeunes habillés de noir, certains cagoulés, certains maquillés en clown scandant des slogans anti-Vinci - le concessionnaire de l'aéroport - et prônant le "sabotage". Mais Madeleine, pas plus que pas mal d'autres personnes âgées, ne semblent effrayées, car l'ambiance reste conviviale et festive, ainsi que l'avaient souhaité les organisateurs.

Sur quelque 5 km, le défilé s'étire du bourg de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) jusqu'à un champ et un bois, choisis au coeur de la zone d'aménagement différé (ZAD), pour réimplanter des opposants après la destruction d'une trentaine de squats par les forces de l'ordre, au cours des semaines passées.

La "réoccupation" des lieux, objet de la manifestation, a été minutieusement préparée: tout le nécessaire pour construire de "nouveaux lieux de vie" a été chargé sur les remorques des tracteurs. Les opposants ont constitué au fond des bois une chaîne humaine dans la boue pour faire passer de mains en mains tôles, planches et plaques de contreplaqué.

Crêperies ambulantes

Plusieurs dizaines d'entre eux ont porté sur leurs épaules les très lourdes plateformes de bois qui serviront de plancher. Puis les cloisons se dressent peu à peu. Mais aucune photo ou vidéo de presse n'est autorisée, les médias étant parfois jugés complices du pouvoir.

Dans le champ en revanche, un immense chapiteau, dressé simultanément, est ouvert à tous et des baraques d'informations ou même des crêperies ambulantes s'installent.

Décidé par l'Etat, approuvé par les collectivités locales socialistes, le projet d'aéroport a cristallisé, bien au-delà de son territoire, des mécontentements contre la "violence" des forces de l'ordre, la société de consommation, la disparition des terres agricoles, les multinationales, le bétonnage et un modèle de développement jugé dépassé.

Comme le Larzac des années 70, qui succédait aux "Trente glorieuses", Notre-Dame-des-Landes est devenue la terre "à réoccuper". Et une victoire à arracher.

Christian Roqueirol, 58 ans, secretaire national de la Confédération paysanne, arrive de l'Aveyron où il est éleveur. Ancien squatteur du Larzac, il assure que cette lutte à "NDDL", comme on dit ici, "ressemble à celle menée par des paysans sur le plateau du Larzac" contre l'extension du camp militaire. "Au Larzac, ce sont les socialistes qui nous ont fait gagner. On ne comprend pas qu'aujourd hui ce sont le socialistes qui envoient les gendarmes pour déloger".

Plus jeune d'une quarantaine d'années, Baptiste, alias Toltek, perruque bleue sur la tête, enroulé dans un drapeau arc-en-ciel avec le mot paix, est venu de Paris comme il le fait régulièrement. "Pour apprendre à vivre en autonomie. Apprendre à construire sa maison, à faire son jardin, à gérer son eau", dit le jeune homme, qui a pris à 15 ans conscience que "le monde etait injuste, et qu'on creuse la tombe de nos enfants".

FRANCE 24 avec dépêches