
La zone euro est parvenue à un accord sur un nouveau plan d'aide à la Grèce d'un montant total de 230 milliards d'euros. Ce plan comprend l'annulation de 50 % de la dette détenue par les créanciers privés, soit 100 milliards d'euros.
Banques, fonds d’investissements et autres fonds spéculatifs ont accepté, dans la nuit de lundi à mardi, de renoncer à 100 des 200 milliards d’euros de dette grecque qu’ils détiennent actuellement... soit la plus importante remise de dette de leur histoire, puisqu'elle sera supérieure aux 80 milliards d’euros déjà perdus par ces investisseurs lors de la faillite de l’Argentine, en 2001. Une pilule amère imposée, à l’origine, par les États de la zone euro lors de l’adoption, en juillet 2011, du principe d'un second plan d’aide international à la Grèce qui doit être validé par l’Eurogroupe, à Bruxelles.
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Ce renoncement avait été présenté l’été dernier par la chancelière allemande Angela Merkel et par le président français Nicolas Sarkozy comme la participation du secteur privé à l’effort de sauvetage de la Grèce.
Depuis lors, les négociations entre Athènes et ses créanciers n’en finissaient plus. “Le problème n’était pas de déterminer combien les banques et autres investisseurs allaient accepter de perdre, mais plutôt de savoir qui allait perdre le plus”, explique à FRANCE 24 Benjamin Carton, spécialiste de l’économie européenne au Centre (français) d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii).
Les modalités de cette remise de dette avaient été fixées il y a sept mois par les pays de la zone euro. Celles-ci stipulent que, au lieu d’abandonner purement et simplement leurs créances, les banques et autres investisseurs les échangent contre d’autres titres... dont la valeur est divisée par deux.
Restait à déterminer comment répartir la charge des pertes entre ceux qui ont prêté de l’argent à la Grèce depuis dix ans. “Ceux qui ont avancé de l’argent à Athènes il y a dix ans alors qu’on croyait que la Grèce se portait bien devaient-ils payer autant que les investisseurs qui l'ont fait il y a 5 ans, alors qu’on commençait à parler de problèmes de comptabilité dans le pays ?”, se demande Benjamin Carton. C'est le résultat de ce marchandage qui doit être rendu public ce lundi.
La peur des CDS
Très attendu par les autres États de la zone euro, cet accord doit permettre à toutes les parties de dire que le secteur privé a consenti volontairement à perdre de l’argent sans qu’on ne lui impose quoi que ce soit. Une nuance de taille car si la réduction de la dette grecque n’avait pas été négociée, le pays serait considéré en faillite. Dans ce scénario, les créanciers auraient pu activer les CDS (Credit default swap), des assurances souscrites auprès des banques contre la faillite d’un État, ce qui aurait coûté des centaines de millions d’euros supplémentaires au secteur bancaire européen obligé de payer les créanciers en lieu et place d’Athènes.
“Mais seuls les dirigeants européens affirment encore que la Grèce n’est pas en situation de cessation de paiement en jouant sur des nuances juridiques comme cet abandon de dette ‘consentie’ par les banques”, estime Benjamin Carton. Pour cet économiste, ce nouvel épisode de la saga grecque fait partie du “scénario mis en place en 2009, qui consiste à soutenir financièrement la Grèce le temps que le reste de la zone euro se mette à l’abri des conséquences d’une faillite d’Athènes”. Ainsi, cet accord entre les créanciers privés et Athènes permet-il, avant tout, aux banques de savoir précisément les pertes qu’elles doivent provisionner dans leurs comptes.