
Alors que Kofi Annan est attendu ce samedi à Damas, la veille, l'armée syrienne a lancé plusieurs assauts contre les opposants au régime de Bachar al-Assad, faisant près de cinquante morts dans la province d'Idleb, près de la frontière turque.
AFP - Les forces syriennes ont lancé plusieurs assauts contre des régions rebelles vendredi tuant près de 50 civils en majorité à Idleb, à la veille de la première mission à Damas de l'émissaire international Kofi Annan, selon des militants.
Alors que la répression ne montrait aucun signe de répit un an après le début de la révolte populaire contre le régime de Bachar al-Assad, l'opposition syrienne a annoncé la défection d'une dizaine d'officiers de l'armée, dont six généraux et quatre colonels, tout en minimisant sa portée.
M. Assad peut néanmoins toujours compter sur l'appui de son allié russe qui s'est opposé à un nouveau projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU, avant une réunion au Caire du chef de la diplomatie Sergueï Lavrov avec M. Annan puis samedi avec ses homologues arabes critiques de l'attitude russe.
Mettant à profit l'incapacité de la communauté internationale à parler d'une seule voix sur la Syrie, le régime Assad a envoyé ses forces mater les hauts lieux de la contestation, notamment à Idleb (nord-ouest), Homs (centre) et Hama (centre), selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Dans l'offensive la plus sanglante, 24 civils ont péri à Idleb, dont au moins 13 dans la localité d'Aïn Larose, a précisé l'ONG. D'autres villages ont également été attaqués.
Alors qu'un nombre important de chars étaient massés dans le district de Jabal al-Zaouia à Idleb, les militants pro-démocratie ont dit craindre une opération d'envergure semblable à celle à Baba Amr, quartier de Homs repris par l'armée le 1er mars après un mois de bombardements sanglants et dévastateurs.
"Le plus grand nombre de déserteurs (en Syrie) sont à Jabal al-Zaouia", a expliqué le chef de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.
Dans d'autres secteurs rebelles de la province de Homs, 16 civils ont été tués dont 10 dans la chute d'obus et de roquettes et trois dans la dispersion d'une manifestation antirégime. Quatre civils ont péri à Hama et un autre à Alep (nord) par des tirs sur les manifestants, a ajouté l'OSDH.
Comme tous les vendredis depuis le 15 mars 2011, des dizaines de milliers de Syriens sont descendus dans les rues. Alep, où les manifestants ont scandé "Assad Dégage!" ou "Assad, tes jours sont comptés, que Dieu maudisse ton âme", a connu sa plus grande mobilisation depuis un an, selon des militants.
Les manifestants ont aussi appelé à travers le pays à l'armement des rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL).
Avant son arrivée à Damas samedi, M. Annan, émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe, a estimé que "la solution ultime réside dans un règlement politique", et mis en garde contre davantage de militarisation qui aggraverait la situation, une position répétée par les Etats-Unis et la France.
M. Annan, qui avait dit qu'il délivrerait un "message clair" au pouvoir syrien sur le fait que les violences "doivent cesser et les agences humanitaires" avoir accès à la population, aura la tâche ardue tant les positions des protagonistes sont éloignées.
Le régime Assad ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation et se targue du "soutien du peuple syrien" pour étouffer la contestation qu'il assimile à "des actes terroristes menés par des gangs armés". L'opposition quant à elle refuse tout dialogue avec M. Assad et exige son départ.
Outre M. Lavrov, M. Annan devait s'entretenir avec plusieurs ministres arabes au Caire, selon le porte-parole de l'ONU.
Moscou a jugé "déséquilibré" un nouveau texte américain au Conseil de sécurité exigeant du régime Assad qu'il arrête "immédiatement" les violences et appelant l'opposition à "s'abstenir de toute violence" dans le cas où le gouvernement se plierait aux exigences de cette résolution.
Les Etats-Unis ont d'ailleurs dit ne "pas (être) très optimistes" quant à la possibilité d'un accord au Conseil de sécurité sur la résolution.
Moscou et Pékin ont déjà imposé leur veto à deux résolutions contre le régime Assad à l'ONU, malgré la poursuite des violences qui ont fait quelque 8.500 morts, en majorité des civils tués dans la répression, selon l'OSDH.
Les tractations diplomatiques interviennent au moment où de nouvelles défections au sein de l'armée ont été annoncées, après la première démission d'un membre du gouvernement syrien, le vice-ministre du Pétrole Abdo Hussameddine qui a dénoncé la "brutalité" du régime.
Mais selon un responsable de l'opposition syrienne, Fahd al-Masri, "les défections ne pourront avoir du poids que lorsque des brigades et divisions entières déserteront l'armée".
Enfin, la responsable des opérations humanitaires de l'ONU, Valerie Amos, a déclaré après sa mission en Syrie être parvenue à un accord avec le régime pour une "mission d'évaluation humanitaire préliminaire". Selon l'ONU, quelque 1,5 million de personnes ont besoin d'une aide alimentaire et plus de 25.000 réfugiés sont recensés dans les pays voisins.