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À Damas, les observateurs de l'ONU préparent leur délicate mission

Les premiers observateurs de l'ONU chargés de superviser l'application du plan de paix de Kofi Annan en Syrie sont arrivés à Damas alors que l'armée de Bachar al-Assad, faisant fi du cessez-le-feu, pilonnait ce lundi la ville de Homs.

AFP - De violents combats ont opposé lundi soldats syriens et déserteurs et des bombardements ont repris à Homs, au premier jour de la mission d'observateurs internationaux chargés d'évaluer le respect d'un fragile cessez-le-feu, après 13 mois de contestation réprimée dans le sang.

Treize civils ont péri à travers le pays, selon une ONG, l'ambassadrice américaine à l'ONU Susan Rice avertissant que la mission des observateurs serait remise en question si la violence persiste après que les Occidentaux ont dit douter de la volonté du régime de renoncer à la répression.

Les combats se sont déroulés à Idleb (nord-ouest) où quatre civils ont péri, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). A Homs (centre), dont 30% échappent encore au contrôle du pouvoir, l'armée a bombardé au mortier les quartiers de Khaldiyé et de Bayada tenus par les rebelles.

Des civils ont également été tués à Hama (centre) et Deraa (sud).

Dans le même temps, des manifestations massives anti-régime ont eu lieu, selon des vidéos mises en ligne par les Comités locaux de coordination (LCC), qui animent la mobilisation sur le terrain.

Une vidéo a montré des centaines de manifestants à Idleb "dénonçant la capitulation internationale" et "soutenant Homs et les régions visées" par les forces du régime du président Bachar al-Assad qui ne reconnaît pas la contestation et dit vouloir en finir avec "les gangs terroristes".

La mission, votée samedi à l'unanimité par le Conseil de sécurité de l'ONU, s'annonce à haut risque pour les six observateurs non armés déjà sur le terrain sous la direction du colonel marocain Ahmed Himmiche.

"Pas de cessez-le-feu, pas même le début d'un processus politique: cette mission sera l'une des plus difficiles jamais entreprises par l'ONU", a estimé un diplomate onusien, même si les bilans des victimes sont nettement inférieurs à ceux des jours précédant l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 12 avril.

Selon l'OSDH, les violences ont fait une soixantaine de morts depuis le début de la trêve, alors qu'auparavant les morts se comptaient chaque jour par dizaines. En 13 mois de révolte qui s'est militarisée face à la répression, 11.100 personnes ont péri en majorité des civils, selon cette ONG.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a exhorté Damas à la "retenue maximale" et l'opposition à "pleinement coopérer" pour faire réussir le cessez-le-feu.

La résolution 2042, la première adoptée par le Conseil de sécurité sur la Syrie depuis le début de la crise le 15 mars 2011, prévoit le déploiement dans les prochains jours de 30 observateurs militaires et stipule que Damas est responsable de leur sécurité.

L'émissaire de la Ligue arabe et de l'ONU, Kofi Annan, auteur du plan de paix, souhaite l'envoi à terme de plus de 200 observateurs en Syrie, mais cela nécessitera une nouvelle résolution et un arrêt total des violences.

La première tâche des observateurs sera "d'établir un quartier général opérationnel" à Damas, selon l'ONU. Ils prendront ensuite contact avec le gouvernement et l'opposition afin d'expliquer leur rôle, puis se rendront dans d'autres villes pour y établir des bases.

La Syrie a approuvé cette mission "car elle n'a rien à cacher et elle espère que ces observateurs vont transmettre l'image réelle de ce qui se passe sur le terrain", a annoncé l'agence officielle Sana.

Les LCC ont appelé à la création d'une "hot-line" entre les militants sur place et les observateurs pour faciliter la surveillance.

Outre l'arrêt des hostilités, le plan Annan prévoit le retour de l'armée dans les casernes, le droit de manifester pacifiquement, la libération des dizaines de milliers de personnes arrêtées et la libre circulation des médias étrangers.

Selon les militants, les chars sont toujours dans les villes et l'armée n'a pas levé ses barrages.

De plus, les arrestations se poursuivent: l'OSDH a rapporté l'arrestation d'une journaliste, Marie Issa, et de son mari à leur domicile près de Damas. Anouar Bounni, avocat des droits de l'Homme, a fait état de la détention de 42 jeunes qui avaient manifesté jeudi devant le Parlement à Damas.

Après sa visite à Moscou la semaine dernière, le chef de la diplomatie syrienne Walid al-Mouallem s'est rendu en Chine, l'autre allié du régime.

A Genève, la Commission d'enquête sur la Syrie, mise en place par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU, a dénoncé des "tueries extra-judiciaires de soldats capturés" commises par les rebelles et s'est dite "sérieusement préoccupée" par le pilonnage de Homs et l'utilisation d'armes lourdes par l'armée.

Enfin, des représentants de tribus syriennes opposées au régime, ont annoncé à Istanbul qu'elles unissaient leurs efforts au sein d'une "Assemblée de tribus".