
La France et les États-Unis ont appelé à un renforcement des sanctions contre Damas lors de la conférence de Tunis sur la crise syrienne, ce vendredi. La Tunisie et le Qatar plaident, eux, pour le déploiement d'une force arabe en Syrie.
AFP - Paris et Washington ont multiplié vendredi à Tunis les avertissements à Damas, annonçant une panoplie de sanctions contre le régime de Bachar al-Assad, tandis que la Tunisie et le Qatar poussaient à l'envoi d'une force arabe pour mettre un terme aux tueries en Syrie.
C'est en Tunisie - pays où a débuté le "printemps arabe"- que Doha et Tunis ont donné de la voix au cours d'une conférence internationale sur la crise syrienne pour la création d'une "force arabe" entrant dans le cadre de la Ligue arabe.
Mais la création d'une telle force devrait obtenir "le feu vert" du Conseil de sécurité de l'ONU, a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé.
"Certains évoquent cette hypothèse. C'est au Conseil de sécurité de donner le feu vert à une telle opération", a dit M. Juppé à la presse, indiquant que le sujet n'avait pas été évoqué lors des travaux à huis clos de la conférence.
Plus de soixante pays - en l'absence de la Russie et de la Chine - et des représentants de l'opposition syrienne étaient réunis à Tunis pour examiner les moyens d'aider l'opposition syrienne et accentuer la pression sur Damas.
Dès l'ouverture de la conférence, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a mis en garde le pouvoir du président Assad.
Le régime syrien "paiera le prix fort s'il continue d'ignorer la voix de la communauté internationale et de violer les droits de l'homme" du peuple syrien, a déclaré Mme Clinton.
Elle a appelé la communauté internationale à "regarder attentivement" ce qu'elle peut faire pour "accentuer la pression" sur Damas. "Il est temps pour tout le monde ici d'infliger des interdictions de voyage aux hauts responsables du régime (...) de geler leurs avoirs, de boycotter le pétrole syrien, de suspendre tout nouvel investissement (dans le pays) et d'envisager de fermer ambassades et consulats".
M. Juppé a lui aussi appelé à renforcer les sanctions pour faire "plier" le régime syrien.
Dans son discours prononcé peu avant lors des travaux à huis clos de la conférence, M. Juppé avait déclaré: "Dès lundi (à Bruxelles, ndlr) nous prendrons de nouvelles mesures fortes, notamment un gel des avoirs de la Banque centrale syrienne".
La conférence va également condamner "sans ambiguïté la brutale répression" du régime, "il est même question de crimes contre l'humanité", a déclaré M. Juppé.
Elle réaffirmera "le soutien à la Ligue arabe et (à son) plan de paix" endossé le 16 février par une résolution de l'Assemblée générale de l'ONU et affichera "son soutien à l'opposition et au Conseil national syrien (...) que nous considérons comme le pôle de l'opposition", a-t-il dit.
Pour sa part, le ministre saoudien des Affaires étrangères Saoud al-Fayçal a approuvé l'idée d'armer l'opposition syrienne.
"Je pense que c'est une excellente idée", a déclaré le ministre, interrogé sur l'opportunité d'armer l'opposition. "Parce qu'il ont besoin de se protéger", a-t-il ajouté.
Appels pour l'envoi d'une force arabe
Ces pressions surviennent en contrepoint d'un appel de l'influent émirat du Qatar et de la Tunisie pour la mise sur pied d'une force arabe d'intervention en Syrie.
"Nous voulons que cette réunion soit le début de l'arrêt de la violence en Syrie et cela ne peut être fait que par la formation d'une force arabe internationale de maintien de la sécurité, l'ouverture de corridors humanitaires de sécurité pour apporter de l'aide au peuple syrien", a déclaré le ministre qatari des Affaires étrangères, Cheikh Hamad bin Jassim al-Thani.
Auparavant, le président tunisien Moncef Marzouki a déclaré que "la situation exige une intervention arabe dans le cadre de la Ligue arabe, une force arabe pour préserver la paix et la sécurité et pour accompagner les efforts diplomatiques pour convaincre Bachar (al-Assad) de partir".
M. Marzouki a également demandé qu'une "immunité judiciaire" soit accordée au président Assad et à sa famille, et a évoqué un éventuel refuge en Russie pour le dirigeant syrien.
Les participants à la conférence de Tunis - pays de la Ligue arabe, Union européenne, Etats-Unis, Turquie et différentes composantes de l'opposition syrienne - devaient également aborder un plan d'aide humanitaire, un début de reconnaissance de l'opposition syrienne, le soutien à la transition démocratique.
L'urgence, pour la communauté internationale, est de trouver les moyens d'aider le peuple syrien, écrasé par la répression - plus de 7.600 morts en onze mois selon l'ONU - et coupé du monde, particulièrement à Homs (centre).
A Damas, la télévision d'Etat a qualifié les pays réunis vendredi à Tunis d'"ennemis de la Syrie" et d'"amis des Etats-Unis et d'Israël".
En Syrie, le Comité international de la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge syrien ont indiqué qu'ils se trouvaient vendredi soir à Homs pour évacuer les victimes des bombardements, dont deux journalistes occidentaux blessés et deux autres tués.