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Reconduit à la tête du Majlis, Ali Larijani tient la corde pour la présidence en 2013

Ali Larijani a été réélu lundi à la tête du Parlement iranien. Le chef de file de l'opposition se trouve désormais en position idéale pour préparer la présidentielle de 2013 face au président sortant, Mahmoud Ahmadinejad, de plus en plus impopulaire.

Le résultat des élections législatives, au début du mois de mai, avait laissé entrevoir la possibilité d’un retour en grâce du président Mahmoud Ahmadinejad au sein du Majlis. L’hypothèse est désormais totalement écartée.

La réélection lundi d’Ali Larijani à la tête de l’appareil législatif du pays, a confirmé la mainmise du clan ultraconservateur religieux "anti-Ahmadinejad" sur l’hémicycle.

Le 6 mai, les deux coalitions conservatrices avaient confirmé leur domination sur le Majlis, sans pour autant qu’une majorité pro ou anti-Ahmadinejad ne puisse officiellement se dégager.

Au soir du scrutin, le Front uni (anti-Ahmadinejad) revendiquait 65 députés et le Front de la persistance (pro-Ahmadinejad) était crédité de 25 sièges.

Levée de voile

L’inconnue provenait en réalité de l’orientation globale de deux autres factions : les 98 "indépendants" et les 61 députés présents simultanément dans les deux coalitions. Elle est désormais levée.

Avec 175 voix, contre 100 pour son adversaire Gholam-Ali Haddad-Adel, Larijani dispose d’un soutien suffisant pour continuer son entreprise de décrédibilisation du gouvernement en place.

Et surtout, il a plus que jamais les mains libres pour préparer la victoire de son camp à la présidentielle de juin 2013. Un scrutin qu’il abordera, sauf coup de théâtre, en position de favori, explique Thierry Coville, chercheur à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris) et enseignant à l'école Novancia : "C’est sûr qu’il est en position idéale pour briguer le prochain mandat présidentiel. Il est la figure principale de la ligne dominante actuelle, qui affiche un soutien sans faille au Guide."

Favori

Cette réélection sans contestation possible vient en tout cas parachever l’œuvre d’Ali Larijani dans l’opposition. Déjà, parce que le nouveau "favori" de l’establishment chiite iranien a lourdement vaincu le "candidat d’Ahmadinejad", comme le souligne Thierry Coville : "Haddad-Adel, qui était le prédécesseur de Larijani au Parlement (entre 2004 et 2008, ndlr), a toujours adopté une ligne qui allait dans le sens de la présidence d’Ahmadinejad. Une position aujourd’hui largement minoritaire au Majlis."

Surtout, parce qu’elle le consacre définitivement en leader de l’opposition, à seulement un an de la présidentielle.

Cette victoire symbolique constitue le point d’orgue – à défaut de point final – d’une lutte politique au sommet de l’État qui a vu les deux clans s’écharper sur plusieurs dossiers, notamment le contrôle des ministères du Pétrole et du Renseignement ou le supposé "déviationnisme" idéologique du président et de ses proches.

Fin de règne annoncée

À l’inverse, l’érosion du soutien dont dispose le clan Ahmadinejad semble inéluctable. Des tractations ont été récemment menées dans l’entourage du Guide sur la possibilité de destituer Ahmadinejad de la présidence avant le terme de son mandat. Ce scénario semble désormais écarté. Mais pour le président sortant, la marge de manœuvre apparaît de plus en plus réduite.

Déjà fragilisé par un bilan économique désastreux, Ahmadinejad sait que ses adversaires n’hésiteront pas à employer la tribune du Majlis pour le pousser vers la sortie en 2013.

En mars, il avait été contraint à venir s’expliquer sur son bilan devant les parlementaires. Une première depuis la Révolution islamique de 1979 et un camouflet qui en disait déjà long sur le soutien dont il jouit depuis plusieurs mois.

"Son influence a très nettement diminué depuis plusieurs mois. Il terminera son mandat comme c’est la tradition en Iran, mais il n’a que très peu de chances d’être reconduit en 2013. Même chose pour son bras droit Esfandiar Rahim Mashaie, lui aussi victime des campagnes de déstabilisation menées par l’opposition", explique Thierry Coville.

En pole position

Avec la lente décrépitude du clan Ahmadinejad, l’avenir semble donc favorable à Larijani. C’est du moins l’analyse naturelle qui découle des derniers événements, même si Thierry Coville assure que "rien n’est joué".

"Il y a de nombreux autres conservateurs qui ont également des ambitions présidentielles, comme par exemple le maire de Téhéran Mohammad-Bagher Ghalibaf. Et en Iran, les lignes bougent très vite. Il peut toujours y avoir des surprises, comme en 2005 lorsqu’Ahmadinejad avait été porté au pouvoir", tempère l’analyste.

Il reste à Ali Larijani douze mois pour mener à bien deux missions essentielles pour son avenir politique : accompagner et entretenir la fronde contre le président sortant et ses alliés, mais surtout s’assurer que les ambitions politiques de certains conservateurs n’auront pas trop d’incidence sur son leadership.