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Les pétrodollars qataris sont-ils bons pour l'emploi français ?

Le rapport annuel sur les investissements directs étrangers créateurs d’emplois ne mentionne pas l’avalanche de pétrodollars qataris. Pourtant, ces investissements de l’émirat ont un impact sur l'emploi.

Ces dernières semaines, les pétrodollars qataris semblent se déverser sans discontinuer sur l’économie française. Les largesses financières de cet émirat du golfe ont profité dernièrement au groupe Lagardère, dont le Qatar détient depuis lundi 19 mars plus de 12%, ou encore au géant du luxe LVMH dont il a acquis 1,03%. L'émirat est également devenu, mercredi 14 mars, l’un des principaux actionnaires du pétrolier Total.

Des millions d’euros investis en France qui sont les grands absents du bilan 2011 es’investissement direct étranger (IDE) créateurs d’emplois dressé, mercredi 21 mars, par le ministre français de l’Économie François Baroin. Le Qatar n’est cité à aucun moment dans ce rapport annuel, établi à à partir des données de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII). Il est, en fait, classé sous la rubrique “autres pays” dans le chapitre traitant de l’origine géographique des projets d’IDE. Cette catégorie, qui comprend les pays du Golfe et d'Afrique ne représente, selon ce document, que 4% des projets créateurs d’emplois en France.

“Les États comme le Qatar font essentiellement des investissements financiers qui ne sont pas recensés comme créateurs d’emplois en France”, a expliqué, lors de cette présentation, David Appia, le président de l'AFII. Bercy préfère mettre en avant l’argent provenant d’Allemagne, des États-Unis, de l’Italie et de la Suisse qui sont “responsables de plus de la moitié des nouveaux investissements créateurs d’emplois en France en 2011”, souligne le rapport. “Ces 698 projets étrangers ont permis de créer ou de sauvegarder 27 958 emplois”, s’est réjoui François Baroin.

Création d'emplois

“Ce discours très prisé des politiques de dire que les investissements directs étrangers qui se traduisent par des créations d’entreprises sont meilleurs que les investissements financiers [comme ceux du Qatar, NDLR] traduit une vision très comptable et à court terme de la situation”, regrette Thierry Mayer, profresseur en économie à Sciences-Po Paris, contacté par FRANCE 24.

Pour ce spécialiste, les investissements qataris ne sont pas forcément moins bons pour l’emploi que tous ces IDE "créateurs d'emplois" retenus par le rapport annuel qui peuvent, eux, avoir des effets négatifs. “Il faut avoir une vision globale de la situation”, insiste Thierry Mayer. Lorsqu’une entreprise étrangère vient, ainsi, s’installer en France, elle y crée certes des emplois, mais comme elle gagne aussi en compétitivité sur le marché français, ses concurrents peuvent être amenés à déposer le bilan ou licencier pour rester dans la course.

“Un investissement étranger sous forme de prise de participation peut, de son côté, être très bénéfique à l’activité d’une entreprise et l’aider à plus ou moins long terme à créer des emplois”, rappelle Thierry Mayer. Il y a aussi des effets plus indirects. Ainsi, les investissements qataris dans le luxe ou dans Total “sont certes avant tout des placements financiers”, reconnaît Thierry Mayer, mais il renforce des secteurs à haute valeur ajoutée où les emplois sont difficilement délocalisables.