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Comble de la contrefaçon : impressionnés par la bourgade autrichienne d’Hallstatt, classée au patrimoine mondiale de l’Unesco, des promoteurs immobiliers l’ont reconstruite à l’identique dans le sud de la Chine.
Dorénavant, il ne faudra plus dire Hallstatt, mais Hallstatt l’originale. Ce petit village de 800 habitants niché dans les Alpes autrichiennes et classé au patrimoine mondial de l’Unesco est, en effet, la première commune au monde a avoir été entièrement contrefaite par la Chine.
Elle est devenue un quartier de luxe dans la ville de Boluo, dans la province de Guangdong, au sud de la Chine. Ce Hallstatt sino-compatible a été inauguré samedi 3 juin en présence d’une délégation européenne emmenée par Alexander Scheutz, le maire socio-démocrate du petit village autrichien. “C’était plutôt impressionnant de voir le résultat et je n’étais pas peu fier de voir une réplique de ma ville aussi loin de chez moi”, raconte à FRANCE 24 l’édile autrichien.
C’est le souci du détail dans la reproduction qui a particulièrement frappé Alexander Scheutz. “Même la place du marché est légèrement penchée comme chez nous”, souligne-t-il. Les Chinois ont également fait construire un lac artificiel de la même dimension et de la même forme que le Hallstättersee (lac de Hallstatt).
Malgré la démesure du projet sur le papier, la réalisation n’a, au final, pris qu’un an... et beaucoup d’argent. C’est un entrepreneur de Hong Kong qui a dépensé 940 millions de dollars pour voir son rêve immobilier se réaliser, projet sur lequel les habitants d’Hallstatt l’originale n’ont d’ailleurs pas beaucoup été consultés. “Nous n’avons absolument pas été associés à la réalisation de ce projet, je me souviens seulement avoir reçu un appel en mai dernier de Hong Kong et puis j’ai vu les plans deux mois plus tard”, raconte Alexander Scheutz, qui n’en tient pas rigueur pour autant à ses nouveaux compatriotes chinois.
Attirer des riches
Certes, au début, l’absence de consultation a pu déconcerter quelques habitants de ce bourg qui a 2000 ans d’existence. “La propriétaire de l’hôtel sur la place du marché a reçu un jour sans crier gare les plans de la replique de son établissement en Chine, ça l’a un peu décontenancé”, se rappelle le maire de la Hallstatt. La hiérarchie religieuse n’a pas non plus été ravie d’apprendre qu’on copiait l’église de la commune - “une maison de Dieu”, comme le soulignait le prêtre du lieu, Richard Czurylo, dans le journal autrichien “Die Presse” en 2011 - pour un projet immobilier.
Surtout, certains se demandent pourquoi Hallstatt ? Il existe pourtant d’autres villages classés au patrimoine mondial de l’Unesco. Alexander Scheutz n’a pas de réponse définitive mais souligne que “Hallstatt reçoit plus de 800 000 visiteurs par an dont une grande partie viennent d’Asie, ce qui fait que le village doit être assez populaire”.
Les autorités de Boluo ont, en tout cas, été très claires sur ce qu’elles voulaient faire de la version chinoise du pittoresque village autrichien. Lors de son inauguration, elles ont souligné qu’elles espéraient qu’Hallstatt attirerait une population aisée qui viendrait rehausser le standing de cette ville de 800 000 habitants. Sur les 400 maisons de cette reconstitution grandeur nature, 140 auraient déjà trouvé preneur à raison de 1425 dollars par habitation (deux fois le prix du marché local) croit savoir le site américain artsinfo.com. Une montée en gamme qui devrait également permettre à Boluo “d’attirer davantage de touristes aussi bien chinois qu’étrangers”, souligne pour sa part le quotidien allemand "Der Spiegel".
Si Hallstatt est la première ville à subir un décalque intégral, la Chine n’en est pas à son coup d’essai en matière de contrefaçon urbaine. Autour de Shanghaï, des promoteurs immobiliers ont déjà fondé des ensembles censés rappeler le style architectural d’une ville britannique pour l’un et allemande pour l’autre. Cette dernière tentative s’est soldée par un échec et la ville germano-chinoise est devenu une ville fantôme.