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Arrestation au Vatican d'une "taupe" présumée

Le Vatican a annoncé l'arrestation d'un homme dans le cadre d'une enquête sur des fuites embarrassantes pour l'État pontifical. L'individu, qui serait le majordome des appartements du pape, était en possession de documents confidentiels.

AFP - Des dizaines de documents secrets du Vatican sur la place publique, une "taupe" interpellée, le banquier du pape limogé : le Saint-Siège a connu une semaine difficile, révélatrice de tensions mais aussi de la volonté de réformes qui travaille le plus petit Etat du monde.

Dernier épisode en date: une personne "en possession illégale de documents

confidentiels" a été arrêtée par la gendarmerie vaticane, a annoncé vendredi le Vatican.

Selon des sources informées, il s'agit de Paolo Gabriele, le majordome des appartements du pape, l'une des rares personnes en contact direct avec Benoît XVI.

Jeudi soir, un spectaculaire vote de défiance du Conseil d'administration de l'Institut pour les oeuvres de religion (IOR), la banque du Vatican, avait mis à la porte son président, Ettore Gotti Tedeschi.

En 2009, la nomination de ce laïc catholique, expert de "l'éthique de la finance", apprécié du pape qu'il avait conseillé en 2009 pour son encyclique sociale "Caritas in Veritate", avait apporté l'espoir d'un assainissement des finances du Vatican.

Il est rare qu'un haut responsable soit licencié de façon aussi brusque et aussi retentissante. Il lui est reproché de "n'avoir pas su remplir certaines fonctions de première importance".

Parmi les pistes citées par la presse italienne, figurent des désaccords entre lui et le cardinal Tarcisio Bertone sur plusieurs affaires concernant les intérêts financiers du Saint-Siège en Italie et la possibilité que M. Gotti Tedeschi ait révélé certains documents, dans un désir de transparence.

Aucune de ces hypothèses n'est confirmée, M. Gotti Tedeschi et le Vatican observant le silence.

Samedi dernier était sorti en Italie un livre choc, "Sua Santita" ("Sa Sainteté"), reproduisant des dizaines de fax ultra-secrets dont le pape était le destinataire ou avait eu connaissance et que des "gorges profondes" ont ensuite livrés à l'auteur, le journaliste Gianluigi Nuzzi.

Ces documents illustrent de nombreux débats internes, par exemple sur la situation fiscale de l'Eglise en Italie, les finances des instituts catholiques, les scandales sexuels chez les Légionnaires du Christ ou encore les négociations avec les intégristes.

Alors qu'une commission d'enquête dirigée par trois cardinaux est au travail sur les fuites intervenues en janvier, ce livre a donné lieu à une réaction furibonde du Saint-Siège qui a menacé de poursuites en Italie.

Une réaction qui peut surprendre car les documents publiés, dont plusieurs sont des notes de Gotti Tedeschi, ne sont souvent pas des surprises, même s'ils révèlent de fortes tensions entre cardinaux.

Complot? 
             

La chute de cet homme respecté qui voulait transformer l'IOR en une banque modèle, survient à un moment crucial: début juillet, un groupe d'experts européens doit décider si le Vatican peut rejoindre la liste des Etats transparents dans la lutte anti-blanchiment, la "White list".

Impliqué dans les années 1980 dans des scandales sulfureux mêlant mafia, loge maçonnique et services secrets, l'IOR a repoli son image sous le pontificat de Benoît XVI, en s'efforçant de remplir les critères contre le recyclage. Une nouvelle législation a été adoptée mais elle a été retouchée, apparemment pour limiter la possibilité d'enquêtes rétroactives, ce qui aurait mécontenté le banquier italien.

Le pape allemand, qui a fait de la rigueur une priorité, a créé en 2010 une Autorité d'information financière (AIF), mais ses pouvoirs seraient aussi au coeur de discussions serrées.

Ce qui inquiète le plus la Curie romaine est que plusieurs personnes bien placées dans l'appareil aient décidé de trahir. Est-ce un complot systématique pour discréditer le Vatican?

Gianluigi Nuzzi a présenté ses sources comme des héros qui ont "souffert" profondément de devoir trahir mais ont été animées par le désir d'éradiquer la corruption du Vatican. Une thèse violemment contestée par certaines voix au Saint-Siège.

Le théologien de gauche italien Vito Mancuso voit une conjuration pour "éliminer Bertone". Une thèse qui circule depuis le début de l'affaire sur le secrétaire d'Etat Tarcisio Bertone, numéro deux du Vatican, jugé honnête mais critiqué pour sa gestion jugée maladroite.

Ce Salésien a la confiance du pape mais de solides inimitiés dans l'appareil.

Une hypothèse avancée est celle d'un complot d'une "vieille garde" anti-Bertone de cardinaux proches de Jean Paul II, qui regrettent une époque où le Saint-Siège avait une voix plus forte... et moins sourcilleuse sur la transparence.
 

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