Les traditionnels défilés du 1er-Mai se sont déroulés en Europe sur fond de crise sociale. De Madrid à Athènes, où se tiendront dimanche 6 mai des élections législatives, ils ont été marqués par une forte mobilisation contre les mesures d'austérité.
REUTERS - Des dizaines de milliers de personnes ont défilé mardi dans le sud de l'Europe pour protester contre les mesures d'austérité à l'occasion du 1er-Mai, qui a pris cette année un tour particulier à quelques jours des échéances électorales en Grèce et en France.
En France, à cinq jours du second tour de l'élection présidentielle entre Nicolas Sarkozy et François Hollande, près de 290 cortèges sont annoncés par la CGT, dont l'un dans l'après-midi à Paris, où les marcheurs auront été précédés par une manifestation du Front national et où se tiendra au même moment un meeting politique organisé par le président sortant.
L'intersyndicale (CFDT, CGT, FSU, Solidaires et Unsa) a promis qu'il n'y aurait pas de message politique sur les banderoles des défilés mais la CGT, à la différence des autres organisations, a appelé à "battre Nicolas Sarkozy".
"Contre les politiques d'austérité, travailleurs unis, pour le progrès social", pouvait-on lire sur la banderole ouvrant le cortège mardi matin à Marseille, où les syndicats ont estimé la mobilisation à 20.000 personnes.
A Athènes, où des législatives anticipées auront lieu ce dimanche, les manifestants entendaient eux aussi protester contre l'austérité qui frappe leur pays depuis l'éclatement de la crise de la dette fin 2009.
Les coupes budgétaires réclamées par les bailleurs de fonds de la Grèce en échange d'une aide financière se conjuguent à la récession pour créer un climat de forte tension sociale.
Les salaires du secteur privé ont baissé d'un quart dans la seule année 2011 et le taux de chômage a grimpé à un niveau record de 21%.
"Les politiciens ne peuvent rien pour nous"
En fin de matinée, ils étaient environ 5.000 salariés, retraités et étudiants défilant pacifiquement en direction du Parlement grec sous des bannières réclamant "La révolte maintenant !" ou "Taxer les riches !"
Les deux principaux syndicats du public et du privé, Adedy et GSEE, qui ont lancé un appel à la grève générale, ont donné rendez-vous pour un rassemblement unitaire à Athènes. Le syndicat PAME, affilié au Parti communiste, s'est réuni à l'écart, devant une aciérie.
La police grecque s'est préparée à parer à d'éventuelles incidents place de la Constitution, face au Parlement, théâtre régulier d'affrontements entre forces de l'ordre et protestataires. La capitale grecque n'a cependant pas connu de troubles importants depuis l'adoption d'un impopulaire nouveau programme d'austérité en février et aucun problème n'était signalé mardi à la mi-journée.
Les bus, les trains et le métro d'Athènes étaient à l'arrêt mardi matin, les employés des transports observant une grève de 24 heures. Les marins marquaient un arrêt de travail de quatre heures, les administrations étaient fermées et les hôpitaux fonctionnaient en service restreint.
Les législatives s'annoncent difficiles pour les deux principaux partis du pays, le Pasok (socialiste) et Nouvelle démocratie (conservateur), qui espèrent recueillir un soutien suffisant pour renouveler leur coalition favorable aux plans de sauvetage.
Plusieurs dizaines de formations opposées aux exigences des bailleurs de fonds se présentent également au choix des électeurs grecs, qui se disent majoritairement hostiles à l'austérité tout en étant favorables au maintien de la Grèce dans la zone euro.
"Les politiciens ne peuvent rien pour nous, ils n'ont rien de nouveau à nous dire, ils ont approuvé le paquet de mesures d'austérité et le plan de sauvetage: nous allons leur tourner le dos", prévient Dina Bitsi, une retraitée de 58 ans dont les deux fils sont au chômage.
"Nous voulons rester dans l'Union européenne, conserver l'euro. Nous avons conscience de la crise, mais il est inacceptable qu'en ce moment même, les riches s'enrichissent tandis que les pauvres s'appauvrissent", poursuit-elle.
"Contre l'exploitation et l'appauvrissement"
Comme en France et comme en Grèce, la fête du Travail est teintée de colère et d'exaspération en Espagne, au Portugal ou bien encore en Italie face aux politiques d'austérité censées rétablir les finances publiques mais considérées comme autant de
freins à la croissance.
Au Portugal, où la récession a porté le chômage à un niveau sans précédent de 15% de la population active, les deux principaux syndicats du pays tablaient sur la mobilisation de plusieurs dizaines de milliers de personnes à Lisbonne et dans les autres grandes villes du pays.
La CGTP, qui revendique 700.000 adhérents, a refusé de signer la réforme du marché du travail négociée dans le cadre du plan de sauvetage de 78 milliards d'euros accordé par l'UE et le Fonds monétaire international.
Elle appelle ses partisans à manifester sous le slogan "Contre l'exploitation et l'appauvrissement, pour un changement politique".
L'UGT, qui a signé pour sa part le pacte sur le marché du travail, réclame elle "Croissance et Emplois, Justice sociale".
Les syndicats espagnols ont appelé eux à manifester dans plus de 80 villes avec comme mot d'ordre du travail, de la dignité et le respect des droits.
Mais la mobilisation pourrait être réduite dans ce pays où le taux de chômage frôle les 25%, le double pour les jeunes de moins de 25 ans: des manifestations ont déjà eu lieu dimanche dernier contre les économies annoncées par le gouvernement de
droite de Mariano Rajoy dans les budgets de la santé et de l'éducation.