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Les Géorgiens se rendent aux urnes après le scandale des tortures en prison

Le parti du président pro-européen Mikheïl Saakachvili (photo) fait figure de favori aux élections législatives mais pourrait pâtir du scandale des mauvais traitements infligés dans les prisons.

Les bureaux de vote ont ouvert, lundi 1er octobre, en Géorgie à l'occasion des élections législatives où la formation du président Mikheïl Saakachvili, au pouvoir depuis 2003, part favorite malgré une situation économique contrastée et un récent scandale sur la maltraitance de détenus en prison.

Âgé de 44 ans, Mikheïl Saakachvili s’est engagé à quitter la présidence l’an prochain et ne devrait pas en profiter pour prendre le poste de Premier ministre. Mais une victoire de son Mouvement national uni (MNU) lui permettrait de rester influent dans les coulisses du jeu politique.

Un sondage publié en août et mené par l’Institut démocrate national (NDI), une ONG proche du Parti démocrate américain, donnait 37 % d’intentions de vote pour le MNU contre 12 % pour son principal opposant, le nouveau parti Rêve géorgien, fondé en avril par le milliardaire Bidzina Ivanichvili.

"Le parti au pouvoir a de nombreux soutiens parmi ceux qui ont peur du changement et valorise la stabilité. Ils ont gardé en mémoire l’époque d’avant, où c’était encore trop dangereux de marcher dans la rue et où les infrastructures ne marchaient qu’occasionnellement", explique Markus Meyer, le correspondant de FRANCE 24 à Tbilissi.

L’ancienne ministre des Affaires étrangères et activiste pro-démocratie Salomé Zourabichvili estime que c’est la peur qui risque de guider le choix des électeurs : "Même huit ans après les élections et vingt ans après l’indépendance, les électeurs sont effrayés. La Géorgie n’est pas vraiment un pays démocratique ; elle reste plutôt un pays postsoviétique, explique t-elle sur l’antenne de FRANCE 24. Ce n’est qu’à la condition d’un équilibrage des pouvoirs entre le parti du président et l’opposition que les choses pourraient commencer à changer".

Le scandale des prisons

Pour les observateurs, le Mouvement national uni du président Mikhaïl Saakachvili devrait l’emporter mais la campagne a connu un rebondissement la semaine dernière avec la diffusion à la télévision d’images de maltraitance de détenus dans une prison du pays.

En effet, la diffusion à la mi-septembre d’une vidéo montrant des gardiens de prison en train de battre, d’humilier et de violer des détenus a provoqué un véritable scandale dans le pays, poussant les ministres de l’Intérieur et de l’Administration pénitentiaire à démissionner après que des milliers de personnes ont manifesté dans les rues de Tbilissi. 

Le scandale a terni l’image réformatrice sur laquelle fait campagne le gouvernement de Mikheïl Saakachvili, proche des puissances occidentales depuis la Révolution de la rose de 2003 qui a chassé du pouvoir le président Édouard Chevardnadzé.

Le gouvernement de Mikheïl Saakachvili a invité ses opposants à ne pas faire du scandale un enjeu politique. Il préfère mettre en avant ses réussites économiques, notamment la reprise de la croissance depuis 2010, même si l’inflation a atteint 11,2 % l’an dernier.

Réussites économiques pour tous ?  
L’opposition n’a cependant pas hésité à s’en saisir, accusant notamment le gouvernement d’avoir abandonné une partie de sa population qui n’a pas pu profiter des améliorations dans le pays. "Beaucoup de gens sont déçus par le parti au pouvoir. De nombreux Géorgiens sont toujours très pauvres et se sont sentis exclus de la croissance qu’a connu le pays", poursuit Markus Meyer.
Bidzina Ivanichvili, chef de file de l’opposition en Géorgie et propriétaire de l’une des chaînes sur lesquelles les images ont été diffusées, a profité de la polémique pour remettre en cause l’image de réformateur de Saakachvili et a estimé que les Géorgiens devraient choisir entre "le bien et le mal" lors des élections du 1er octobre.
Il s’est néanmoins engagé à ne pas provoquer de troubles si sa coalition perd à l’issue d’un scrutin équitable.
"Si nous n’obtenons pas le résultat espéré et que la communauté internationale reconnaît que le scrutin a été juste, alors nous accepterons le résultat quel qu’il soit", a dit cet homme d’affaires milliardaire, fondateur et chef de file de la coalition Rêve géorgien qui se dit prêt, en cas de victoire, à cohabiter avec Mikhaïl Saakachvili, dont le second et théoriquement dernier mandat présidentiel s’achève en 2013.

FRANCE 24 avec dépêches