Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a déclaré samedi que "toutes les civilisations ne se valent pas". Prononcée lors d'un colloque organisé par l'association étudiante de droite UNI, la phrase a aussitôt suscité un tollé à gauche.
AFP - Claude Guéant a déclenché une vive polémique en déclarant que "toutes les civilisations ne se valent pas" dans un discours sur la République, aussitôt dénoncé à gauche comme une tentative pour Nicolas Sarkozy de glaner des voix du Front national, à moins de 80 jours du premier tour de la présidentielle.
Très rapidement, cette phrase prononcée samedi par le ministre de l'Intérieur lors d'un colloque organisé par l'association étudiante de droite Uni, s'est répandue sur internet, provoquant des réactions indignées. D'abord au conditionnel, la réunion étant huis clos, avant qu'elle ne soit confirmée dans la soirée par l'entourage de M. Guéant.
Dans le discours obtenu par l'AFP, M. Guéant appelle à "protéger notre civilisation" et s'en prend à la gauche. "Contrairement à ce que dit l'idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas", a déclaré le ministre également chargé de l'Immigration.
"Celles qui défendent l'humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient", a-t-il argumenté, ajoutant: "celles qui défendent la liberté, l'égalité et la fraternité, nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique".
"Cette phrase a été prononcée à l'occasion d'un discours absolument républicain dont tout l'enjeu était de condamner les civilisations qui ne respectent pas la liberté de conscience, la liberté d'expression et l'égalité entre les hommes et les femmes", a fait valoir auprès de l'AFP l'entourage du ministre.
Mais, avant même ces explications, la toile s'était emparée de la phrase, rapportée au conditionnel par Fréquence ESJ (frequenceesj.com), un site lié à l'Ecole supérieure de journalisme (ESJ) de Paris.
Sur son compte twitter, Harlem Désir, numéro 2 du PS, y a vu "la provocation pitoyable d'un ministre réduit à rabatteur de voix FN. Une majorité en perdition électorale et morale". "Retour en arrière de 3 siècles. Abject", a écrit sur le sien Cécile Duflot (EELV).
Sur twitter, Louis de Raguenel, chargé de la veille internet au ministère de l'Intérieur, a expliqué qu'"il s'agissait de condamner celles qui ne respectent pas la liberté de conscience, d'expression et l'égalité hommes/femmes".
Dans un communiqué, le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) a "condamné les propos" de M. Guéant en lui "demandant "ce qu'il cherchait en s'enfermant dans son discours xénophobe et raciste". Le ministre "se range dans la catégorie de ceux qui différencient et hiérarchisent les hommes, permettant le basculement vers un véritable racisme culturel", ont-ils ajouté.
SOS Racisme a dit, dans un communiqué, "espérer un démenti urgent" de ces propos. "Si ces derniers, très graves, avaient été bel et bien tenus par le ministre de l'Intérieur en fonction, ils marqueraient une nouvelle étape dans une dérive vers des extrêmes inacceptables, structurés notamment par des logiques d'infériorisation de l'Autre".
M. Guéant a déjà suscité la controverse sur des sujets connexes, déclarant notamment en avril que l'augmentation du nombre de fidèles musulmans posait "problème", ou, fin mai, que "les deux tiers des échecs scolaires, c'est l'échec d'enfants d'immigrés".
Cette nouvelle polémique à moins de 80 jours du premier tour de la présidentielle intervient alors que tous les sondages donnent Nicolas Sarkozy perdant face à son rival PS François Hollande.
Elle survient aussi au moment où la candidate du FN, Marine Le Pen, créditée d'environ 20% d'intentions de vote, tire la sonnette d'alarme sur sa capacité à rassembler les 500 parrainages d'élus nécessaires pour se présenter à la présidentielle.
Le FN, qui demande l'anomymat des parrainages, doit défendre une question prioritaire de constitutionnalité sur ce sujet devant le Conseil constitutionnel qui statuera avant le 22 février.
A cela s'ajoute la publication dimanche dans le JDD d'un sondage, excluant Mme Le Pen de la compétition, et mettant à égalité Nicolas Sarkozy et François Hollande avec 33% des intentions de vote.
Au vu de cette enquête, Louis Aliot, numéro 2 du FN, a dénoncé des manoeuvres visant à écarter Mme Le Pen, pour permettre au président sortant de se qualifier au second tour.