logo

Malouines : Buenos Aires dépose une plainte contre Londres à l'ONU

L'Argentine a présenté vendredi aux Nations unies une plainte formelle contre la "militarisation" par Londres de l'Atlantique Sud. Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, appelle les deux parties à "éviter l'escalade".

Le conflit dure depuis plusieurs décennies et revient aujourd'hui sur le devant de la scène. A l’approche du trentième anniversaire de la guerre des Malouines - qui n'a jamais vraiment réglé le vieux différend britannico-argentin concernant la souveraineté des îles Falkland, ou îles Malouines, situées à l’extrême sud de l’Argentine -, les passes d’armes entre Buenos Aires et Londres connaissent même un nouveau souffle.

Le dernier éclat entre les deux pays date de vendredi 10 février : l’Argentine a présenté aux Nations unies une plainte formelle contre la "militarisation" par Londres de l’Atlantique Sud. Une offensive diplomatique dans laquelle Buenos Aires accuse les Britanniques d’avoir déployé leurs forces dans la région des Malouines. Plus précisément, l’Argentine y dénonce la présence d’un nouveau destroyer ultra-moderne et d’un sous-marin "ayant la capacité de transporter des armes nucléaires", selon les propos de Hector Timerman, le ministre argentin des Affaires étrangères.

"Absurdité" des déclarations argentines

Plainte

La plainte de l'Argentine au Conseil de sécurité n'a pratiquement aucune chance d'aboutir car la Grande-Bretagne, en tant que membre permanent, dispose d'un droit de veto.

"Pour quelles raisons, Londres a-t-il quadruplé sa puissance navale dans l’Atlantique Sud ?", a asséné ce dernier lors d’un déplacement, vendredi, au siège de l’ONU à New York, faisant écho aux propos qu’avaient tenus quelques jours plus tôt la présidente argentine, Cristina Kirchner. "[les Britanniques] militarisent l’Atlantique Sud, nous ne pouvons pas l’interpréter autrement", s’inquiétait-elle alors lors d’une conférence de presse au siège de la présidence devant une carte de l’archipel britannique frappé du drapeau argentin.

Face à l’exaspération argentine, Londres joue la carte de l’accalmie et cherche à dédramatiser des signaux perçus comme des menaces militaires. Vendredi, Mark Lyall Grant, l’ambassadeur britannique à l’ONU, a présenté comme autant de décisions de routine l’arrivée d’un nouveau destroyer - qui doit assurer la relève d’un autre navire - ainsi que le détachement pour six semaines aux Malouines du prince William - pilote d'hélicoptère de surveillance et de sauvetage au sein de la Royal Air Force. "Depuis 1982, nous avons augmenté notre défense dans la région. Rien n’a changé sur place ces derniers mois ou ces dernières années [...], s’est justifié l’ambassadeur britannique à l’ONU, sans toutefois s'exprimer sur les rumeurs d'un possible envoi d'un sous-marin nucléaire dans la région. Toutes les déclarations argentines sont "manifestement absurdes", a-t-il ajouté.

Souveraineté non négociable

Reste qu’en dépit de ces déclarations rassurantes, Londres et Buenos Aires restent inflexibles sur le sujet de la souveraineté de l’archipel. L'Argentine a obtenu le soutien de ses voisins - le Brésil, l'Uruguay et le Chili - pour qu'ils ferment leurs ports à tous les navires battant pavillon des Malouines.

Vendredi, les Britanniques ont à leur tour montré leurs muscles : "Nous ne voulons pas poursuivre la guerre des mots, mais il est très clair que si l'Argentine souhaite profiter du trentième anniversaire de la guerre des Falklands, nous défendrons évidemment notre position et nous la défendrons énergiquement", a déclaré Grant. Londres a toujours refusé d’engager des négociations avec l’Argentine tant que les 3 000 habitants des Malouines, en majorité des Britanniques, ne le réclament pas - arguant ainsi du principe d’autodétermination des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Eviter l’escalade

Ces nouvelles escarmouches diplomatiques inquiètent Ban Ki-moon, qui appelle à éviter l’escalade. Vendredi, le secrétaire général de l’ONU a exprimé sa préoccupation au sujet des échanges "de plus en plus vifs" entre les deux pays et "a exprimé l'espoir que les gouvernements argentin et britannique […] résoudront leurs divergences pacifiquement et par le dialogue." Il a en outre offert "ses bons offices pour résoudre cette querelle si les deux pays le demandent".

Une offre qui restera sans doute lettre morte selon Francisco Panizza, spécialiste de l’Argentine à la London School of Economics pour qui le Premier ministre David Cameron et la présidente argentine Cristina Kirchner n’infléchiront pas leurs positions. "Cameron joue la carte nationaliste sur cette question ce qui n’est pas sans rappeler l’action de Margaret Thatcher. Cela lui permet de charmer la droite du parti conservateur et d’enregistrer un gain politique. C'est la même chose en Argentine", avait déclaré le spécialiste à FRANCE 24, le 1er février dernier.