Plus de 700 personnes se sont rassemblées, ce mardi, à la Défense, près de Paris, à l'appel de l'association pro-vie Alliance Vita pour dénoncer le projet de loi ouvrant aux homosexuels le droit au mariage et à l'adoption. Reportage.
Esplanade de la Défense. Plusieurs centaines de personnes sont assises par terre et brandissent des affiches rose vif. "D’un côté les papas, de l’autre les mamans", crie au micro l’un des organisateurs de l’évènement. Les participants ont été invités à arborer des couleurs distinctives : du blanc pour les femmes, du noir pour les hommes.
Une scène pour le moins inhabituelle pour les passants qui traversent, pressés, le quartier
d’affaires de l’ouest parisien à l’heure du déjeuner. Cette grande assemblée est là pour l’association pro-vie Alliance Vita, qui a lancé pour le mardi 23 octobre un appel à se mobiliser dans 75 villes de France contre le projet de loi ouvrant aux homosexuels le droit au mariage et à l'adoption qui doit être présenté en Conseil des ministres le 7 novembre prochain.
Pour tous, un seul mot d’ordre : "Remettre l’enfant au centre du débat". "Nous voulons avant tout susciter un débat, et interpeller l’opinion publique, parce que c’est un sujet qui concerne tous les Français", explique à FRANCE 24 Caroline Roux, la secrétaire générale d’Alliance Vita.
"Papa, Maman, on ne ment pas aux enfants !", scande en cœur l’assemblée, composée d’hommes et de femmes de tous âges. Certaines mères de famille ont même emmené leurs enfants.
Matthieu et Gilles sont trentenaires, ils écoutent, attentifs, les diverses interventions, un McDo à la main. "Cette espèce de droit à l’enfant, c’est intolérable !", s’indigne Gilles. Les deux cadres ont décidé de profiter de leur pause déjeuner pour rejoindre la manifestation. "Sous couvert d’égalité, on va tout dérégler", poursuit le jeune homme. "Il faut au moins un débat de toute la société sur un changement aussi grand", acquiesce Matthieu.
Au son de la célèbre chanson "Mama Mia" d’Abba, puis de celle de Joe Dassin "Tout bébé a besoin d’une maman", moins connue, les militants se mettent à agiter en rythme leurs pancartes. Éric, 30 ans, frappe des mains en rythme. Ce fonctionnaire ne travaille pas dans le quartier, mais il a fait un déplacement conséquent à l’heure du repas pour manifester son désaccord avec ce "mariage pour tous", qu’il considère comme "une menace pour l’équilibre sociétal".
Droit à l’enfant ou droits de l’enfant ?
Pour faire passer leur message, les membres d’Alliance Vita sont allés jusqu’à proposer une scénographie : un jeune garçon déguisé en oiseau représente l’enfant. Sur une aile, on peut lire "Papa", sur l’autre "Maman". Il s’avance en titubant dans "l’allée centrale", comme l’appelle l’organisateur. "L’enfant chancelle, le père le soutient", commente l’organisateur au micro. Les hommes assis par terre tendent tous les bras vers "l’enfant" et appelle à l’aide la mère. Les femmes prennent alors le relais pour le soutenir, jusqu’à ce qu’il tienne solidement sur ses jambes.
"Cette mise en scène symbolique montre la réalité intangible du fait que père et mère, dont nous sommes tous issus, sont complémentaires", affirme Tugdual Derville, délégué général d’Alliance Vita, en ouverture de son discours. Pour lui, un enfant confié à l’adoption a le droit et mérite d’avoir un père et une mère. "Nous nous félicitons de la parité au sommet de l'État mais on veut l'effacer là où elle est la plus élémentaire et indispensable", s’est encore exclamé Tudgual Derville. "Le droit à l’enfant va-t-il prendre le pas sur les droits de l’enfant ?", conclut-il, déclenchant un tonnerre d’applaudissement.
Au milieu de la foule des anonymes, un homme âgé hoche la tête et applaudit. Il s’agit du philosophe d’origine hongroise Miklos Vetö, qui a enseigné dans plusieurs universités à travers le monde et publié près d’une vingtaine d’ouvrages. Il s’inquiète de la perspective de voir le mariage légalisé pour tous les couples. "Une telle loi banaliserait l’institution du mariage qui est fondée sur l’association, la complémentarité de l’homme et de la femme", explique-t-il. Pour lui, c’est aberrant de penser que l’enfant puisse être élevé autrement que par un père et une mère "présents dès sa conception".
"Jamais je ne pensais qu’on en arriverait là", confie avec inquiétude Isabelle, mère de trois enfants. "Qu’on doive manifester pour préserver quelque chose qui semble si évident", s’indigne cette femme qui fait partie de l’équipe organisatrice. "Un enfant a le droit d’avoir un père et une
mère", répète-t-elle à l’instar de tous les autres militants, inlassablement.
Fondée en 1993 par Christine Boutin au moment des premières lois bioéthiques, l’association Alliance Vita, se dit désormais aconfessionnelle et émancipée de tout parrainage politique. Elle se veut "solidaire des plus fragiles", selon les termes de son slogan. Forte de plus de 37 000 soutiens en France, l’association ne compte pas en rester là. "On a appelé pour l’instant à manifester en province pour montrer l’ancrage de ce débat partout en France, mais plus tard viendra le temps des mobilisations parisiennes et nationales", explique M. Derville.