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Anders Behring Breivik, le tueur qui aimait World of Warcraft

En affirmant s'être servi de World of Warcraft pour planifier le massacre de 77 personnes en Norvège, en juillet dernier, Anders Behring Breivik ressuscite la polémique sur l'influence néfaste des jeux vidéo violents sur le comportement des jeunes.

Et au quatrième jour de son procès, il invoqua les jeux vidéo. L’extrémiste de droite Anders Behring Breivik, actuellement jugé pour le meurtre de 77 personnes l’an dernier en Norvège, a détaillé, ce jeudi 19 avril, comment la pratique assidue de World of Warcraft (WoW) et de Call of Duty : Modern Warfare (CoD:MW) l’aurait aidé “à se préparer mentalement” à commettre son crime.

Répondant aux questions du procureur, il a expliqué comment le plan élaboré pour commettre son massacre avait germé dans son esprit dès 2006, une année qu’Anders Behring Breivik a essentiellement passé devant son écran d'ordinateur à parcourir le monde virtuel du très populaire WoW, un jeu de rôle en ligne massivement multijoueurs (MMORPG) auquel s’adonnent près de 10 millions de personnes dans le monde. Cette année-là, le jeune Norvégien, alors âgé de 27 ans, vivait chez sa mère et jouait jusqu’à 17 heures par jour à WoW.

"Certains rêvent de faire le tour du monde à la voile, certains rêvent de jouer au golf. Moi, je rêvais de jouer à World of Warcraft", s’est justifié l’accusé au sujet de ce MMORPG où il s’agit de tuer des monstres à la chaîne et d’explorer des donjons en compagnie d’autres joueurs. “Ce n’est pas un jeu violent du tout”, a-t-il précisé, évoquant la dimension “stratégique” du jeu en coopération. Anders Behring Breivik a ajouté qu’il trouvait moins de plaisir à pratiquer le jeu de guerre et de tir subjectif CoD:MW mais qu'il était, d’après lui, “pratique pour s’entraîner” à viser avec une arme. À la même époque, il fréquentait également un club de tir.

Cette référence faite à l’univers vidéoludique remet sur le tapis l’éternel polémique concernant l’influence néfaste que pourraient avoir les jeux vidéo dits violents sur les jeunes. Ces dernières années en effet, plusieurs faits divers ont déjà suscité un tel débat. Ainsi, les deux adolescents responsables du massacre de Columbine (États-Unis), en 1999, ont été décrits comme étant “obsédés” par le jeu de tir Doom. Le jeune Néerlandais qui s’est suicidé après avoir tué six personnes, en avril 2011, dans un centre commercial était, quant à lui, un joueur de CoD:MW.

Lien de cause à effet ?

De là à établir un lien de cause à effet entre la violence à l’écran et le passage à l’acte, il y a un pas que beaucoup refusent pourtant de franchir. À commencer, bien sûr, par la communauté des joueurs qui connaissait l’expérience d’Anders Behring Brevik dans WoW depuis le mois d'octobre 2011. Sur les forums de discussions, tout le monde rejette, ce jeudi, l’amalgame. “Il y plusieurs millions de personnes sur WoW, il est inéluctable qu’on trouve aussi des déséquilibrés dans le lot”, remarque ainsi l’un d’eux, résumant le sentiment général.

Plusieurs études scientifiques ont également cherché, sans succès, à savoir s’il était possible d’établir un lien entre jeux vidéo et comportements violents. Les plus récents travaux sur la question, publiés en février 2012 dans le magazine américain Journal of Psychiatric Research et dans la revue Media Psychology en septembre 2011, concluent à une absence de liens.

En outre, Anders Behring Breivik lui-même a abordé la question des jeux vidéo dans son manifeste de 1 500 pages censé expliquer son acte, comme le rappelle le magazine britannique Time dans son édition du 17 avril. Il y “explique de manière très cynique comment dire qu’on joue à World of Warcraft peut aider à se faire passer pour anti-social”, note le journal britannique. Ce qui lui permettait, explique-t-il, de préparer son projet sans être dérangé.