logo

Après sa piètre performance lors du premier face-à-face l'opposant à Mitt Romney, le président sortant entend montrer le visage d'un candidat combatif. Et reprendre une nouvelle fois l'ascendant sur son adversaire dans les sondages.

Grand amateur de sport et compétiteur patenté, Barack Obama sait qu’un match ne se joue pas en une seule manche. Auteur d’une inexplicable contre-performance lors du premier débat télévisé l’opposant à Mitt Romney, le 3 octobre, à Denver (Colorado), le président américain sortant entend bien profiter du second set qui lui sera offert mardi 16 octobre, à Hempstead (New York), pour montrer qu’il est, lui aussi, capable de monter au filet.

Pour l’actuel locataire de la Maison Blanche, l’enjeu est tel que son manque de mordant fut immédiatement sanctionné dans les sondages. Au lendemain de sa piètre prestation, Barack Obama, qui jusqu’alors récoltait le plus grand nombre d’intentions de vote, a vu sa courbe s’éroder de 3 à 4 points en faveur du républicain. Il aura fallu attendre une dizaine de jours, particulièrement anxiogènes pour le camp démocrate, avant que le président sortant ne commence à reprendre l’ascendant.

À en croire une enquête d’opinion d’ABC News/Washington Post publiée lundi 15 octobre, Barack Obama réunit, au niveau national, 49 % d'intentions de vote contre 46 % pour son rival. Une avance de 3 points qui demeure cependant inférieure à la marge d'erreur du sondage établie à 3,5 points. Plus concrètement, selon des données compilées ces dernières semaines par Reuters/Ipsos, le candidat démocrate récoltait, dimanche, 59 % des bulletins envoyés par correspondance dans le cadre du vote anticipé (contre 31 % pour Mitt Romney).

Pas de quoi faire dévier l’équipe de campagne d’Obama de son objectif le plus immédiat : éviter de réitérer les erreurs du 3 octobre. "Si par deux fois il trébuche, cela deviendra très embêtant pour lui", affirme Yannick Mireur, politologue spécialiste des États-Unis, auteur de l’ouvrage "Le Monde d’Obama" (éd. Choiseul, 2011).

La forme avant le fond

Retiré depuis ce week-end dans un complexe hôtelier cossu de Williamsburg, en Virginie, Barack Obama prépare ce second duel avec davantage de soin que le premier. Cette fois-ci, point de bachotage sur les chiffres du chômage ou le nombre de soldats en Afghanistan, on privilégie la forme. "Ce n’est pas quelqu’un qui a besoin d’être cuisiné sur les faits", a affirmé l’un de ses collaborateurs au "New York Times". Ce sur quoi il doit être entraîné, c’est le style."

Moribond à Denver, Barack Obama devra à Hempstead, veiller "à être davantage présent, à prendre moins de notes, à paraître moins cérébral, à passer en mode attaque plutôt que rester dans l’échange, indique Yannick Mireur. Il doit parvenir à traduire sa volonté de s’attaquer aux problèmes économiques du pays." Pour ce faire, le président sortant pourrait bien tirer profit du format de ce deuxième débat qui consistera, pour les deux candidats, à répondre aux questions d’un panel d’électeurs non partisans. Exercice dans lequel Barack Obama domine son adversaire, à qui les démocrates ont souvent reproché le manque d’empathie pour les classes populaires.

Mormon multimillionnaire ayant fait fortune dans la finance, Mitt Romney a longtemps été handicapé par son image de candidat peu aux prises avec le quotidien de ces concitoyens. Une perception que l’intéressé avait lui-même contribué à diffuser lorsque, à l’occasion d’un dîner de riches donateurs, il avait décrit les 47 % qui votent démocrate comme des "gens qui ne payent pas l’impôt sur le revenu" et qui "dépendent du gouvernement".

Soucieux d’infléchir cette impression, le républicain avait alors profité du premier débat pour effectuer un recentrage. "Romney resserre son discours vers le centre. Les Américains ont une mémoire courte et ont déjà oublié ses remarques sur les '47 %'. Contrairement au premier débat, Obama doit revenir là-dessus", commente Andrew Diamond, professeur spécialiste des États-Unis à l’université de Lille 3.

"Rester calme"

Son vice-président Joe Biden s’en est déjà chargé. Le 11 octobre, lors du débat télévisé l’opposant à son rival, Paul Ryan, l’ancien sénateur du Delaware s’est en effet appliqué à rappeler les désobligeantes déclarations du candidat républicain à la Maison Blanche. “J’en ai par-dessus la tête de cette notion de ‘47 %’", s’est-il emporté lors du face-à-face durant lequel il s’est montré particulièrement incisif. Seulement voilà, "Biden est Biden, observe Andrew Diamond. C’est un personnage proche du peuple, qui peut se montrer très direct. Obama ne peut pas faire du Biden."

De fait, les démocrates restent très prudents sur l’image que le chef de l’État sortant peut renvoyer à la classe moyenne, dont les deux candidats à la présidence se disputent le vote. "Obama va être très motivé, il essayera d’être quelqu’un de différent du premier débat tout en tâchant de rester calme, insiste Andrew Diamond. Le camp de Barack Obama a toujours peur qu’il apparaisse comme quelqu’un de condescendant. Obama est noir, diplômé de Harvard, a été professeur de droit, ce qui peut poser problème chez certains électeurs qui n’aiment pas qu’une personne de couleur sache mieux qu’eux."