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Joe Biden redonnera-t-il un coup de fouet à la campagne de Barack Obama ?

Après la contre-performance de Barack Obama face à Mitt Romney, les démocrates attendent de Joe Biden qu'il profite du seul duel contre son rival républicain, Paul Ryan, pour endiguer la baisse enregistrée par le président sortant dans les sondages.

D'ordinaire, les débats entre les candidats à la vice-présidence ne suscitent que peu d'intérêts. Mais dans cette campagne présidentielle 2012, l'unique face-à-face entre les colistiers Joe Biden et Paul Ryan, qui aura lieu le jeudi 11 octobre à Danville, dans le Kentucky, focalise toutes les attentions. Surtout depuis que la mauvaise performance de Barack Obama lors du premier débat télévisé a relancé son adversaire républicain Mitt Romney dans les sondages.

“Ce duel entre vice-présidents comporte des enjeux importants”, note Darrell West, politologue de la Brookings Institution, un "think tank" américain basé à Washington. À chaque camp ses défis à relever. Joe Biden, reconduit comme colistier par Barack Obama, devra tout faire pour arrêter l’hémorragie dans les sondages qui a suivi le premier débat. À l'inverse, Paul Ryan devra, lui, éviter tout impair qui pourrait mettre un coup d’arrêt à la belle dynamique de campagne de Mitt Romney.

Depuis le premier débat, Mitt Romney a comblé son retard sur Barack Obama dans les sondages. Selon une étude Reuters-Ipsos publiée mardi 9 octobre, le candidat républicain et le président sortant recueillent tous deux 45 % des intentions de vote à quatre semaines de l'élection présidentielle du 6 novembre. Pour la première fois, Romney prend même la tête dans deux études datant du début de la semaine, celle de l'institut Gallup le créditant d'une avance de deux points sur son rival et celle du Pew Research Center lui donnant quatre points d'avance.

"Biden ne devra pas laisser Ryan se réinventer"

Dans ce duel, qui devrait porter à la fois sur les questions nationales et internationales, l’actuel vice-président Joe Biden, 69 ans, aura la lourde tâche de saisir les opportunités manquées du président Obama d'attaquer les positions de Mitt Romney et de son jeune faucon de 42 ans. "Le vice-président ne devra pas laisser Paul Ryan se réinventer comme Mitt Romney l’a fait dans le premier débat", note Darrell West.

Pour parer à cette éventualité, Joe Biden aurait passé ces derniers jours enfermé dans un hôtel pour y mémoriser toutes les déclarations de Paul Ryan faites durant la convention républicaine ou lors d'interviews télévisées - il aurait même lu “Young Guns”, un livre co-écrit par Paul Ryan et un autre leader conservateur américain. Le vice-président serait donc prêt à dégainer si le républicain tente de jouer les modérés durant le débat, comme l'a fait Mitt Romney la semaine dernière. 

Le face-à-face promet d'être haut en couleurs car tout oppose ces deux hommes : Paul Ryan est connu pour être le chantre du conservatisme fiscal ainsi qu'un ardent défenseur d'une réduction des dépenses publiques et d'une baisse des impôts pour les plus riches tandis que Joe Biden, vétéran de la politique, proche des classes moyennes et ouvrières, se pose en défenseur des programmes sociaux et des droits des homosexuels. "Il y aura un profond contraste entre un expert du budget national et un expert de la politique étrangère, entre la jeunesse et l’expérience, et entre un membre de la Chambre des représentants et un sénateur devenu vice-président", constate John Fortier, politologue au sein du "think tank" de droite Bipartisan Policy Centre.

Gaffes interdites

Charmeur et blagueur, Joe Biden, avec qui beaucoup d'Américains estiment qu'ils pourraient partager une bière, devra quand même "faire attention à ne pas faire de gaffe, ou dire quelque chose qui pourrait brouiller son message initial", estime Darrell West. En août, lors d'un discours dans l'ancien État esclavagiste de Virginie, le vice-président avait assuré que les propositions de Mitt Romney sur les banques revenaient à "remettre des chaînes aux pieds des Américains".

Au début d'octobre, il a également lancé que la classe moyenne "a[vait] été dévastée ces quatre dernières années", soit durant le mandat de Barack Obama. Toutefois, en 2008, lors du débat l'opposant à la vice-présidente de l’époque Sarah Palin, Joe Biden n'était pas tombé dans le piège et était resté courtois face à une colistière provocatrice, prenant soin de ne pas paraître donneur de leçons.

Moins connu que son adversaire démocrate, Paul Ryan a plus à gagner que Biden, note pour sa part John Fortier. "Il n’est pas très expérimenté dans les débats, mais il est intelligent et parvient très bien à expliquer des sujets de politique compliqué de façon à se faire comprendre des électeurs", poursuit Darell West. Son objectif : montrer qu’il est au même niveau que Biden, résume John Fortier.

Le face-à-face n’aura néanmoins pas forcément d’effet dans les sondages sur les candidats, nuance John Fortier. "Ce n’est pas le débat Ryan-Biden qui permettra à Obama de rebondir", précise-t-il en soulignant que "les Américains votent pour leur président et non pour leur vice-président".